Il faut dire qu’avec son père, les relations n’étaient pas exactement au beau fixe. Surtout, sa jeunesse lui rappelle des souvenirs contrastés. Son meilleur copain, Georgy était un garçon sympa mais un peu relou… Et, on ne sait pas pourquoi, le père d’Abel a fait une fixette sur lui, au point de le préférer à son propre fils, qu’il ne rate jamais une occasion de rabaisser. Bref, les sentiments d’Abel par rapport à son son paternel comme à meilleur copain sont un peu… disons… mitigés. D’autant qu’il y a une fille entre eux : Sarah. Ils forment un trio indissociable. Evidemment, les deux garçons sont amoureux de la fille… On ne vous en dit pas plus.
Le récit multiplie les allers-retours entre la France et le Liban, entre le présent et le passé. Arrive-le moment où ce casse-bonbons de Georgy débarque à Paris. Il est fraîchement accueilli par Abel mais, avec un culot consommé, il s’installe chez lui, excipant de son ancienne amitié mais surtout de sa relation actuelle avec son père dont il s’occupe. Il insiste pour qu’Abel revienne au pays pour le revoir... Ce dont Abel ne veut pas entendre parler. Georgy s’appuie alors sur la fille de son copain, qui elle a bien envie de venir au Liban, pour essayer de le convertir.
Et comme on ne résiste jamais bien longtemps à sa progéniture, on va le découvrir ce Liban qui est un merveilleux pays mais où les coupures d’électricité sont régulières, où l’on n’est jamais à l’abri d’échauffourées entre factions ennemies au détour de la rue, sans compter la menace d’un état voisin qui n’a pas laissé que des bons souvenirs.
Les Fusibles est un très joli livre, très touchant, qui peut parler même à beaucoup d’entre nous, car les « fusibles », ce sont ces parents qui ont quitté leur milieu ou le pays de leur naissance pour refaire une nouvelle vie et qui ne veulent surtout pas que leurs enfants fassent de retour sur leur ancienne condition…
Un thème subtil et finalement très universel qui mérite ici le détour, d’autant que le trait simple et élégant de Cyril Doisneau, mais aussi les irruptions colorées d’Isabelle Merlet, nous racontent tout cela avec beaucoup de douceur.
(par Didier Pasamonik (L’Agence BD))
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Les Fusibles – Par Joseph Safieddine et Cyril Doisneau – Couleus d’Isabelle Merlet – Ed. Dupuis