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Délicieuses pépites du patrimoine franco-belge

Par Didier Pasamonik (L’Agence BD) le 3 juillet 2011                      Lien  
Tandis que les premiers jours de Juillet avaient été marqués par la Japan Expo et la Comic Con’, où les mangas et les comics pouvaient déployer leurs fastes, les librairies accueillaient quelques pépites patrimoniales franco-belges signées Hubinon, Charlier, Tillieux, Forton, Mandryka et Gotlib. Voyons ce qui nous tombe dans le tamis…

Ce n’est pas la première fois que nous le constatons : la bande dessinée franco-belge vit un moment absolument exceptionnel de son histoire. Jamais elle n’a autant produit, avec une telle fidélité et un tel niveau de qualité, de rééditions des grandes œuvres de son patrimoine. Les magnifiques fac-similés de Tintin avaient montré la voie mais se contentaient de reproduire à l’identique de précieuses madeleines de Proust, tandis que, dans le même temps, les essais sur le reporter à la houppe se multipliaient.

Longtemps, les éditions Dupuis ont publié des « intégrales » irrespectueuses aux couleurs criardes –en raison d’une transposition maladroite des clichés originaux conçus pour la typo sous la forme de films offset. Le Lombard continue dans cette voie, hélas.

Délicieuses pépites du patrimoine franco-belge
Buck Danny L’intégrale T3
Éditions Dupuis

Longtemps, ces nouvelles publications étaient livrées au public sans contextualisation, sans même une notice mentionnant la date de création de l’œuvre. Aujourd’hui que le public est demandeur d’Histoire et que la bande dessinée est célébrée comme un art, des efforts sont consentis non seulement en terme de conservation de patrimoine, mais aussi en terme de production historique. C’est malin de la part des éditeurs car, dans pas longtemps, ces œuvres tomberont dans le domaine public et leur seule richesse résidera précisément dans cette aptitude à restituer l’œuvre fidèlement et à l’accompagner de documents inédits et uniques.

Buck Danny au Maghreb et au Moyen-Orient

Dans la poignée de nouveautés que nous offre cet été, le troisième tome de Buck Danny vole bien au-dessus du lot. Entre l’encyclopédiste Patrick Gaumer qui nous livre un texte empreint d’érudition et d’enthousiasme et le maquettiste Philippe Ghielmetti qui sait mettre en valeur les documents absolument uniques recueillis aux meilleures sources : photos et planches inédites en albums, croquis et notes préparatoires, documents connexes, l’alliance fait merveille et vient conforter la collection dirigée chez Dupuis par Martin Zeller.

C’est l’occasion de revenir sur cette extraordinaire séquence des aventures de Buck Danny dans laquelle, revenus à la vie civile, nos aviateurs servent de mercenaires à des trafiquants au profil plus ou moins louches. Ce sont bien entendu les tensions internationales liées au contexte politique de l’après-Guerre : l’indépendance d’Israël, l’arrivée de Nasser en Égypte et bientôt l’affaire du Canal de Suez, la décolonisation en marche dans le Maghreb, qui sont en sous-texte de ces histoires (quatre aventures) qui éclairent sous un jour nouveau non seulement l’histoire de la bande dessinée, mais aussi l’histoire tout court. Un document exceptionnel et un récit passionnant où Charlier & Hubinon sont au sommet de leur art.

Charlier superstar

Le même enthousiasme du chercheur est perceptible dans le travail de Gilles Ratier qui nous concocte l’accompagnement critique de cette réédition de Kim Devil parue aux éditions Sangam. On retrouve ce personnage créé par Jean-Michel Charlier et Gérald Forton pour Risquetout à propos de la création duquel Ratier revient avec un luxe de détails.

La vision des Indiens d’Amérique se nourrit de clichés et le dessin produit par Gérald Forton qui n’a pas encore la maestria qu’on lui découvrira dans Bob Morane, ont la naïveté d’une icône. Là encore, nous sommes face à un document révélateur de l’histoire des mentalités de cette époque.

Ratier fait un remarquable travail d’entomologiste et l’on sent bien, comme dans le cas de la préface de Buck Danny, que l’heure n’est pas à l’analyse, sauf dans l’effleurement, car ces deux travaux ne manquent pas d’éléments qui feraient grimper aux rideaux les thuriféraires du « politiquement correct » actuel.

