Scène de chasse en forêt : deux êtres chétifs et nus courent dans un bois. Les poursuivants, armés, les capturent. Ils connaissent la valeur de ces prises. L’humain est très rare et convoité dans notre Paris....animal.
Reconstituant une capitale du début du XXème siècle, les auteurs jouent donc la carte du règne animal, à la manière de Prado dans Demain les dauphins, ou encore Demain les oiseaux de Tezuka. Comme quoi la BD cogite cette éventualité depuis quelques années.
A la différence de ces illustres prédécesseurs, Bourhis choisit pas un récit historique chronologique, mais place ses personnages dans une situation de tension (Feuille, petite humaine courageuse et maligne, fait l’objet de toutes les convoitises) et de transition. Avec cette fille de professeur (en l’occurrence des cochons) qui veut croire en l’homme et en la cohabitation, on entrevoit un espoir.
N’oubliant pas le panache et la romance (le personnage du journaliste amoureux), le scénariste parvient à garder l’équilibre entre efficacité narrative et réflexion, les animaux/dominants échangeant des points de vue pas si éloignés des primates omnipotents de la Planète des singes.
Ce parti-pris fonctionne d’autant mieux grâce au trait élégant et fin de Spiessert, qui décale son style (notamment celui d’Ingmar).
A la fois grave et ludique, Hélas pourra en outre s’adresser à des publics variés, à commencer par les ados, qui découvriront ce qui fait le charme du titre, comme les autres, ces humains plus matures qu’on appelle des lecteurs confirmés...
(par David TAUGIS)
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