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Florent Maudoux ("Freaks’ Squeele") : « Dans "Rouge", nous sommes quasiment dans du journal intime »

Par Thomas Berthelon le 25 mars 2013                      Lien  
Entretien croisé avec Florent Maudoux, créateur de la série "Freaks' Squeele" chez Ankama, et Sourya, le dessinateur du spin-off "Rouge".

Sourya, c’est votre premier album. D’où venez-vous, et comment vous êtes-vous retrouvé aux commandes du spin-off de Freaks’ Squeele : Rouge ?

Sourya : J’ai 26 ans, j’ai étudié l’animation à la base. Après mes études, Florent Maudoux m’a contacté pour dessiner le spin-off, c’était nouveau pour moi, je n’avais jamais créé de bande dessinée avant, mais j’ai sauté sur l’occasion car j’ai toujours voulu dessiner des BD.

Florent Maudoux ("Freaks' Squeele") : « Dans "Rouge", nous sommes quasiment dans du journal intime »
Couverture de "Rouge"
©Maudoux/Ankama Editions

C’est Jonn d’Ankama qui vous a présentés...

Florent Maudoux : Oui, le même Jonn que dans Maliki, le grand barbu norvégien...

Avait-il un catalogue de dessinateurs ou Sourya est-il le seul qu’il vous ait présenté ?

FM : Il avait un catalogue assez épais de dessinateurs, et le style de Sourya a très vite "popé" au milieu de tous ces jeunes talents, et cela m’a vite donné envie de travailler avec lui. Mais je connaissais aussi Sourya à travers les forums, d’ailleurs Jonn lui aussi croyait que Sourya était une fille.

C’est vrai que quand on regarde seulement le graphisme, vous avez quand même un dessin très féminin. En êtes-vous conscient ?

S : Oui et non, pas vraiment en fait. C’est maintenant que je m’en rends seulement compte, quand tout le monde m’en parle.

Au départ, Florent souhaitait écrire un spin-off de Freaks’ Squeele consacré à Valkyrie. Êtes-vous conscient qu’à cause de vous, les lecteurs sont passés à côté d’une saga bien bourrine avec une guerrière à gros seins ?

S : J’aime bien Valkyrie, mais je préfère vraiment Xiong Mao, je suis très content d’avoir travaillé sur ce personnage finalement.

Florent, vous avez aussi décliné Freaks’ Squeele dans la série DoggyBags, à travers la mère de Xiong Mao. Arriverez-vous un jour à créer des bandes dessinées en dehors de l’univers Freaks’ Squeele ?

FM : C’est difficile à dire car j’ai vraiment imaginé l’univers de Freaks’ Squeele comme le plus large possible pour ne jamais m’ennuyer. Je m’ennuie assez vite de choses routinières, du coup j’aime bien tout rattacher. Mais pourquoi pas un jour, oui... Cela pourrait d’ailleurs arriver plus vite qu’on ne le pense. Peut-être que dans les prochains mois, à l’occasion d’un rapide petit projet, je travaillerai sur autre chose que du Freaks’.

Extrait de "Rouge"
©Sourya/Ankama Editions

Sourya, Florent a l’habitude d’ultra-érotiser Xiong Mao, vous choisissez plutôt la chronique écolière, avec une héroïne pas encore affirmée. Quelle liberté vous a-t-il donnée par rapport au corps de son héroïne ?

S : Il m’a laissé assez libre en fait, j’ai eu beaucoup de chance, il ne m’a donné aucune contrainte, à part que Xiong Mao devait avoir les cheveux courts. J’ai proposé plusieurs versions, nous avons beaucoup discuté, mais je ne me suis pas senti cloîtré dans la Xiong Mao de Freaks’ Squeele. Ce fut une bonne expérience.

FM : Je trouve cette version de Xiong Mao très intéressante, c’est chouette de la voir vivre sous les traits d’un autre dessinateur, avec une sensibilité et une tranquillité qu’il n’y a pas dans Freaks’ Squeele. Dans la série principale, cela va à 100 à l’heure, alors que dans Rouge, nous avons posé une ambiance différente, Xiong Mao y est une fille beaucoup plus fragile que la jeune femme dans Freaks’ Squeele. J’en suis très content, et je pense que je n’aurais pas réussi à faire mieux.

Extrait de "Rouge"
©Sourya/Ankama Editions
Sourya à Angoulême
Photo © Thomas Berthelon

Sourya, du point de vue technique, comment avez-vous abordé les combats particuliers à base du fameux Flamendo, discipline mêlant la danse aux arts martiaux ?