Ange Signe T2
Éditions de l’Élan

Tillieux, évidemment

Même ferveur encore de la part de Daniel Depessemier qui publie deux aventures d’Ange Signe, Aventures aux Amériques (Éditions de l’élan). L’édition en album de ce pré-Gil Jourdan dispose d’une partie documentaire qui fait quasiment la moitié de l’album et qui fourmille de photos de Tillieux, notamment lors des premiers festivals d’Angoulême ou de Lucca ou encore à la librairie bruxelloise Curiosity House de Michel Deligne.

Elles sont le plus souvent signées Gérard Guégan qui nous livre ses souvenirs du célèbre voyage des auteurs franco-belges à New-York en 1972 organisé par Claude Moliterni et Jean-Pierre Dionnet et dont on voit ici quelques clichés. Hergé, Greg, Burne Hogarth, Hugo Pratt, Gil Kane y figurent en bonne place.

Souvenirs encore du premier festival d’Angoulême où l’on reconnaît aux côtés de Tillieux Harvey Kurtzman, Franquin, Burne Hogarth, Jean Claude Fournier. Sur d’autres clichés apparaissent William Vance, Mic Delinx, Jean-Louis Pesch, François Walthéry, Jean Mardikian, Dino Attanasio

Il y a ce cliché incroyable pris au Festival de Lucca où l’on voit Pierre Couperie s’entretenir avec Tillieux et Greg lesquels ont vraiment l’air de se méfier du chef de file de la critique française des années 1960.

Un document exceptionnel à la mise en page un peu foutraque et lesté de quelques coquilles, mais fichtrement sympathique, qui n’est tiré qu’à 1000 exemplaires. Achetez-le rapidement si vous ne voulez pas être condamné à le compulser en bibliothèque.

Ange Signe T2 par maurice Tillieux
Éditions de l’Élan

Clopinettes orphelines

Clopinettes par Mandryka et Gotlib
Éditions Dargaud

On regrette, en feuilletant les pages de l’intégrale des Clopinettes signée Mandryka & Gotlib, qu’il n’y ait pas eu le même travail de contextualisation d’une œuvre parue dans Pilote entre 1970 et 1973. Même si l’on est gratifié d’un bon nombre de planches inédites, on sent un boulot d’éditeur qui n’a pas voulu en faire trop, sans doute parce que les perspectives de vente sont moins affriolantes.

Or, qu’attend-on ? Que les auteurs soient morts ? Que leurs témoignages s’en aillent avec eux ? Gotlib dédicace l’album à Eve, sa petite fille de trois ans : « Elle comprendra cet album quand elle sera grande. » Nous pensons que Eve, comme le public, comprendrait mieux ces planches s’il y avait une introduction qui les replaçait dans leur contexte.

(par Didier Pasamonik (L’Agence BD))

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28 Messages :
  • De la bande dessinée jeunesse pour vieux. Il y a un marché vieillissant à ne pas laisser passer. Pendant que les jeunes lisent des mangas, jouent aux jeux vidéo et regardent des films en images de synthèse et bourrés d’effets spéciaux, les vieux nostalgiques maniaques qui trouvent toujours que tout était mieux avant se tournent vers leurs vieilles madeleines pensant qu’ils les transmettront à la jeunesse qui majoritairement s’en fiche. C’est le moment pour les éditeurs de se faire un peu de fric sur ces vieux machins, dans quelques années, le public pour ça sera mort.

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    • Répondu le 3 juillet 2011 à  13:18 :

      Remarque d’une bêtise abyssale. Cela reviendrait à dire que les œuvres d’Alexandre Dumas, Balzac ou de Jules Verne sont mortes avec leurs lecteurs.Charlier, Tillieux, Hergé... sont des classiques. Les lecteurs de mangas y viendront, tôt ou tard.

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      • Répondu le 3 juillet 2011 à  13:39 :

        Tout à fait d’accord avec le message précédent.

        Car relire le patrimoine bd d’hier ne signifie pas pour autant ignorer les albums d’aujourd’hui.

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      • Répondu par Richard Colin le 3 juillet 2011 à  14:48 :

        Hélas, qui lit encore Alexandre Dumas, Balzac ou Jules Verne ?
        Je peux vous donner les stats de ma bibliothèque.
        Sorties 2010 par auteur
        Jules Vernes : 7
        Alexandre Dumas : 22
        Balzac : 47

        Vous voulez les chiffres de, allez, au hasard, Katherine Pancol, à l’écriture plus qu’hésitante :
        Katherine Pancol : 742 (sur 19 exemplaires, vous voyez la rotation ...)

        Richard

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        • Répondu par Didier Pasamonik (L’Agence BD) le 3 juillet 2011 à  23:05 :

          Je respecte bien entendu votre statistique mais elle reflète surtout les attentes de votre clientèle et en aucun cas la situation de ces classiques qui sont lus dans le monde entier et qui figurent au programme scolaire.

