Green Lantern : Emerald Twilight - Par Ron Marz & Darryl Banks - Urban Comics

Parfois, même les plus grandes icônes échouent. Et la chute-même de ces héros se doit évidemment d’être à la hauteur de leur légende. Ainsi au cœur des années 1990, Superman était tué sous les coups bestiaux de Doomsday, la colonne vertébrale du Chevalier noir était brisée par le genou de Bane, tandis que Wonder Woman était déchue de son titre et que Green Arrow périssait dans une explosion.

Au milieu de tous ces évènements, Hal Jordan alias Green Lantern, allait lui aussi connaître sa Catabase qui, ne le mènera pas non pas aux enfers mais aux confins du cosmos et dans les tréfonds de son âme. Contrairement aux héros précités, ce n’est pas la défaite que va connaître Green Lantern, mais une déchéance qui l’amènera à devenir un paria aux yeux de ses amis.

Hal Jordan erre dans une Coast City fantôme, une illusion créée par son anneau de pouvoir.

Dessin : Bill Willingham

Hal Jordan ivre de pouvoir et saisi de folie...

Dessin : Darryl Banks

Après La Mort de Superman et Batman : Knightfall, Urban Comics nous propose de découvrir la chute de Hal Jordan et l’ascension de Kyle Rayner dans l’album : Green Lantern : Crépuscule, second tome de la collection DC Confidential qui propose de « mettre en lumière les étapes décisives dans la vie des plus grands super-héros tout en révélant l’autre Histoire de DC, celle qui s’est déroulée en marge des grandes sagas connues de tous ». À ce titre, on retrouve, accompagnant ces histoires, quelques pages explicatives qui permettent de comprendre le contexte des épisodes que vous allez lire et les personnages qui vous sont présentés.

Ne l’appelez plus Green Lantern...

Dessin : Darryl Banks

Sans trop en révéler, lors des évènements de « La Mort de Superman », la ville de Coast City - où réside Hal Jordan - est entièrement rasée par Mongul et le Cyborg Superman. Au début de notre récit « Emerald Twilight », Green Lantern désormais orphelin de sa famille et ses amis, sombre dans une dépression et décide d’utiliser le pouvoir ultime de la batterie centrale du Green Lantern Corps pour ramener d’entre les morts sa ville bien-aimée et ses proches.

Dans sa quête, Hal Jordan va devoir affronter ses collègues Green Lantern dont certains sont des amis proches. Poussé dans ses derniers retranchements, le Chevalier d’Émeraude va alors réaliser l’impensable.

Histoire d’une rédemption

Il est difficile dès lors de considérer Hal Jordan comme un véritable héros, sa réputation étant plus qu’entachée par la folle quête qui l’a mené à détruire le Green Lantern Corps. C’est alors que Ganthet, le dernier des Gardiens de l’Univers - les ex-patrons des Green Lanterns - décide de confier le dernier anneau vert en sa possession à Kyle Rainer, un jeune dessinateur amené à devenir le Green Lantern d’une nouvelle génération. Le reste de l’album est ainsi consacré aux premiers pas du jeune héros et à sa confrontation inévitable avec son prédécesseur ayant désormais totalement basculé dans la folie.

Un nouveau Green Lantern arrive en ville....

Dessin : Darryl Banks

Un nouvel uniforme pour un nouveau départ !

Dessin : Darryl Banks

Alors que la mort de Superman et la chute de Batman suivies par leurs remplacements par des héros plus violents - bienvenue dans les années 1990 - était temporaire et servait surtout à montrer la résilience et l’importance de nos héros classiques, la déchéance de Green Lantern - comme celle de Green Arrow - avait un caractère plus définitif visant à totalement redéfinir complètement le héros et son univers, considérés comme trop "datés". Kyle Rayner tranche ainsi dès le début avec ses prédécesseurs en imposant un uniforme de Green Lantern de sa conception. Il est d’ailleurs désormais le seul porteur de l’anneau puisque le Green Lantern Corps a été détruit par Hal Jordan.

Ces récits des années 1990 écrits par Ron Marz et dessinés par Darryl Banks, Bill Willingham, Fred Haynes Steve Carr, Jamal Igle, Derec Aucoin et Craig Hamilton souffrent bien évidemment de certains écueils que l’on retrouvait dans les pages des comics à l’époque. Mais il a plutôt bien résisté aux temps et la chute de Hal Jordan, le plus grand Green Lantern de tous les temps, aujourd’hui revenu en grâce, ne laisse pas indifférent.

What’s in the fridge ?

Dessin : Steve Carr, Derec Aucoin & Darryl Banks

Hal Jordan face à son plus grand échec.

Dessin : Darryl Banks

Mais cet album est historique à un autre titre, puisqu’il contient une scène importante qui aura inspiré la création du concept et du site Women in Refrigerators (WIR) sous l’impulsion de la scénariste Gail Simone. Ce site s’interroge notamment sur le destin des personnages féminins dans le monde des comics et la récurrence des sévices qu’elles subissent : viol, mutilation, mort, soumission, désordres mentaux, invisibilisation etc... Des malheurs qui servent bien souvent à ensuite valoriser ou faire évoluer le personnage masculin.

Est-ce un oiseau ? Est-ce un avion ? Non c’est Superman !

Dessin : Darryl Banks

Une réflexion qui s’est ensuite étendue au cinéma, à la littérature et aux séries TV où les personnages féminins ne sont pas non plus épargnés. Si vous entendez ainsi parler du trope un peu trop redondant de la « woman in refrigerators » ou de la « Girl in the fridge », sachez que c’est ici que tout a démarré puisque, dans ces pages, on retrouve, effectivement et littéralement, une femme dans un frigidaire. Nous vous invitons donc à consulter le site en question (cliquez par ici), le détail des personnages féminins de comics et des malheurs qu’elles ont subi, ainsi que les réactions a posteriori de nombreux scénaristes de l’industrie. Un démarche qui nous amène à nous interroger sur la manière dont son conçues les histoires que nous lisons et les stéréotypes qu’elles véhiculent.

Green Lantern : Crépuscule est donc un album important. En plus d’avoir amené le concept de la Women in Refrigerators dans le langage et dans les consciences, c’est avant tout une véritable page de l’histoire de DC Comics qui a lancé les bases de nombreux récits des années suivantes : Zero Hour, Final Night..., ainsi que celles du fabuleux run de Geoff Johns qui, quelques années plus tard, entreprit la rédemption de Hal Jordan ainsi qu’une reconstruction totale de la mythologie des Green Lanterns.

Belle initiative d’Urban Comics, la collection DC Confidential de Urban Comics remplit donc toutes ses promesses avec une sélection d’histoires pertinentes et un travail éditorial qui donne aux lecteurs toutes les clés nécessaires de compréhension. Remarquable.

Que tous ceux qui, devant le mal se prosternent, craignent la lumière des Green Lantern !

Dessin : Darryl Banks