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Dolor, un roman sombre par les yeux d’une femme

Par Charles-Louis Detournay le 14 août 2010                      Lien  
Sorti il y a quelques mois, ce one-shot colle pourtant parfaitement à ce week-end du 15 août. L'ambiance chaude du Midi, un chassé-croisé autant amoureux que tendu, bref un excellent récit pour se délasser avant d'attaquer (bientôt) la rentrée.

Comme pour tout art, il y a des associations en bande dessinée qu’on n’attendait pas et qui ont tout pour surprendre. Dolor fait partie de ces excellentes surprises, réussissant un parfait amalgame entre la noirceur de Paringaux, et la sensualité de Catel.

Deux univers, une intersection

Depuis plus de trente ans, le nom de Philippe Paringaux est associé à celui de Loustal. Il lui écrit des récits d’ambiance, rythmés par de longs récitatifs, collant si bien aux larges illustrations du dessinateur. Souvent nominée et primée, leur association ne fait aucun doute pour les amateurs de bande dessinée. Pourtant, il sembla qu’une femme vint mettre son grain de sel dans cette entente cordiale.

Enfin, c’est plutôt José-Louis Bocquet qui nota la complicité naissante entre Paringaux et Catel, et il leur proposa de collaborer sur un récit mêlant leurs deux univers. Un défi surprenant, mais qui stimula Catel, pourtant plus habituée à des ambiances moins sombres.

Ainsi nait Dolor, une jeune femme libre et farouchement indépendante de 38 ans. Journaliste, elle virevolte entre les amants, menant sa vie à la hussarde. Pourtant, cette jeune femme au caractère bien trempé dissimule une blessure : la disparition soudaine de son père qui les a abandonnées, elle et sa mère, alors qu’elle était encore enfant.

Dolor, un roman sombre par les yeux d'une femme
La découverte du journal de son père va bouleverser la vie de Dolor

Or voilà que le souvenir de ce père se ravive brusquement, lorsque Dolor est avisée de son décès. Lors de l’enterrement, elle se voit remettre une mystérieuse enveloppe contenant de nombreux documents : des photos, des souvenirs et, surtout, un journal intime. Dolor part alors sur les traces de ce père qu’elle a si peu connu, et de cette fracture qu’il avait hérité de son sombre passé.

Les éléments d’une réussite

Dès les premières pages, on est autant surpris que rassuré. Si Catel continue de préférer un personnage principal féminin, Paringaux a laissé tomber les récitatifs pour dialoguer directement. Pour autant, on est fort éloigné de Kiki ou Quatuor avec un récit qui emprunte résolument les chemins du suspense, du secret et de la noirceur.

Dolor est une femme très bien construite, dans la blessure qu’elle porte depuis l’enfance, et l’abandon de ce père dont elle garde quelques souvenirs. Ce qu’elle continue d’identifier comme une lâcheté crasse, elle le fait payer à tous les hommes qui la côtoient. C’est la recherche et la progression psychologique de cette femme que nous suivons pas à pas dans le récit. Sans s’en rendre complètement compte, Philippe Paringaux a dopé l’intensité de l’évocation par son propre vécu, abandonné par son père à sa naissance.

L’évocation historique et la sensibilité féminine de Catel.

Le récit ne se limite pourtant pas à cette enquête, se doublant du destin tragique d’une star de cinéma, Mireille Balin, dont le destin fut brisé à la fin de l’occupation. Un récit plus authentique qui renforce l’aspect crédible de l’ensemble [1]. De plus, derrière le secret du récit se cache la part d’ombre qui réside dans chaque famille, comme Frank Giroud aime également à le dépeindre dans Secrets.

Entre la mafia du Midi, les flash-back au sein du journal du père, ou pendant l’Occupation, les 72 pages du récit tiennent en haleine autant qu’elles composent les ambiances diverses qui traversent la jeune femme. Malgré une apparente complexité, le fil de l’histoire se suit avec facilité, aidé par l’indentification progressive envers les personnages de cette jeune fille trop détachée, et ce père trop lâche pour demeurer auprès de ses proches.

Une complicité qui n’est pas feinte !

Au final, Dolor est donc une réussite de mélange des genres, mêlant de belles ambiances à des moments plus alertes. On ressent fort bien la complicité qui noue les deux auteurs (voir notre interview), association qui va d’ailleurs perdurer par l’évocation du monde du rock ‘n roll vue par de petits moments informels rapportés par Paringaux.

En attendant, il reste un beau livre, pas vraiment polar, ni historique ou dramatique, mais un récit humain, aussi simple qu’efficace !

(par Charles-Louis Detournay)

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Photos : © CL Detournay

[1Pour faire la distinction entre la fiction et la vérité, un dossier de huit pages est proposé en fin de volume, afin de mieux faire connaissance avec Mireille Balin.

 
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