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Denis Chetville : "C’est un vrai bonheur pour moi de dessiner Sam Lawry"

Par Erik Kempinaire le 27 novembre 2006                      Lien  
Denis Chetville, ou l'itinéraire d'un revenant. Comment revenir au devant de la scène après une première carrière où il a accumulé les aléas jusqu'à se retirer du métier durant quelques années. Saluons le retour d'un dessinateur talentueux !

Pouvez-vous revenir sur votre première tentative de dessinateur de bande dessinée et vos multiples déboires qui vous ont conduit à abandonner la carrière pendant plus de dix ans ?

Je ne souhaite pas m’étendre sur mes années noires. Je pense que, étant fort jeune, je n’avais pas la sagesse nécessaire pour appréhender le métier de manière objective. J’ai donc publié chez divers éditeurs qui n’ont pu, pour diverses raisons, mener leurs projets à bien. Je me suis accroché tant bien que mal, ayant toujours voulu dessiner mais ce fut trop dur, des difficultés d’ordre personnel s’ajoutant à mes déboires éditoriaux. Ce fut néanmoins l’occasion de belles rencontres avec des scénaristes qui débutaient comme moi, Di Giorgio et De La Royère ; nous sommes restés d’ailleurs en très bons termes, bien que nous nous voyons trop peu dû à mon éloignement géographique. J’habite en effet depuis quelques années en Bourgogne.

Avez-vous quitté le milieu de la bande dessinée après ces galères ?

Oui, mais pas le dessin car j’ai retrouvé du travail comme graphiste pour une société textile qui exploitait des licences de personnage de bande dessinée. J’ai passé dans cet environnement plus de dix ans avec des collègues qui sont devenus mes meilleurs amis.

Comment êtes-vous entré en contact avec les éditions Bamboo ?

Au bout d’un moment le virus de la BD m’a repris. J’ai rencontre les gens de Bamboo parce qu’ils ont leurs bureaux à Macon et que j’habite tout près. Je leur ai soumis un projet qu’ils ont refusé, mais ils ont néanmoins gardé un dossier avec mes travaux. Lorsque Mig a souhaité arrêter Sam Lawry, ils m’ont contacté et j’ai alors dû les convaincre que j’étais apte à la reprise de cette série en travaillant comme un malade ! Ils ont fini par accepter et ils m’ont confié la série.

Quels éléments vous attirent-ils dans cette série ?

C’est un vrai bonheur pour moi de dessiner les aventures de Sam parce que je suis fasciné par l’Amérique des années 70, de mon adolescence.
Les premiers romans que j’ai lus, les premiers films que j’ai vus datent de cette époque. Il en va de même pour mes premières émotions musicales.
J’adorais Robert Redford, Dustin Hoffman, Gene Hackman, Steve McQueen, les Doors, les Stones, Grateful Dead, Traffic et tous les groupes mythiques de la Côte Ouest. 25 ans après je me retrouve à dessiner cette époque, à enquêter comme un journaliste pour retrouver de la doc, vous pouvez aisément imaginer le pied que je peux prendre !

Le personnage de Sam Lawry n’est-il pas trop lourd à animer ?

Non, j’adore ce personnage car je le trouve très humain, avec sa complexité et ses failles, sa capacité à prévoir la mort des gens
est plus une calamité qu’un don ! C’est un peu pour tout le monde pareil, mais quand vous sortez de la norme, soit vous restez dans votre coin,
soit vous vous attirez de gros ennuis. Et Sam a une fâcheuse tendance à se mêler des affaires des autres. On ne peut pas dire qu’il cherche les ennuis mais il les attire comme certains attirent la poisse.

Comment se passe votre collaboration avec le scénariste Hervé Richez ?

Ma collaboration est très simple et efficace, la plupart du temps
je trouve son travail très bien et j’ai juste à le mettre en musique, mais il reste sensible à mes remarques et n’hésite pas à en tenir compte.

Comment présenteriez-vous la série à un profane ?

Je dirais que - bien que Sam Lawry soit une série dans un genre qui n’est plus très en vogue actuellement, le réalisme politico-policier - l’intérêt de cette BD de genre (comme le western ou la SF) est que souvent le plaisir est à trouver autant dans les digressions que dans l’intrigue. Sam est un homme malade qui a des difficicultés à reprendre une vie civile après avoir combattu au Viêt Nam. On décrit aussi la vie "démocratique" d’un pays quand l’appareil d’état est mis au service d’intérêts particuliers.

Quels seront les thèmes abordés dans le prochain cycle ?

Il traitera de la Guerre Froide, du confort d’avoir un ennemi effrayant pour un état. Pour l’instant c’est mon seul projet tant Sam Lawry me demande de travail !

Etes-vous enfin un auteur heureux ?

Oui, car je peux vivre de mon dessin et de mon envie de raconter des histoires. Le dessin est un réel plaisir, mais ne reste qu’une petite partie d’une vie d’homme et il serait utopique de fonder sa vie sur ce seul plaisir. Si un jour cele ne devait plus marcher, il y aura toujours moyen de faire autre chose.

(par Erik Kempinaire)

Cet article reste la propriété de son auteur et ne peut être reproduit sans son autorisation.

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