Cet illustrateur hors pair, né à Woluwé-Saint-Lambert (Bruxelles) faisait partie de ces dessinateurs qui, comme Paul Cuvelier, Edgar P. Jacobs ou Jacques Laudy, étaient une génération de peintres égarés dans la bande dessinée.
Follet était le continuateur d’une lignée de dessinateurs attachés au scoutisme et à une enfance idéalisée et éternelle. Avant lui, il y avait l’illustrateur belge méconnu Pierre Ickx, qui a inspiré l’impressionant Pierre Joubert, créateur des couvertures de la fameuse collection Signe de Piste, mais aussi des meilleures de la collection Bob Morane, puis Michel Tacq alias MiTacq, le dessinateur de La Patrouille des Castors chez Dupuis. Il était, pourrait-on dire, le quatrième dans l’ordre de succession perpétuant un vérisme idéalisé imprégné de catholicisme.
Un illustrateur avant tout
Après quelques menus travaux dans l’illustration et la publicité, il publie très jeune dans le Journal de Spirou, réalisant quelques illustrations avant de contribuer en 1951 à ce qui servait alors de tremplin aux jeunes dessinateurs réalistes : Les Belles Histoires de l’Oncle Paul, principalement sur des scénarios d’Octave Joly.
Son dessin se caractérise par une solide inspiration académique et un encrage qui privilégie les effets de matière à la gouache. Il fournit en parallèle, en grande quantité, des illustrations pour le Journal Tintin (dès 1950, illustrant notamment Jean Ray, alias John Flanders) puis des « Histoires vraies », les concurrents des « Oncle Paul » de Spirou.
Mais c’est surtout dans l’illustration de couvertures, notamment pour Casterman, G.P., Hachette et Marabout ou pour des magazines voire des publicités que René Follet s’accomplit le plus pleinement à partir des années 1960, son chef d’œuvre étant sans nul doute la trilogie qu’il dessine pour la collection Terre entière, chez Dupuis : La Chevalerie (1966), Cordées souterraines (1969) et Les Grecs (1970).
Un puissant dessinateur réaliste
Mais la BD le rattrape rapidement. Il ne l’avait pas vraiment lâchée puisqu’il assistait MiTacq sur les aventures de Jacques Le Gall dans Pilote (1959) et sur les Bob Morane que William Vance réalisait pour Femmes d’Aujourd’hui dans les années 1970.
Tillieux lui écrit S0S Bagarreurs en 1968, le premier grand récit réaliste de l’auteur de Gil Jourdan, une intrigue maritime auquel Follet confère une grande force.
C’est ensuite Jacques Stoquart qui lui écrit deux épisodes du Russe Ivan Zourine pour Tintin (1974) tandis qu’Yvan Delporte crée pour lui à l’intention de l’hebdomadaire hollandais Eppo, la série Steve Severin (1975) pour laquelle il réalisera neuf épisodes, le premier signé par Delporte, les trois suivants par Jacques Stoquart et les quatre derniers par Gerard Soeteman.
Delporte lui fournit encore les récits complets de la Famille Zingari (1985).
Il poursuit dans Spirou avec Jean Ray dans une adaptation en BD d’Edmund Bell par Jacques Stoquart (1986), prépublication d’une série de quatre albums qui paraissent aux éditions Lefrancq où il réalisera moult illustrations et couvertures.
André-Paul Duchâteau lui écrit pour Spirou un Valhardi en 1984 : Les Naufrageurs aux yeux vides, tandis qu’il réalise, toujours pour Spirou, deux récits d’Ikar pour Makyo (1995).
On doit à ce travailleur acharné une Iliade sur un scénario de Stoquart (Glénat, 1982), une série mettant en scène Madame Tussaud, Terreur, avec André-Paul Duchâteau (Le Lombard, 2002), Shelena, sur un scénario de l’exploratrice Jéromine Pasteur (Casterman, 2005), L’Étoile du soldat sur un scénario Christophe de Ponfilly (Casterman, 2007), L’affaire Dominici, avec Pascal Bresson (Glénat, 2010), Le Pirate intérieur, avec Rodolphe (collection Aire libre, Dupuis, 2013), Plus fort que la haine, une fable antiraciste à nouveau signée Pascal Bresson (Glénat, 2010).
Sa carrière se termine par Les Voyages d’Ulysse, une somptueuse collaboration avec Emmanuel Lepage sur un scénario de Sophie Michel et Emmanuel Lepage aux éditions Daniel Maghen (2016), puis, avec les mêmes, Les voyages de Jules en 2019.
Une vie bien remplie donc dont les images, d’une puissance sans pareille, lui confèrent dans nos mémoires une sorte d’éternité. Nos condoléances vont à sa famille et à ses proches.
(par Didier Pasamonik (L’Agence BD))
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Photo en médaillon : Nicolas Anspach.
LIRE AUSSI :
L’Étoile du soldat – Par René Follet et Christophe de Ponfilly – Casterman (25 août 2007)
René Follet, un rêveur sédentaire - par Jozef Peeters - Editions de l’Age d’Or (26 février 2007)
Terreur - Par René Follet et André-Paul Duchâteau - Lombard (21 novembre 2002)
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