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Harry Dickson de Jean Ray revient en bande dessinée

Par Didier Pasamonik (L’Agence BD) le 27 mai 2023                      Lien  
L’écrivain belge Jean Ray (1887-1964), d’expression francophone et néerlandophone, est l’un des grands écrivains fantastiques de son époque. On lui doit notamment les romans « Malpertuis » ou « La Cité de l’indicible peur », des contes fantastiques (« Les Contes du whisky », « Les Contes noirs du golf »…) mais surtout un feuilleton policier fantastique aux couvertures bariolées : Harry Dickson sur lequel il intervient entre 1929 et 1938. Plusieurs fois adapté en bandes dessinées, les aventures du « Sherlock Homes américain » (le slogan n’est pas de Jean Ray) ressurgissent sous des plumes franco-italiennes. Et ce n’est pas trop mal réussi.

L’écrivain Jean Ray (Raymond Jean Marie De Kremer) est un mythe en soi. Né à Gand, dans la Belgique flamande, il est l’héritier d’une tradition d’écriture fantastique issue d’Edgar Allan Poe, de Charles Dickens, d’Arthur Conan Doyle, de Gaston Leroux, ou William Hope Hodgson.

Il fait aussi partie de cette tradition d’écrivains qui ont porté les lettres belges au firmament de l’histoire du roman policier (Georges Simenon, Stanislas-André Steeman,…) ou du fantastique (Franz Hellens, Michel de Ghelderode, Thomas Owen…)

Mais ce qui fait la puissance d’un Jean Ray, c’est sa force de travail. Les spécialistes lui attribuent une bibliographie de quelque 9 300 contes et nouvelles et 5 000 reportages, chroniques, critiques et textes divers écrits sous des dizaines de pseudonymes. Condamné pour fraude en 1926 à six années de prison dont il n’en purge que trois, il a tendance à dissimuler ces réalités de sa biographie qu’il situe quelquefois au bout du monde, à la faveur de voyages qui l’auraient amené à faire du trafic d’alcool aux USA pendant la prohibition. Une légende largement mise en doute par les historiens et savamment entretenue par son ami Henri Vernes, l’auteur de Bob Morane, qui pratiquait de même avec sa propre histoire personnelle.

Or ce Jean Ray, dans ses multiples travaux de petit main dans l’édition belge, avait été amené à traduire à partir du néerlandais un feuilleton allemand, Harry Dickson, à l’origine une sorte d’édition pirate de Sherlock Holmes, dont la qualité était si médiocre qu’il préféra réécrire le feuilleton, pour ensuite carrément proposer plus d’une centaine d’histoires inédites d’après l’illustration de la couverture.

Ce faisant, il bâtit un univers mythique qui influencera profondément son époque notamment le créateur de Bob Morane, Henri Vernes qui se considérait comme son disciple ou encore Alfredo Castelli, le créateur de Martin Mystère.

Harry Dickson de Jean Ray revient en bande dessinée

La série a été adaptée par deux fois en bande dessinée : une première par Christian Vanderhaeghe et Pascal Zanon chez Dargaud (1986-2003), dans un canon jacobsien tiré des feuilletons de Jean Ray ; l’autre avec des récits inédits de Richard D. Nolane dessinés par Olivier Roman chez Soleil Productions (1992-2008) dans un registre classique plus réaliste..

L’adaptation qu’en ont fait de Doug Headline et de Luana Vergari est proche de l’intention originale : nous avons affaire à une sorte de Sherlock Holmes capable de dénouer les mystères les plus improbables et celui-ci l’est : une histoire de disparition de cadavre dans un chambre close avec une enquête qui s’inscrit parfaitement dans le schéma holmésien.

Cela donne un curieux mélange : voici un personnage tiré d’un plagiat du détective anglais de Conan Doyle par un éditeur allemand, novellisé par un grand écrivain fantastique flamand, adapté en bande dessinée par un Français parisien et une Italienne vivant à Lille, et dessiné par un dessinateur italien, Onofrio Catacchio, dans un espèce de « ligne claire » façon Sergio Bonnelli, puis mis en couleurs par le Japonais Hiroyuki Ooshima (connu jadis pour avoir donné une version manga à Spirou, il vit aujourd’hui à Reims !), le tout publié à Marcinelle en Belgique ! Une curiosité, assurément.

(par Didier Pasamonik (L’Agence BD))

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Code EAN : 9791034769001

Harry Dickson : Mystéras d’après Jean Ray – Par Doug Headline, Luana Vergari (scénario) et Onofrio Catacchio (Dessins) – Couleurs : Hiroyuki Ooshima – Editions Dupuis

Harry Dickson Dupuis ✍ Doug Headline ✏️ Onofrio Catacchio 🎨 Hiroyuki Ooshima tout public Polar
 
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