On peut s’interroger sur la pertinence d’un tel recueil : une sélection de gags, le plus souvent en une planche, autour des badineries entre Gaston et Mademoiselle Jeanne, la plus célèbre secrétaire de la BD.
Outre une présentation hors contexte, ces histoires courtes se parent de tout un arsenal éditorial : des textes en tête de chapitre qui n’ont pas vraiment d’utilité, d’autant que l’ordre chronologique utilisé n’appelle pas d’explication particulière, et des citations en haut de page sur l’amour, à intervalle régulier. Citations d’ailleurs qui semblent tirées pour la plupart d’une collection de Sébastien Bailly, Le Meilleur de l’amour, humour toujours.
Certes, il est intéressant de constater les progrès graphiques de Franquin, depuis l’apparition du personnage de Jeanne en novembre 1962 (pl. 224), jusqu’aux éblouissants dessins de la dernière période.
« Elle était assez ingrate, au départ. Qu’elle ne soit pas belle était un gag ! Depuis lors, je me suis aperçu que je la rendais plus agréable à voir, je ne dis pas pour autant que c’est une grande beauté. Gaston sait qu’elle est amoureuse de lui, mais ce qui l’a séduit d’abord c’est sa queue de cheval » dit Franquin à Numa Sadoul. [1]
L’album montre bien le changement de point de vue de l’auteur : au début, la secrétaire apparait franchement ingrate, grassouillette, assez stupide, sans attrait. Progressivement, elle s’affine, se féminise, porte des vêtements valorisants, jusqu’à devenir carrément sexy en diable.
Tout de même, l’essentiel de la série s’appuyant sur Gaston, ses éternels ratés et une de vie de bureau totalement fantasmée autant qu’inadaptée, cette focalisation sur une relation sentimentale secondaire ne semble pas particulièrement pertinente.
La relation entre les deux tourtereaux n’aura jamais été pour son créateur qu’une dérive accidentelle de l’intrigue. Gaston Lagaffe n’a pas de vraie socialisation, et reste un personnage enfoncé dans son pull vert et ses idées toujours décalées. Tellement paré contre l’échec qu’avec les filles, il ne semble connaître que le jeu, , si l’on excepte le seul moment où ils couchent (assez sauvagement) ensemble. Mais le dessin est en noir et blanc, comme dans une Idée noire, et ce n’est pas dans Spirou, mais dans Circus
Voir en ligne : le site dédié de l’éditeur
(par David TAUGIS)
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[1] Et Franquin créa Lagaffe, DistriBD, 1986. Rééd. Dargaud, 1997.
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