          Avec les films que Spielberg et Jackson vont tirer de ses aventures et une vente annuelle en millions d’exemplaires jusqu’en Chine, Tintin, au hasard, est une vieillerie qui se porte bien. Idem pour les œuvres de Walt Disney, Jacobs ou pour Franquin.

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          • Répondu le 4 juillet 2011 à  08:44 :

            Tintin n’a rien à voir avec les vieilleries que vous présentez. C’est pareil pour les grands classiques de la littérature. Il y a une grande différence entre une œuvre pérenne et un vieux truc oublié au fond d’un tiroir qu’on ressort comme un vieux trésor. Ce trésor n’intéressera que les amateurs de vieilles BD, amusera la jeunesse peut-être un petit peu mais sans plus. Tintin est universel, mais la plupart des œuvres dont vous parlez resteront confidentielles. Blake et Mortimer marche plus aujourd’hui qu’à l’époque de Jacobs. Mais c’est une BD qui s’adresse majoritairement à des plus de 45 ans. Pas très tourné vers l’avenir. Il y a encore des tas d’enfants qui lisent Tintin et les Spirou de Franquin et qui adorent. Disney, ce n’est pas le nom d’un artiste mais d’un producteur, c’est une marque avec plusieurs périodes. La dernière qui commence est celle de Lasseter. Et ce type a un tel talent, un tel génie, qu’il a compris comment faire entrer la marque dans le XXIème siècle. Raiponce en est une belle illustration. C’est moderne et intelligent tout en respectant les codes de la maison. Pour ce qui est de Platon, Sénèque, Les Beatles, Gainsbourg... Ce sont des artistes universels avec des œuvres pérennes. Ange Signe, Kim Devil, Les Clopinettes, parlez-en autour de vous à n’importe qui, c’est pas universel. Ceci dit, tant mieux que ces œuvres soient rééditées.

            Voilà pourquoi je force le trait dans mon premier commentaire, pour provoquer un débat. Et je m’attendais aux réactions du genre "bêtise abyssale".

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            • Répondu par Didier Pasamonik (L’Agence BD) le 4 juillet 2011 à  08:59 :

              Ce message confirme une bêtise abyssale. Car, quand on additionne vos exceptions, on réhabilite tout le champ classique. Cela valait bien la peine de le dénigrer.

              Si nous parlons de "pépites", c’est bien parce que nous sommes conscients qu’il s’agit ici de choses rares qui ne sont pas partagées par tout un chacun.

              Votre réponse aussi démontre votre mauvaise foi (outre le fait que vous signez anonymement) : vous escamotez Jean-Michel Charlier, auteur de deux des quatre ouvrages chroniqués. Or, je ne crois pas que Buck Danny, Barbe Rouge ou Blueberry déserteront de sitôt le champ des classiques.

              Idem pour Gotlib et Tillieux qui restent à jamais des génies du XXe siècle dans le domaine de la BD, contrairement à votre Lasseter que mon libraire de BD n’a pas l’heur de connaître.

              J’ajoute que les plus de 40 ans sont un véritable marché et qu’il n’est pas surprenant qu’ils s’intéressent aux aspects historiques du 9e art. Gardez votre racisme anti-vieux pour vous.

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              • Répondu le 4 juillet 2011 à  09:09 :

                Si vous ne connaissez pas John Lasseter, vous ne connaissez donc pas grand chose à Disney, Pixar et ce qui se passe ailleurs que dans le petit monde bien fermé de la BD franco-belge.
                Buck Danny. Qui lit encore ça. Déjà gamin, je n’y arrivais pas tellement je trouvais ça ringard.
                Vos petites pépites sont celles des chercheurs d’or avec leur tamis qui se ruinaient la vie et la santé pour des choses rares et sans grande valeur. Les Beatles, Stevenson, Hergé... ce sont des gisements de pépites. Des trucs énormes.
                Je vous laisse continuer dans vos exaltations de philatélistes.

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                • Répondu par Sergio Salma le 4 juillet 2011 à  12:32 :

                  On est pourtant d’accord, regardez Raiponce de Disney c’est Rapunzel des Grimm. Et quand Raiponce sort au cinéma en 3D , on réédite les contes.

