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Glace - Chuck Austen, Jae Lee - Marvel France

Par Anh Hoà Truong le 26 mai 2004                      Lien  
Captain America n'a-t-il été et n'est-il qu'un pion du gouvernement américain parmi tant d'autres? Une question cinglante posée à travers une histoire aux consonances grinçantes qui provoque l'érosion d'un mythe du comics US.

Icône de propagande d’une Amérique engouffrée dans la deuxième guerre mondiale, Captain America incarne depuis sa création en mars 1941 (Captain America comics # 1) le symbole en cases et en bulles d’un patriotisme à outrance et de l’héroïsme manichéen à la sauce outre-Atlantique.

Le "il était une fois" de ce personnage se dessine sous les traits du jeune Steve Rogers, garçon si chétif et malingre que l’armée américaine refuse alors sa candidature. Mais devant l’obstination et l’enthousiasme du jeune homme, les hautes instances de l’armée le convient à participer en tant que cobaye à l’opération "Renaissance" visant à créer grâce à un sérum expérimental, un super soldat. Ainsi naît Captain America, affublé de sa moulante combinaison et de son bouclier aux couleurs du drapeau américain. Suite à un petit intermède glaciaire de plus de 20 ans, il sera retrouvé par les Vengeurs (Avengers #4, 1964) dont il deviendra vite le leader.

Mais les révélations que vient distiller ce nouvel album semblent bouleverser cette version idyllique de la légende. En effet Cap (pour les intimes) n’aurait été qu’un jouet aux mains du gouvernement et ce depuis sa "création" elle aussi totalement orchestrée par ailleurs. Pire, notre soldat aurait été mis hors circuit avant la fin de la guerre non pas par les nazis mais par le Pentagone lui-même. L’état major aurait ainsi ordonné l’hibernation du malheureux pantin qui, par ses idéaux pacifistes et son refus formel de tuer (un comble pour un soldat !), devenait une épine au pied de l’armée américaine. Débarrassée de cette entrave, elle put en tout liberté recourir à la force de frappe nucléaire sur Nagasaki et Hiroshima...

Chuck Austen (L’appel du devoir, Elektra), à travers ce lynchage du mythe auquel il prend un malin plaisir, nous propose une critique cinglante à l’égard du gouvernement US, de ses machinations, et des horreurs qu’il dissimule sous des apparats de noblesse et de justice. Un pied de nez arrogant donc au patriotisme puritain décadent de ce début de siècle, suintant de tous les médias américains.
Ce ton noir obscur est symbiotiquement mis en images par Jae Lee qui s’est illustré dans les planches les plus glauques du comics Marvel mainstream. On l’a découvert au travers d’un Namor de John Byrne plus sombre que jamais dans les années 90 et depuis, il a teinté de la noirceur de son trait les pages de Sentry et Fantastic Four.

Le mariage (en noir) des deux artistes nous procure ici une lecture adulte emplie de paranoïa, loin, bien loin des clichés chatoyants et édulcorés intrinsèques au personnage de Captain America.

TRUONG Anh Hoà

« La tête dans les images »

Radio Campus Bordeaux

(par Anh Hoà Truong)

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