Ca pourrait se passer aujourd’hui, ou hier, ou dans un avenir proche. Une administration au nom ridicule, L’office central de contrôle et de vérification (OCCV), pousse les citoyens au bord de la crise de nerfs à force de files d’attentes interminables et de procédures tatillonnes au possible. Jusqu’au jour ou un brave monsieur, désespéré de n’avoir point obtenu son certificat, prend sa bonne en otage. La police ne se montrant pas plus psychologue que les fonctionnaires épinglés plus haut, la confrontation se termine en massacre. Le ministère dépêche alors la sculpturale Domitille pour réformer l’OCCV, avec en tête le mot magique : informatisation. Chez les fonctionnaires scotchés à leurs privilèges et leur routine, la pilule est dure à avaler...
Jonquet avait signé, il y a plus de vingt ans, un roman noir intitulé Du passé faisons table rase, au titre extrait de l’Internationale. Une attaque à boulets rouges contre le communisme miné par certaines habitudes staliniennes. Ici, le jeu de mot est un peu plus subtil, mais la charge n’est pas plus légère. Cette administration cauchemardesque évoque à la fois certaines dictatures communistes et les mondes sclérosés à la Brazil.
Chauzy force le trait, épousant parfaitement les développements délirants de l’intrigue (une histoire d’amour, l’importance du menu de la cantine pour le moral des agents...). Ses personnages sont moins peaufinés qu’à l’habitude, comme par exemple dans la série Clara.
Mais à force d’en faire des tonnes, les auteurs ne convaincront que les plus farouches anti-fonctionnaires, anti-syndicatlistes (la CGT, repabtisée CGO, appréciera) parmi les lecteurs.
Un peu d’originalité dans la cible aurait donné à l’album un peu d’air. N’oublions pas que bien des grandes entreprises connaissent parfois des situations identiques.
Par ailleurs, l’apparence sexy en diable de la directrice révolutionnaire tombe comme un cheveu dans la soupe. Un personnage qu’on voit dès les premières pages surfer sur le net sans soutien gorge, seule dans son appartement. Indispensable à l’histoire, sans aucun doute...
Evidemment, cette modernisation impossible se termine en fiasco, avec au passage une furie libidineuse qui s’empare de bon nombre de personnages.
Un album un peu lourd, un peu réac, et assez salace. Il trouvera éventuellement son public le plus enthousiaste chez les ados sarcastiques.
(par David TAUGIS)
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