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                  • Répondu le 4 juillet 2011 à  13:56 :

                    Oui... mais avec un ton actuel. Les rapports entre les personnages sont modernes, épurés sur certains plans et alambiqués sur d’autres. On revisite toujours les classiques. Les classiques sont incontournables. Jamais vieux, jamais ringards. Les novateurs puisent dans ces classiques pour produire des œuvres audacieuses qui deviendront classiques à leur tour. Vous parliez des Beatles. C’est exactement l’illustration de ce processus. Dans le travail de Paul McCartney il y a des références nombreuses à la musique populaire anglaise , à la musique populaire américaine aussi bien qu’à la musique savante, les chants élisabéthains, le baroque anglais... George Martin l’a même aidé à creuser plus loin. Et pourtant, dans les années 60, c’était novateur. Ces trésors sont devenus classiques et restent des sources pour de nombreux compositeurs actuels.
                    Mais Ange Signe ou Kim Devil ne sont pas des œuvres pérennes. Ces rééditions sont plus des niches que des mines d’or. Alors, pépites pour collectionneurs nostalgiques mais pas pour tous. Des œuvres Anecdotiques. L’Histoire fait le tri, ne conserve que l’essentiel et ne s’encombre pas du reste. Sinon, nous nous retrouverons tous à vivre au milieu de cimetières.

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                    • Répondu par Sergio Salma le 4 juillet 2011 à  20:31 :

                      Là aussi faut se méfier. Si seul le temps était le tamis ultime, ça se saurait . D’ailleurs, y a-t-il vraiment, objectivement, des œuvres qui dépassent les autres ? N’est-ce pas une décision collégiale( d’on ne sait qui d’ailleurs). Ce sont toujours les mêmes vieux sages qui font les dictionnaires et les encyclopédies. Avec un lot immense d’a priori et de choix discutables( peu de femmes peintres prises au sérieux par exemple) ou une culture qui sans être étatique est officielle et modèle tout un système de pensée. Tout cela est orienté et nous ne parlons là que notre culture à nous, un petit milliard de personnes. Parce que la plupart de ce que vous considérez comme des classiques incontournables, les Indiens et les Chinois n’en ont jamais entendu parler et ce qui est le fondement de leur civilisation vous est parfaitement inconnu. Les humains aiment se raconter des histoires pour se rassurer, de la bible à Mickey Mouse ce sont toujours des récits édifiants. Puis certains événements et certains accidents amènent quelques-unes de ces oeuvres à être très connues. De là à dire que ce sont les plus universelles qui ont le plus de valeur, pas d’accord. Il y a des milliers de trésors enfouis justement pour des raisons qui échappent à la logique. Parce qu’il ne s’agit pas d’une science exacte malgré l’image que ça peut donner par moments. Un vieux monsieur plein de sagesse aura tout lu , tout vu, tout entendu, s’il connaît tous ses classiques, il aura réussi sa vie. Pas sûr pour ma part. Et les contes immémoriaux qui traversent les générations ne sont peut-être que le moins pire que veulent bien se transmettre les familles et n’ont juste qu’une fonctionnalité. On trouve trivial la consommation des oeuvres depuis une trentaine d’années mais il n’a jamais été question d’autre chose : former les esprits pour maintenir l’ordre social. Par moments, ça dérape franchement puisqu’on décapite tout ce qui dépasse .S’il y a bien dérive aujourd’hui elle n’est pas selon moi le fait de ce désordre" où l’on a perdu le sens des valeurs" ; ça c’est une vision bourgeoise et paranoïaque. Il me semble qu’il y ait un sain appétit de vivre dans cette frénésie. Les gamins qui jouent avec leur console, qui saute d’un film à l’autre, qui lisent en diagonale ne sont que les victimes du monde qu’on leur a proposé. Je tiens à préciser que je ne suis pas du tout d’accord avec monsieur Pincemi même si lui affirme être d’accord avec moi. Je n’ai jamais affirmé que c’est dans le passé qu’on trouve les fameuses pépites. Il y en a partout et tout le temps ; il y a eu des équivalents aux Star academy dans les années 30 . Je préfère de loin pas mal d’ouvrages récents à leurs homologues du temps jadis.

                      Répondre à ce message

                      • Répondu le 5 juillet 2011 à  10:31 :

                        Là aussi faut se méfier. Si seul le temps était le tamis ultime, ça se saurait . D’ailleurs, y a-t-il vraiment, objectivement, des œuvres qui dépassent les autres ?

                        Ben oui. Le temps, l’analyse, la critique font ce travail.

                        N’est-ce pas une décision collégiale( d’on ne sait qui d’ailleurs). Ce sont toujours les mêmes vieux sages qui font les dictionnaires et les encyclopédies. Avec un lot immense d’a priori et de choix discutables( peu de femmes peintres prises au sérieux par exemple) ou une culture qui sans être étatique est officielle et modèle tout un système de pensée

                        .