S : Florent m’a donné beaucoup de conseils pour le Flamendo, nous avons regardé beaucoup de vidéos sur la danse indienne, sur le flamenco, sur la danse du ventre, c’était agréable !

FM : Ce que Sourya ne dit pas, c’est que nous nous battons tous les jours à l’atelier pour rentrer dans la peau de nos personnages. Là, vous ne nous voyez pas, mais nous sommes couverts de bleus et d’ecchymoses.

S : Mais ce n’était pas du tout naturel, j’avais beaucoup de mal au début car je n’étais pas habitué à dessiner des poses de danse ou de combat, mais c’est venu naturellement. Je suis tombé sur une vidéo d’une danseuse du ventre qui m’a beaucoup inspiré, surtout pour les mouvements des mains.

On retrouve une histoire de danse du ventre dans le dernier tome de DoggyBags, dessiné par Florent. Vous travailliez là-dessus au même moment ?

FM : Pour Masiko au Mexique, il ne s’agit pas vraiment de danse du ventre, je me suis surtout inspiré du "pole dance", mais aussi des danses sur toiles tendues, des trucs assez dingues, pas forcément liés à l’industrie de l’érotisme, mais parfois liés au cirque. Mais à partir du moment où vous regardez quelques chose de beau, tout peut servir d’inspiration et être recyclé dans des bandes dessinées. Mais pour revenir à la chronologie, je crois que j’avais déjà terminé le tome 3 de DoggyBags lorsque Sourya est arrivé à l’atelier.

Extrait de "DoggyBags T3"
©Maudoux/Ankama Editions

Quelle est la suite ? Vous partez sur une déclinaison comme chez les Pokémons ? Après l’album "Rouge", bientôt les versions jaunes, bleues ?

S : Non. (rires)

FM : L’idée est de proposer une série, donc pourquoi pas avec des couleurs différentes, oui. J’aimerais terminer par "Gold", parce que j’aimerais bien devenir Gold dans le jeu Starcraft, mais pour l’instant je suis coincé en Silver !

Pourquoi ce titre, Rouge ?

FM : Parce que c’est la couleur du sang, et aussi des triades chinoises. Certaines triades sont désignées par le mot "Hung", qui peut être "Rouge" ou "Héros". Comme les Freaks’ Squeele parlent aussi d’écoles de héros, cela prend aussi du sens. Le kanji qui représente "Héros" et "Rouge", pour ces triades-là, est le même.

Couverture de "Mutafukaz T3"
©RUN/Maudoux/Ankama Editions

Sourya, si vous deviez choisir de travailler sur un autre personnage de Freaks’ Squeele pour un spin-off, lequel choisiriez-vous ?

S : Mon personnage préféré est vraiment Xiong Mao, il y en a d’autres que j’aime beaucoup mais je ne me verrais pas dessiner un spin-off sur eux, leurs histoires ne colleraient pas à mon univers. Je me suis beaucoup investi dans ce tome, et ce personnage tient une place spéciale dans mon cœur.

FM : Cela tombait sous le sens quand j’ai vu le dessin de Sourya, je me suis dit que cela conviendrait pour la jeunesse de Xiong Mao.

S : Valkyrie aurait moins collé à mon style de dessin.

FM : C’est pour cela que je n’ai pas insisté à l’époque, car Sourya ne se serait pas senti bien dans cet univers beaucoup plus coloré, moins intimiste, plus dans une explosion de références. Alors que dans Rouge, nous sommes vraiment dans la vie des personnages, quasiment dans du journal intime.

Une quotidienneté du récit que l’on retrouve dans les mangas par exemple...

FM : Oui, c’est cela, nous avons des références mangas en commun avec Sourya, comme Juliette je t’aime, ou les œuvres de Mitsuru Adachi. L’écriture d’une bande dessinée, quand on travaille avec un autre dessinateur, se fait à deux. Il faut voir si l’autre est réceptif à ce que tu peux lui écrire.

Florent, vous êtes intervenu sur le tome 3 de Mutafukaz, quel a été votre degré d’intervention sur l’album ?

FM : Pas grand chose en fait, il s’agissait des finitions, des couleurs manquaient sur une page, RUN voulait un style "peinture" pour certaines cases, un peu comme ces épisodes dans les mangas qui se terminent sur un instant figé, très chargé au niveau peinture. Ce procédé fonctionnait bien avec mon style. Et à deux jours du bouclage, il n’avait pas fini la couverture, donc j’ai fini les nuages du fond avec les personnages, qui avaient déjà été dessinés à part.

Propos recueillis par Thomas Berthelon

(par Thomas Berthelon)

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