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Griffo : « La qualité de l’histoire prime sur le nom du scénariste »

Par Nicolas Anspach le 9 décembre 2006                      Lien  
Après avoir mis "Giacomo C" entre parenthèse, son dessinateur s’est associé avec le jeune scénariste Sébastien Latour. Avec "Ellis", ce duo nous offre un récit d’"Urban Fantasy" alliant onirisme et action.

Cet album publié dans la toute nouvelle collection Portail du Lombard a pour cadre New-York, où des tempêtes oniriques basculent le quotidien de certains de ses habitants dans l’irréalité. Deep O’Neil, jeune recrue de l’agence Ellis, tente de réguler ces manifestations psychiques, ou tout le moins d’œuvrer pour que ces faits survenus lors de ces événements trouvent une certaine cohérence…

Vous qui avez travaillé avec les plus grand, de Van Hamme à Dufaux, pourquoi vous mettre en danger en dessinant le scénario d’un scénariste inconnu ?

Dans l’industrie cinématographique, on dit que la qualité du dernier film d’un réalisateur témoigne de son savoir-faire et de son talent. Ce n’est pas parce qu’un scénariste est connu qu’il écrit systématiquement des bonnes histoires. La qualité du scénario prime par rapport au nom de celui qui le signe ! Et puis, j’aime conserver une certaine fraîcheur et être surpris … Cela a été le cas avec Sébastien Latour. Je ne me laisse pas impressionner par le nom, mais plutôt par le talent de l’auteur. Son histoire est dans l’air du temps.
Griffo : « La qualité de l'histoire prime sur le nom du scénariste »

Vous souhaitiez pourtant arrêter la plupart de vos collaborations pour vous consacrer à vos propres scénarios…

J’en ai toujours envie ! Mais on m’a présenté un scénario d’une qualité exemplaire. Pouvais-je refuser ? Non ! J’ai tendance à dessiner les histoires des autres plutôt qu’à me concentrer sur mes propres récits. Je suis un faible finalement (Rires). La première partie de mon projet personnel est déjà écrite et a été lue par plusieurs éditeurs. Certains d’entres-eux sont fort intéressés de le publier. Cela me donne donc du courage pour écrire la seconde partie de ce dyptique… Ceci dit, le temps n’est pas important. Je sais qu’un jour je dessinerai ce récit !

Vous avez illustré de nombreux scénarios de science-fiction (Beatifica Blues, Samba Bugatti). La Fantasy est-elle un genre qui vous correspond également ?

Oui. Et puis Ellis traite également des rêves. Cela m’a toujours passionné. D’ailleurs, mon projet personnel touche à ce sujet…

Il y a quelques années, on pouvait lire des critiques qui considéraient que votre dessin changeait de style graphique en fonction du registre de vos séries. On parlait même de plagiat.

En effet. Cela m’embêtait terriblement à l’époque. J’ai été comparé par certains journalistes à une trentaine d’auteurs différents. Et je n’en connaissais même pas la moitié ! Bien sûr, mon travail comporte une part de réminiscences, de choses que j’ai intégrées naturellement en lisant ou en regardant des albums. C’est naturel pour un dessinateur d’observer le graphisme de ses confrères… Mais je n’ai pas de style fixe . J’adapte mon graphisme selon les histoires, de manière intuitive. Je peux partir d’une même structure de visage pour donner un résultat comique ou réaliste. L’ambiance du récit va donner le tempo.
Lors de l’une de mes premières interviews à une télévision francophone, j’ai dit en parlant de mes influences : « je pique partout ». Certains ont compris que je copiais tout le monde. En fait, je m’étais mal exprimé. Je suis néerlandophone et ne possède pas toutes les subtilités de la langue française. Je voulais dire que mes influences sont diverses : de la peinture – j’ai étudié à l’Académie des Beaux-Arts d’Anvers – au cinéma, en passant par la littérature.

Quelles techniques utilisez-vous pour cet album ?

Je travaille de manière traditionnelle, en couleur directe. Certaines planches sont retravaillées avec l’outil informatique pour y ajouter des effets spéciaux. C’est une approche que je n’avais jamais utilisé. Je me suis fait aider par un jeune dessinateur canarien, rencontré lors d’un festival à Ténérife. Cette technique me plaît car j’ai un certain contrôle sur le dessin jusqu’au dernier moment.
J’apprends peu à peu à dessiner sur ordinateur. J’aimerais avoir suffisamment d’expérience pour illustrer un récit par ce biais. Mon style sera alors sans doute fort différent de ce que j’ai pu faire jusqu’à présent.

Avec Ellis, vous êtes parti pour un nombre conséquent d’albums ?

Pas du tout ! Le premier cycle comptera quatre tomes. En commençant ce projet, nous souhaitions n’en faire que trois, mais le récit était tellement dense qu’il a été judicieux d’en rajouter un.

Quels sont vos projets ?

Bernard Yslaire va réaliser une série parallèle à Sambre. Il y explorera « La Guerre des Yeux » à travers les siècles. Quelques histoires seront dessinées par des auteurs différents. J’ai accepté d’illustrer celle qui se déroulera au 18e siècle, l’une de mes périodes de prédilection. Sans le savoir, il a donné au personnage principal un nom qui ressemble étrangement au mien : Werner Von Goetz alors que je m’appelle Werner Goelen … Une coïncidence troublante !

Pouvez-vous lever le voile sur votre projet personnel ?

Un homme qui se réincarne dans une période passée, au moment où les Espagnols envahirent les îles Canaries. Celles-ci avaient une matière première qui les intéressait particulièrement : le bois. Ils en ont fait des ports d’attache pour pouvoir voguer plus facilement vers les mers du sud !
Depuis que j’y habite, je me suis passionné pour l’histoire de ces îles. Lorsque les Espagnols sont arrivés aux Canaries, ils y ont rencontré un peuple quasiment primitif. Malgré leur manque de moyens, ces autochtones se sont battus comme des diables ! Malheureusement, les différents royaumes canariens n’étaient pas unifiés, et ils ont perdu la bataille…

(par Nicolas Anspach)

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Images extraites de Ellis T1 (c) Griffo, Latour & Lombard.

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