                        À propos, la culture officelle et étatique n’est pas toujours celle que l’on préjuge. La bande dessinée dite indépendante et qui existe aussi à grand renfort de subventions et d’aides du CNL, qui raffle les prix dans les salons, c’est la culture officielle. Paradoxe intéressant. Les Pompiers ne sont plus dans le camp qu’on croit.
                        Donc, vos vieux sages ne sont peut-être pas toujours les mêmes...
                        Les époques changent et les préjugés avec.

                        Tout cela est orienté et nous ne parlons là que notre culture à nous, un petit milliard de personnes. Parce que la plupart de ce que vous considérez comme des classiques incontournables, les Indiens et les Chinois n’en ont jamais entendu parler et ce qui est le fondement de leur civilisation vous est parfaitement inconnu.

                        Penchez-vous sur les mythes universels et la plupart des contes. Vous verrez que les chinois et indiens racontent les mêmes histoires et que certaines de nos histoires viennent d’eux...

                        Les humains aiment se raconter des histoires pour se rassurer, de la bible à Mickey Mouse ce sont toujours des récits édifiants. Puis certains événements et certains accidents amènent quelques-unes de ces oeuvres à être très connues.

                        Ce n’est pas par hasard qu’un mythe prend place dans la culture. Étudiez les cas Peter Pan ou Frankenstein...

                        De là à dire que ce sont les plus universelles qui ont le plus de valeur, pas d’accord. Il y a des milliers de trésors enfouis justement pour des raisons qui échappent à la logique.

                        Certains trésors peuvent toujours nous échapper, être volés, disparaître... Mais bon, avec les moyens d’investigations qu’on a aujourd’hui, ces trésors du passé se font plus rares. Par contre, dans ce que nous produisons aujourd’hui massivement, si l’analyse et la critique ne sont pas systématisés, il va y avoir des pertes.

                        Parce qu’il ne s’agit pas d’une science exacte malgré l’image que ça peut donner par moments. Un vieux monsieur plein de sagesse aura tout lu , tout vu, tout entendu, s’il connaît tous ses classiques, il aura réussi sa vie. Pas sûr pour ma part.

                        Un encyclopédiste aujourd’hui, ce serait difficile. Mais les œuvres universelles restent incontournables et il est possible de les lire en une vie. Elles ne sont pas si nombreuses. Maintenant, réussir sa vie n’a rien à voir avec être cultivé.

                        Et les contes immémoriaux qui traversent les générations ne sont peut-être que le moins pire que veulent bien se transmettre les familles et n’ont juste qu’une fonctionnalité.

                        Faudrait creuser cette hypothèse. J’en doute.

                        On trouve trivial la consommation des oeuvres depuis une trentaine d’années mais il n’a jamais été question d’autre chose : former les esprits pour maintenir l’ordre social. Par moments, ça dérape franchement puisqu’on décapite tout ce qui dépasse .

                        De tout temps, il y a eu cette réaction. On ne décapite pas on tri et des œuvres dénigrées apparaissent comme incontournables 30 ans plus tard. De là à dire que Ange Signe ou Kim Devil seront un jour des incontournables, j’en doute.

                        S’il y a bien dérive aujourd’hui elle n’est pas selon moi le fait de ce désordre" où l’on a perdu le sens des valeurs" ; ça c’est une vision bourgeoise et paranoïaque.

                        On dit le mot valeur et le vieux réflexe marxiste entend bourgeois. N’importe quoi et l’argument facile pour faire passer le médiocre pour intéressant alors que le médiocre reste médiocre malgré tout le discours médiatique dont il s’enrobe. La plupart des BD indépendantes sont de facture médiocre, avec une narration pas claire, des dessins pas du tout inventifs, maladroits, moches. Et beaucoup disent que c’est génial parce qu’il est convenu de dire du bien de ces machins. Ben non, c’est majoritairement de la merde à la mode qui ne disparaîtra. C’est pareil pour bon nombre de BD franco-belges des années 50 ou 60. Beaucoup de déchets démodés.

                        Il me semble qu’il y ait un sain appétit de vivre dans cette frénésie. Les gamins qui jouent avec leur console, qui saute d’un film à l’autre, qui lisent en diagonale ne sont que les victimes du monde qu’on leur a proposé.

                        Ils ne sont pas plus victimes que nous il y a 20 ans ou plus et pas plus victimes que nos grands-parents. Ils utilisent ce qui est autour d’eux comme on utilise une petit cuillère pour touiller son café plutôt que son doigt. Je ne joue pas aux jeux vidéo mais je suis intéressé par tout ce qui s’y crée. Il y a des œuvres, vraiment.

