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Marc Cuadrado : "J’aime me servir des petites choses de la vie pour en faire un gag"

Par Nicolas Anspach le 16 mai 2007                      Lien  
Après avoir travaillé pour la presse et la publicité, {{Marc Cuadrado}} a retrouvé ses premières amours, la bande dessinée, en signant {Norma}, puis {Parker et Badger}. Dans cette dernière série, il met en scène un looser sympathique, éternellement en quête d’un emploi, en compagnie de son blaireau. Ce dernier est bien plus raisonnable et réfléchi que son maître.

Quel a été votre parcours jusqu’au premier tome de “Parker et Badger” ?

Il est assez particulier. J’ai toujours apprécié le dessin d’humour. Je suis venu à la bande dessinée tardivement. Du moins à la publication en albums ! Alors que j’étais étudiant aux Beaux-arts de Nice, j’ai été approché par Nice Matin. J’y suis devenu dessinateur de presse, et y ai fait mes premières armes en croquant l’actualité ou les faits de société. Je dessinais vite, et me fixais comme objectif d’aller à l’essentiel. A la sortie des Arts-Déco, j’ai mis sur pied un studio de création et me suis spécialisé dans la communication d’entreprise en BD. Puis, je suis parti pendant quatre ans à Montréal. J’y ai travaillé pour la presse, et ai inventé pour le magazine Safarir le personnage de Norma. J’ai envoyé un dossier à différents éditeurs avec des planches de cette série. Casterman s’est montré intéressé.

Marc Cuadrado : "J'aime me servir des petites choses de la vie pour en faire un gag"Quels sont les raisons de l’arrêt de la série ?

J’ai essayé d’analyser cet échec. Norma n’a pas rencontré un large lectorat. Les libraires ne savaient pas où placer cette série. Dans le rayon jeunesse ou le rayon adulte ? J’ai adouci l’atmosphère dès le deuxième en écrivant des gags moins « trash ». Comme Casterman réduisait le tirage au fur et à mesure, nous avons décidé d’arrêter les frais. Je me suis ensuite lancé dans Parker & Badger.

Un personnage en quête continuelle d’un emploi, un peu looser…

Je me suis inspiré d’Alex Presso, un personnage que j’avais créé pour un magazine québécois. J’y mettais en scène un jeune homme, petit et pansu, éternellement accompagné de son chien, qui effectuait des livraisons à droite et à gauche. Cette série était parue sous la forme de strips. J’ai repensé ce concept pour en faire quelque chose de différent. Ma belle-sœur, qui habite en Angleterre, avait un chien qui s’appelait Badger. Ce chien avait une bande blanche sur la tête et ressemblait à un blaireau. Sans savoir que « Badger » était un terme anglais signifiant « blaireau », j’ai croqué mon animal sous cette forme. Parker lui, s’est allongé et affiné par rapport à Alex Presso….

Extrait du Tome 5.

Finalement, c’est Badger, le blaireau, qui mène la barque …

Ils sont complémentaires. Parker est un flemmard. Son blaireau est petit, dépendant de Parker pour se déplacer ou assumer les tâches de la vie quotidienne. Il doit donc motiver son maître pour qu’il recherche un emploi en lisant des annonces dans le journal, faire la cuisine, etc. C’est un couple complémentaire.

Vous travaillez essentiellement sous la forme de gags en une planche.

Je me sens à l’aise dans ce format. Bien que cela soit un exercice stressant et difficile car il faut se remettre en question à chaque page. Il faut toujours essayer d’étonner le lecteur sans trop utiliser les running gags qui s’imposent naturellement.
Et puis, ce format est pratique pour le replacement presse. Parker & Badger a été publié très rapidement dans de nombreux supports. Ceci dit, j’apprécie raconter certains gags en trois ou quatre planches. Je l’avais fait dans le quatrième album, « Restons Zen », où mes personnages s’échangeaient leurs corps… Dans le dernier tome, « Mon frère, ce blaireau », je me penche sur la jeunesse de Parker & Badger. Je ne suis donc pas totalement fermé aux gags en plusieurs planches.

Couverture pour Mickey.

Quels sont vos références ?

On y retrouve le côté gaffeur de Gaston Lagaffe. J’ai également beaucoup d’admiration pour le travail de Bill Watterson. Calvin & Hobbes est sans doute la série qui m’a le plus touché ces dernières années.

Comprenez-vous sa décision d’arrêter sa série ?

C’est plutôt un geste courageux. Il sentait qu’il avait tout dit ! J’ai lu plusieurs interviews de Watterson. Je me retrouve parfois dans sa manière de travailler, de se servir des petites choses de la vie pour en faire un gag. Il y a beaucoup d’éléments du quotidien dans Parker & Badger, beaucoup de choses personnelles également.

Vous avez du mal à payer votre loyer ?

(Rires). Non. J’ai toujours eu de la chance de ce côté-là. Je n’ai jamais du courir longtemps après un travail…

Marc Cuadrado explore l’enfance de Parker & Badger
dans le dernier album, "Mon frère ce héros".

Vous parlez également de relation humaine dans Parker & Badger…

Oui. Je m’intéresse beaucoup aux états d’âme des personnages. Les rapports entre Parker et Clarisse sont compliqués. Elle l’aime, mais on ne sait pas très bien jusqu’à quel point. Lui, en est fou amoureux, mais ne sait pas comment s’y prendre. Son blaireau est là pour lui donner des conseils. J’essaie de faire passer de l’émotion à travers les détails.

Vous avez été remercié par Delaf & Dubuc dans le premier tome des Nombrils.

Oui. Comme je vous le disais, j’ai travaillé pour un magazine canadien. Delaf et Dubuc y publiaient les Nombrils. J’avais remarqué la qualité de leur travail. Ils m’ont envoyé un mail où ils me demandaient des explications concernant les éditeurs européens et surtout la manière de boucler un dossier de présentation. Ils ne pensaient pas envoyer leur projet à Dupuis car cette série leur semblait en marge de leur catalogue. J’ai envoyé leur dossier à mon éditeur, Benoît Fripiat. Il l’a regardé en priorité… On connaît la suite.

Quelles sont les séries d’humour qui vous font rire ?

Gaston Lagaffe, Pedro Le Coati (de Manu Larcenet et Michel Gaudelette), les Nombrils. J’apprécie également beaucoup Libon, un garçon qui signe régulièrement dans Spirou. En fait, je lis très peu de BD d’humour. Je tiens à me préserver et à rester relativement vierge. Quand on invente des gags, on a tendance à utiliser la même mécanique que celle des autres auteurs. Bien sûr, c’est à éviter absolument !

(par Nicolas Anspach)

Cet article reste la propriété de son auteur et ne peut être reproduit sans son autorisation.

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Images (c) Cuadrado & Dupuis.

 
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