Parue sans interruption depuis sa création, cette série avait été publiée en France dans les quotidiens Presse Océan et Le Courrier picard, tandis que le quotidien Le Soir de Bruxelles et Le Progrès publièrent dès 1947 et pendant plus de vingt ans une autre de ses séries, Les Aventures du capitaine Kappie (référence au métier de son père), et La Voix du Nord sa célèbre série Panda dont quelques fascicules ont été publiés sous le label des éditions Artima, pour ne mentionner que ses principales publications en France.
Un créateur prolifique
Sa carrière avait commencé par un voyage que lui offrit son père, capitaine au long cours, en l’envoyant en Argentine où il rencontra à Buenos Aires le fondateur de la BD argentine, le très talentueux Dante Quinterno, créateur de Patoruzu que les Argentins considèrent comme l’ancêtre d’Astérix [1]. Nous sommes en 1931, cette rencontre le décide définitivement à embrasser la carrière d’auteur de bandes dessinées.
De retour à Rotterdam, il publie en 1933 sa première série, Les aventures de Bram Ibrahim, pour le quotidien néerlandais De Nederlander en même temps qu’une autre série, Tobias, pour le magazine Ideaal. Travaillant ensuite dans une imprimerie, il multiplie les illustrations et sert de sous-traitant à d’autres dessinateurs, notamment dans le cadre d’un studio qu’il créée avec Joop Geesink, avec lequel il réalisera aussi bien des travaux d’illustrations que des films d’animation. Cette collaboration s’acheva lorsque Geesink décida de faire cavalier seul avec des séries de films animés avec des marionnettes. La guerre rendant la vie difficile, il rejoint alors la revue Bravo créée par l’éditeur hollandais Meeuwissen [2].
Une gloire nationale
Comme pour beaucoup d’auteurs de BD européens, l’émergence de son talent suivit la raréfaction des BD américaines. C’est ainsi qu’il crée Tom Poes le 16 mars 1941, dans le plus important quotidien hollandais d’alors [3], De Telegraaf. Il s’adjoint alors un studio pour pouvoir subvenir à la production d’autant que, fasciné par les créations de Walt Disney (« Mickey Mouse »), de Pat Sullivan (« Félix le Chat »), ou encore des frères Fleischer (« Betty boop », « Popeye »), il s’oriente assez vite vers l’animation. Quand à partir de 1942 le quotidien qui l’employait passe sous les ordres d’un officier SS, il cesse sa collaboration et oeuvre pour la résistance, notamment dans la confection de faux papiers.
À la Libération, il multiplia les créations parmi lesquelles le capitaine Cappi déjà évoqué (créée en 1945, cette série perdura jusqu’en 1972) et la série Panda (1945-1972) traduites internationalement et dont le succès ne fut contrebattu que par les Suske & Wiske (Bob & Bobette) de Willy Vandersteen. Comme pour ce dernier, son studio accueillit les débuts des meilleurs auteurs de la BD hollandaise, parmi lesquels Lo Hartog van Banda (un temps scénariste de Lucky Luke) et Dick Matena sont connus du public francophone.
Ce classique de la BD néerlandaise s’inscrivait dans la tradition du dessin animalier au style rond popularisé par Walt Disney dès les années trente. Il y introduit un réalisme minutieux, démarche semblable à celle d’Albert Uderzo du style duquel il est, dans ces années-là, assez proche. La plupart de ses BD ont paru sous la forme de strips quotidiens dont le texte figure sous l’image, à l’exemple des images d’Epinal, procédé justifié par la grande qualité littéraire de ses textes et sa proximité avec l’univers de la littérature enfantine. Mais cette forme de BD, encore populaire dans les quotidiens avant 1970, a pris un coup de vieux et a fait place aux formes modernes de la BD actuelle. Il n’empêche que Toonder laisse une œuvre considérable de près de 12.000 planches de BD et quelques 200 histoires.
(par Didier Pasamonik (L’Agence BD))
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Cet article doit beaucoup au site de la librairie Lambiek et son érudite Comiclopedia.
On peut lire aussi le seul site francophone consacré à Toonder, Pressibus.
Toutes les illustrations sont (c) Maarten Toonder.
En médaillon : Maarten Toonder par lui-même.
[1] Ce qui est loin d’être faux, Goscinny, ayant vécu en Argentine pendant 17 ans, a évidemment été influencé par ce personnage qui est dans ce pays, à l’instar de Tintin chez nous, une figure nationale.
[2] Et dans laquelle devaient se révéler un certain Edgar P. Jacobs...
[3] Publié sous la botte allemande.