                        Je tiens à préciser que je ne suis pas du tout d’accord avec monsieur Pincemi même si lui affirme être d’accord avec moi. Je n’ai jamais affirmé que c’est dans le passé qu’on trouve les fameuses pépites.

                        Nous sommes deux à ne pas être d’accord avec Monsieur Pincemi. Il confond pépite et madeleine de Proust.

                        Il y en a partout et tout le temps ; il y a eu des équivalents aux Star academy dans les années 30 . Je préfère de loin pas mal d’ouvrages récents à leurs homologues du temps jadis.

                        Là aussi, nous sommes d’accord.

                        Répondre à ce message

                        • Répondu par Sergio Salma le 5 juillet 2011 à  12:50 :

                          je suis tout d’accord avec vous sur tout sauf sur "réflexe marxiste". Quand j’utilise le mot "bourgeois" c’est maladroit. Il y a cette impression de conservatisme mais là aussi le terme est inadéquat. Vous avez l’air d’être à cran. Si je m’esquinte souvent pour rien c’est avec l’ambition dérisoire de pacifier ; votre réponse bien tapée, claire me donne la sensation que vous réglez des comptes.

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                          • Répondu par Sergio Salma le 5 juillet 2011 à  16:57 :

                            "Beaucoup de déchets démodés" ...comme vous y allez.

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        • Répondu le 4 juillet 2011 à  11:06 :

          Il y a là un double phénomène : les auteurs qui sont au programme qu’il faut bien lire, et les auteurs populaires, qui ne le reste en général que quelques années avant de disparaître.
          J’ai été actif dans le monde des bibliothèque. Les statistiques et, encore plus important, les demandes de réservation de livres, montraient clairement que si certains titres étaient très demandés au moment de leur sortie (de Amélie Nothomb à Dan Brown, en passant par Marc Lévy...), quelques années après leur sortie, ils ne sortaient plus qu’épisodiquement. Toujours demandé, oui, mais sans que cela ne soit un raz de marée.
          Mais il existe un tabou sur les "auteurs au programme", qui veut qu’ils soient tous des incontournables. Mais qui oserait dire que, finalement, Pagnol reste un simple petit conteur sans grande envergure dont la marque dans l’inconscient collectif tient plus de la gouaille de Raimu que de la profondeur de sa prose ? On se souvient de Pagnol plus pour les films qu’il a inspiré que pour ses romans qui sont juste agréables, mais pas exceptionnels au point d’en faire un héritage patrimonial.
          La majorité des romans de Jules Verne sont peu intéressants, même si il a écrit quelques rès grands romans, je ne remets pas cela en cause. Il faut juste un peu d’honnêteté intellectuelle. Maupassant reste passionnant et Zola reste d’une grande modernité. Balzac a chié la copie, comme Dumas, et son talent ne l’a pas dispensé de produire une part non négligeable d’alimentaire à côté de ses chef d’oeuvres.
          De la même manière, faut-il encenser tout ce qu’à écrit Charlier ou toutes les planches de Tillieux ? Qu’elles soient disponibles est important, pour référence, pour étude ou que sais-je, mais ne nous voilons pas la face, Kim Devil est peu excitant. En même temps, les stakhanovistes comme Charlier ont produit de très bonnes choses, des pages plus dispensables, voire pénibles. Kim Devil est dispensable, comme l’est Arlequin dans la biographie de van Hamme, par exemple.

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      • Répondu le 3 juillet 2011 à  21:57 :

        Il y en a même qui lisent des vieilleries comme Platon, Seneque voire même l’épopée de Gilgamesh (la première fiction écrite ?).
        Et, c’est marrant, les momes que je connais écoutent des nouveautés comme les Beatles, les Stones, les Doors, Gainsbourg...

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        • Répondu le 4 juillet 2011 à  14:52 :

          Épopée de Gilgamesh qui, après avoir été oubliée pendant près de 25 siecles, a donné lieu il y a quelques années à une adaptation bd par Velmann et Duchazeau, ce me semble....

