Ibn Al Rabin a le trait noir et les vides blancs. Il a l’humour absurde et l’esthétique minimaliste. Ibn Al Rabin ne prétend pas révolutionner la BD, mais il essaie de la faire bouger, quitte à réinventer la poudre au détour d’une case.
Tout au long de ces plus ou moins 365 planches (plutôt plus que moins, l’auteur n’est pas radin), Ibn Al Rabin manipule les formes - souvent pas plus que des tâches d’encre, des ronds ou des carrés - et teste notre patience. Parfois il raconte une histoire d’amour, parfois c’est l’arrivée des aliens sur Terre, d’autres planches sont des fables géométriques ou des poèmes grotesques. À partir de là, Ibn Al Rabin fait hurler son lecteur de rire, mais le déconcerte aussi car on reste quelque fois perplexe devant une page particulièrement absconse.
Les planches de cette somme annuelle ne se racontent pas. Qu’on sache simplement qu’elles font irrémédiablement penser à celles de M. Le magicien (en intégral à L’Association, à lire ou à relire absolument). Qu’on sache aussi que la planche du dimanche 5 août 2001 est une suite de carrés blancs puis noirs puis blancs qui est à mourir de rire.
Comme il faut quand même un bémol, on est bien obligé de reconnaître que le niveau est inégal, que parfois les bonnes idées ne sont pas au rendez-vous, qu’on retrouve à certains endroits des choses qu’on avait déjà vues ailleurs. On peut aussi regretter (ou apprécier) que l’on penche à certains (courts) moments vers le journal (je n’ai pas écrit « carnet » !) de bord...
Non, en fait on ne regrette pas ces petits passages d’autobiographie, parce qu’ils nous permettent d’apprendre que l’auteur est docteur en mathématiques (d’où sa passion pour l’absurde ?) et qu’il exècre les voleurs de vélo (à bon entendeur...). Quant à ce qu’on connaissait déjà, c’est plus joli que du Trondheim et aussi drôle que du F’murr.
Enfin un album de bande dessinée !
(par Martin Grillard)
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