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Florence Mixhel & Julien Papelier : « Le Roi est intéressé par les nouveaux héros et les valeurs qu’ils véhiculent »

Par Charles-Louis Detournay le 1er août 2018                      Lien  
Suite à la visite du Roi des Belges à leur siège social à Marcinelle, le Directeur général des Editions Dupuis et la rédactrice en chef du Journal Spirou nous ont livré le contenu de leurs échanges avec le Roi Philippe, et par-delà, leurs projets et leurs futurs centres d'intérêt pour le Journal de Spirou et de Dupuis.

Lors de la visite que vous venez d’encadrer, le Roi semblait particulièrement intéressé par les valeurs véhiculées par les récits de bande dessinée ?

En effet, il est très curieux de savoir quels sont les types d’histoires qui intéressent les nouvelles générations. « Que représentent les Héros ? Bien au-delà de Dupuis ? » La question qu’il se pose fait justement écho à celles que nous avons actuellement en chantier, entre autres au sein de R/O, et aussi pour capturer l’intérêt de nouveaux lecteurs.

Julien Papelier : « Promouvoir la lecture fait partie intégrante des missions d’un éditeur de bande dessinée »

Vous avez expliqué que les héros peuvent effectivement passer d’un média à l’autre, en rappelant que Dupuis n’est pas qu’un éditeur de bande dessinée ?

Dupuis est avant tout un éditeur de bande dessinée, mais c’est vrai que les usages et notre expérience nous invitent à raisonner au-delà du support papier. Par exemple, nous étudions les évolutions de la bande dessinée sur smartphone. Le sujet de l’internationalisation est tout aussi important pour développer le marché du franco-belge, et par là les revenus des auteurs. Soutenir l’essor de nos univers nécessite donc de faire exister nos personnages sur différents supports.

Florence Mixhel & Julien Papelier : « Le Roi est intéressé par les nouveaux héros et les valeurs qu'ils véhiculent »
Julien Papelier détaille les grands axes stratégiques de Dupuis, son histoire et ses objectifs.
Photo : C-L Detournay

Cette vision actuelle de la bande dessinée, avec ses problèmes et ses nécessités, vous vouliez la transmettre au Souverain ?

C’était certainement l’un des messages que je voulais adresser. D’où l’entrée en matière que nous avons choisie avec notre premier Webtoon ! Dupuis reste dans son métier de passeur d’histoires avec ce type de support, qui préserve la liberté artistique de la bande dessinée, avec l’alliance du texte, de l’image, et de l’ellipse. Bien entendu, cela reste différent de la planche BD classique, car la grammaire du Webtoon apporte des contraintes différentes, mais donc aussi la créativité qui en résulte. J’ai donc expliqué au Roi que cette aventure permet de revenir aux origines de Dupuis : le feuilleton, des épisodes auxquels on est accroché et que l’on veut retrouver pour en connaître la suite.

Le Webtoon est donc le futur de la bande dessinée ?

Nous ne réfléchissons pas dans cette perspective. La publication papier reste notre fer de lance, mais le Webtoon permet aussi de toucher un public différent. Promouvoir la lecture fait partie intégrante de nos missions à mes yeux. Plus on lit, plus on s’intéresse au monde qui nous entoure, plus on découvre et l’on s’enrichit. En tant qu’éditeur, nous sommes présents pour bien entendu transmettre les créations des auteurs qui nous font confiance. Mais l’on espère également contribuer à renouveler l’intérêt du public pour la lecture.

Julien Papelier offre plusieurs bandes dessinées au Roi, dont le nouvel album d’Emile Bravo, à paraître à la rentrée.
Photo : C-L Detournay

A ce sujet, vous avez justement remis plusieurs albums au Roi. Qu’avez-vous sélectionné ?

Le Spirou d’Emile Bravo, un chef-d’œuvre tant attendu par toute la profession, et qui a suscité un grand intérêt. J’ai expliqué l’ambition de l’auteur de s’adresser à toutes les générations, afin de raconter et d’explorer encore l’épisode dramatique de l’occupation en Belgique, les choix auxquels ont été confrontés ceux qui l’ont vécu, avec un regard très moderne, très contemporain, qui nous interroge sur ce que nous aurions fait, nous, à cette époque. Un questionnement qui garde plus que jamais son sens, dans un contexte qui demeure ombrageux.