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    • Répondu par Sergio Salma le 3 juillet 2011 à  13:39 :

      Hou, le méchant coup de blues. Bonjour cher..... , avez-vous lu Jules Verne ? Et R.L. Stevenson ? Sans doute un peu Grimm aussi ? Ou bien on vous les a lus quand vous étiez enfant. Vous avez lu l’île noire ? Vous savez , ce vieux truc de ce gars, comment s’appelait-il déjà ? Eh ben, si vous répondez oui à ces questions c’est parce que des éditeurs ont réédité sans cesse ces livres. Un livre n’est pas un objet qui s’adresse à une génération . Vous êtes dans le piège total du consumérisme le plus idiot. Aimez-vous De Funès ? Ou Charlie Chaplin ? Connaissez-vous les impressionnistes et les comédies musicales ? Oui j’espère. A moins que vous pensez que tout ce qui a plus de 2 ou 3 ans doit être enfoui sous les couches de nouveautés et que les jeunes rejettent tout ça sans ménagement. On ne vous oblige pas à relire ni à diffuser ces beaux livres présentant d’anciennes oeuvres "remasterisées"et surtout contextualisées (ça change tout) , on vous dit seulement que de nouvelles éditions voient le jour. Si 10 ou 20 % des gamins vont aimer ça c’est déjà formidable. Puis les mangas (qui sont très bien) vont aussi vieillir et là aussi on réédite les Tesuka et autres Otomo. C’est quoi cette angoisse du patrimoine ? L’un n’empêche pas l’autre. Allons soyez cool, se repasser un petit Beatles, un Brassens de derrière les fagots voire même un Johnny Cash ou un Elvis n’empêche pas le même lecteur mp3 d’accueillir Biolay ou les Black eyed peas . Tiens une dernière remarque : je sais pas pourquoi, je ne voyais pas Mandryka -Gotlib dans l’école franco-belge. Je me demande si le franco-belge ( le belgo-français ?) ne s’adresse pas à tous les publics ; sans dire non plus que les clopinettes n’est pas dans cette catégorie. il me semble qu’il y ait quand même une nette différence de ton. Geerts ou Hislaire ou Frank Pé par exemple quand ils débutent font du franco-belge. Yann et Conrad aussi .Mais Mandryka ? Encore une grave question en ces temps troublés.

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      • Répondu par Sergio Salma le 3 juillet 2011 à  19:02 :

        Hou ! là, monsieur Colin c’est un vaste et douloureux débat. Parce que les oeuvres réimprimées sans cesse et donc vendues, distribuées partout c’est une chose. Qu’elles soient lues c’est autre chose. Il y a là un débat de fond formidable à avoir ; à savoir "qui lit tous ses livres jusqu’au bout ?" ou bien " qui lit tous ses livres" ? C’est un fait tabou , assez majeur je trouve , même pennac l’avait énoncé dans ses 10 "commandements", autorisant les lecteurs à abandonner un livre s’il ne les accroche pas.. On s’entoure de littérature, on pose le livre sur la table mais à part de vrais lecteurs passionnés et patients, combien de livres lus en diagonale ? Combien de livres lus parce qu’il faut qu’ils le soient( pour l’école ou pour briller en société)... Il faut s’y faire. C’est ça aussi la culture. Le truc en bd c’est qu’il faut une demi -heure ( même pour le dernier Bilal ardu )...chacun son rythme dans la vie , pour ma part j’ai toujours douté de mes amis ;-) Je connais leur vie et leur rythme de vie, je sais qu’ils font une lecture "administrative" de certains auteurs. Ils l’ont lu, oui, mais l’ont-ils ressenti ? En bibliothèque, un autre phénomène est aussi remarquable : on vient pour la lecture elle-même et non pour l’objet( que ce soit un problème de sous est encore un autre problème). Parce que les conventions sociales nous obligent à parader , on en rajoute. D’ailleurs avez-vous remarqué qu’on utilise le même mot pour le meuble qui contient les livres et le bâtiment qui les prête.

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      • Répondu par Alex le 3 juillet 2011 à  20:31 :

        Eh ben non Mr Salma, pas d’accord. Rien n’est prévu à ce jour pour la perénnité de la littérature ou de la bd. Vos exemples sont caricaturaux : "De Funès", please... Mais Stevenson, Grimm. Vous n´êtes pas très à la page il me semble. Bien entendu, nous avons accès de nos jours à un maximum de données et de trésors historiques culturels. Mais je vois mal une entreprise vivre sous les seules conditions de son patrimoine, à moins que celui-ci ne soit constitué que de "pierres blanches" culturelles ou historiques. Ce n’est pas le cas dans 90% des cas de figure.

        Et pour se repasser un petit Beatles, ou relire un Tesuka... cela demandra bien 20 ans vu l’inventivité et le talent des dévelopeurs de jeux vidéos (entre autres). Pendant ce temps, vous recommandez quoi ?

