Israël, il faut en convenir, n’est pas un pays comme les autres. Il suffit de se rendre à Jérusalem dans le Saint-Sépulcre pour s’en rendre compte : chaque marche, chaque dalle, chaque objet appartient de façon codifiée à une officine religieuse et, dans chaque recoin, se trouve tapi un représentant de ces congrégations prêt à bondir si le visiteur contrevient à la coutume. On imagine la tension qui anime ces lieux…
De la même façon, Jérusalem ou Tel Aviv figurent parmi les villes les plus sûres au monde car chaque quartier, chaque bloc, est surveillé par un personnel de sécurité, souvent en civil, un revolver toujours à portée de main. Il m’est arrivé de voir passer sur les toits de Jérusalem à quatre heures du matin une troupe silencieuse de soldats en arme. Étrange rencontre…
Israël est une démocratie en guerre, et la guerre est davantage compatible avec la passion qu’avec a raison.
On ne peut mettre en doute –même s’il a parfois la dent dure- l’implacable sincérité du témoignage de Guy Delisle. Rien d’antisémite là-dedans : il n’y a pas d’incitation à la haine et le discours reste dans la compréhension du fait. Rien d’anti-israélien non plus, même si le point de vue est celui d’un habitant de Jérusalem Est et s’il démontre parfaitement les absurdités d’une politique faite de comportements contradictoires calcifiés dans le temps en raison des circonstances dramatiques qui composent son histoire.
Comment en effet concilier un Palestinien dont la famille a été tuée dans un bombardement avec un Israélien recevant des missiles sur sa maison et soucieux de préserver un état où il peut vivre en paix ? Certainement pas par un mur, et pourtant. Comment, de même, ne pas comprendre le ressentiment d’un Arabe israélien victime dans son quotidien de vexations sécuritaires qui l’empêchent de vivre normalement, comme vous et moi, et dont les quartiers se trouvent grignotés par des colons ouvertement hostiles ?
J’ai toujours été frappé que ce bout de terre ingrat, grand comme la Hollande, où il n’y a rien, aucune matière première, aucune autre ressource que des habitants (7 millions d’Israéliens, 5 millions de Palestiniens), soit un tel enjeu qui occupe quasi quotidiennement l’actualité. Il est bon d’appréhender Israël sur 336 pages, dans toute sa complexité, plutôt que de s’en faire une opinion sur un reportage de deux minutes au 20 heures.
« Paix aux hommes de bonne volonté » disent les Évangiles. On a vu dans l’histoire des murs s’écrouler, des peuples se réconcilier. Les Chroniques de Jérusalem sont dans le constat (nous sommes, au moment du récit, à l’époque de l’opération « Plomb durci » sur Gaza), et la volonté de paix est encore loin.
(par Didier Pasamonik (L’Agence BD))
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