J’ai aussi présenté la collection du Fil de l’Histoire, très importante à nos yeux car elle symbolise également cette question primordiale de la transmission. Un remarquable travail de Sylvain Savoia & Fabrice Erre ! Le Roi a beaucoup accroché à cette thématique et désire lire ces albums avec ses enfants. Puis, j’ai offert d’autres albums, dont certains en clin d’œil, comme Buck Danny, car le Roi est un ancien pilote de chasse. Sans oublier Dad, notre papa gâteau qui soigne ses quatre filles... Comme vous le savez, leurs majestés Philippe et Mathilde ont quatre enfants !

Julien Papelier, directeur général des Editions Dupuis
Photo : Charles-Louis Detournay
Florence Mixhel
Photo : DR

En tant rédactrice en chef du Journal de Spirou , vous venez de recevoir le roi des Belges au sein des locaux de Marcinelle. Quel est votre sentiment ?

C’est bien entendu un honneur d’accueillir notre souverain chez Dupuis ! Et de pouvoir lui présenter notre rédaction, la façon dont le Journal de Spirou se construit jour après jour, semaine après semaine depuis 80 ans.

Florence Mixhel : « L’intérêt du Roi se porte sur la narration et les valeurs qui sous-tendent nos histoires »

SM le roi Philippe pensait que les auteurs étaient à Marcinelle en train de réaliser les planches à côté de l’équipe de rédaction. Est-ce vrai ?

Oui, c’était l’idée qu’il s’en faisait, comme la majorité de nos lecteurs, d’après moi, qui continuent de penser que les planches sont réalisées à la rédaction. En réalité, notre équipe accompagne les auteurs et coordonne l’ensemble. Cette visite était donc l’occasion de lui présenter cette organisation. Ces explications semblaient beaucoup l’intéresser, à la fois concernant le travail de l’équipe de rédaction, mais les auteurs et de l’importance du scénario.

Florence Mixhel fait découvrir les arcanes de la rédaction à un souverain aussi intéressé qu’amusé
Photo : C-L Detournay

Au-delà de la forme, ses questions étaient effectivement très ciblées sur le fond des récits ?

À travers ses questions, j’ai ressenti un grand intérêt pour la narration, et surtout pour les valeurs qui sous-tendent nos histoires.

Le Roi a été interpellé par le Webtoon, mais il était presque dubitatif d’entrée de jeu, comme si cette forme de narration était de la « sous-BD »...

Il a vite passé outre cet a priori, finalement assez répandu, pour saisir la réalité des opportunités du Webtoon : son aspect moderne, l’innovation qu’il apporte et la réactivité qu’il engendre sur les réseaux sociaux, tout en restant de la bande dessinée, avec ses propres contraintes et ses propres avantages.

Le Roi Philippe découvre la création du Journal de Spirou
Photo : C-L Detournay

Cette visite royale vous donne-t-elle envie de réaliser pour la rentrée un numéro spécial du Journal de Spirou dédié à cet événement ?

Pourquoi pas, mais comme vous le savez, le Journal se construit plusieurs semaines, voire plusieurs mois à l’avance. Pour une réaction plus rapide, nous mettrons certainement la priorité sur Spirou.com, d’ailleurs récemment remis à jour.

Propos recueillis par Charles-Louis Detournay

(par Charles-Louis Detournay)

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2 Messages :
  • dommage que florence Mixhel ne par le pas d’avantage de l’avenir du journal spirou, et de ce qu’elle souhaite en faire, pour l’instant ce qu’elle en fait est un peu floue je trouve il n’y a pas trop de ligne directrice elle surf encore sur la période niffle et on sent qu’elle a du mal à y mettre et faire ce qu’elle veut. le retour des numéros de 100 pages est une bonne idée en tout cas.

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    • Répondu par Zot ! le 5 août 2018 à  17:53 :

      Le journal Spirou publie à juste titre Zombillenium, à défaut de the Walking dead. Les diverses versions de personnage y cohabitent (Spirou de Bravo, celui de Vehlmann et Yoan, sans compter le retour de Munuera avec Zorglub. Quelques pages de Cauvin, quelques unes de Trondheim et ses copains, et voila ! Un grand attrape-tout qui ne convainc personne, mais que quelques dizaines de milliers de collectionneurs zombis (ou décérébrés) continuent à acheter par habitude. Pour ma part, je préfère acheter les deux albums intéressants que Dupuis va publier par an, cela prend moins de place et c’est plus vite lu !

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