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      • Répondu par Oncle Francois le 3 juillet 2011 à  21:00 :

        Bien d’accord avec vous cher Sergio. Moi-même je préfére revoir un vieux Chaplin,Truffaut ou Chabrol, Verneuil, Kubrick ou Hitchcock que le dernier film des vedettes des émissions en clair quotidiennes de Canal Plus. Idem pour la musique : les Stones , les Beatles, Led Zepp, Pink Floyd, Miles Davis, Brassens et Gainsbourg, ah tout celà est un peu plus "puissant" (et bizarrement intemporel)me semble-t-il que les tubes de la Star Académie, de pas mal de vedettes du rap et de la techno.

        Pour la BD, c’est un peu différent, car il est clair qu’un certain nombres d’oeuvres n’ont pas connu la consécration d’un album à leur parution. Ou alors, ils n’avaient jamais été réédités, ce qui empèchait le public tout-venant de les découvrir (les EO en bon état valent trés cher, comme vous le savez).

        Et vous avez raison : Gotlib et Mandryka sont des auteurs de l’école Pilote (after Vaillant), ils n’ont rien à voir avec Spirou ou Tintin. Bonne fin de dimanche !

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      • Répondu le 4 juillet 2011 à  08:48 :

        Citez plutôt de vieux écrivains, acteurs, musiciens ,œuvres... méconnus pour argumenter votre thèse. Parce qu’autrement, dans les faits, vous ne ferez qu’apporter de l’eau à mon moulin.

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        • Répondu par Didier Pasamonik (L’Agence BD) le 4 juillet 2011 à  09:01 :

          Plutôt que de l’eau : du vent !

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          • Répondu le 4 juillet 2011 à  09:12 :

            Moulin à eau ou à vent, ça fait moudre du grain quand même.

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        • Répondu le 4 juillet 2011 à  14:28 :

          Vivaldi, Bach ou Pergolese (pour ne citer que des compositeurs) ont été délaissés pendant longtemps avant d’être redécouverts.

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        • Répondu le 4 juillet 2011 à  14:46 :

          Vivaldi, Bach ou Pergolese (pour ne citer que des compositeurs) ont été délaissés pendant longtemps avant d’être redécouverts.Quant aux grands philosophes grecs, nous les avons oubliés pendant des siècles avant que les philosophes arabo-musulmans ne nous les fassent redécouvrir. Seul le temps parfois très long peut nous dire ce qui est important pour notre culture. Et par pitié ne confondons pas nos gouts personnels avec la qualité intrinsèque (ou non) d’une œuvre (par exemple je n’ai jamais aimé Buck Danny, mais je considère néanmoins que c’est une série de qualité, riche en enseignements notamment sur la perception ciconstancielle de l’histoire de la deuxième moitié du XXe siècle).

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    • Répondu par Anne Aunime le 5 juillet 2011 à  12:04 :

      Cette remarque est stupide. Je suis un jeune quadragénaire qui suit autant l’actualité BD qu’il s’intéresse à celles des années 30/40 et suivantes. Je pleure de voir des oeuvres complètes vendues à la planche (des chefs d’oeuvre de Victor De La Fuente par exemple) sur Ebay et cie sans que celles ci aient une chance d’être (correctement) éditées un jour.
      Je salue donc le travail de restauration de ces petits (et parfois grands) éditeurs qui oeuvrent pour la sauvegarde de notre si fabuleux patrimoine. La superbe collection patrimoine, chez Glénat, gérée par Henri Filippini en est un exemple.
      Même les éditions à l’unité et à la photocopieuse du Taupinambour ont grâce à mes yeux. De grâce, ne perdons pas nos trésors ni nos racines.

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      • Répondu par Didier Pasamonik (L’Agence BD) le 5 juillet 2011 à  19:08 :

        Je souscris à votre sentiment. Nous avons affaire ici à un Troll des forums venu porter plutôt stupidement la contradiction. On le connaît, il a ses habitudes. Il ne peut pas comprendre que ces petites éditions à tirage limité sont du pain béni pour les chercheurs (et les collectionneurs) car elles permettent de parfaire la connaissance des grands maîtres.

        Mais pour notre Troll, c’est Lasseter le grand auteur de la bande dessinée, à se demander s’il sait encore ce que c’est et ce qu’il vient faire sur ce forum.

        On ne s’étonnera plus, avec ce genre d’individu, de trouver dans la collection de Spirou, des auteurs comme Fabrice Parme, cet accident graphique et industriel plaqué sur les merveilleux univers conçus par Jijé et Franquin, dont la seule référence sont les gouacheurs de Hanna & Barbera.

        Insoutenable mélange des genres.

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