Il y a des moments où l’on a envie d’un peu de sang, de rythme et de fureur, et l’on prend un bon Largo Winch. Parfois, on veut rire, et l’on s’accorde quelques heures avec un Titeuf ou un Astérix. Et puis, par moments, on a envie de respirer, on aspire à prendre du recul sur les coups de théâtre, à ne pas lire des dialogues interminables comme dans un Blake et Mortimer, à souffler. Pour ces moments-là, nous vous recommandons Jon McNaught.
Ce jeune auteur, né en 1985 dans le sud de l’Angleterre, travaille aujourd’hui à l’Université de Bristol, où il enseigne la lithographie offset et l’impression en relief à des étudiants en arts plastiques. En 2013, il obtint le prix Révélation du Festival d’Angoulême pour Automne. Cet album, tout comme Dimanche, avaient été édités par Nobrow. Dargaud réédite ce mois-ci ces deux beaux ouvrages, et publie en même temps une troisième bande dessinée inédite : Histoires de Pebble Island.
Ce recueil contient trois histoires courtes, la plus brève étant constituée d’une double planche. Ces trois tranches de vie s’inspirent de l’enfance de l’auteur sur Pebble, une des îles composant les Malouines.
Dans chacune, s’opposent d’un côté le calme et la sérénité qui se dégage de la nature sauvage environnante, et de l’autre les objets artificiels, les jeux d’un enfant, une machine à laver abandonnée, une télévision en marche. Sans jamais être démonstratif, l’auteur suggère avec une légèreté et une finesse qui font penser à Richard McGuire ou à Chris Ware, deux auteurs qui ont su décrire sans pathos la mélancolie et la douceur amère de notre quotidien.
L’intrigue est inexistante, et cela suppose un découpage parfaitement maîtrisé pour intéresser le lecteur, ce qui est ici le cas. Ses lignes ondulent en douceur, ses aplats de couleur nous apprivoisent, son utilisation du silence entre les cases est admirable et démontre bien tout le potentiel que l’on peut tirer de la narration séquentielle.
Cette expérience purement contemplative et globalement muette (à l’exception significative des dialogues creux de la télévision) ne plaira certainement pas à tous les lecteurs, mais ceux qui sont prêts à passer plusieurs minutes à admirer les trouvailles graphiques de l’auteur et à s’imbiber de ses ambiances fortes en sortiront apaisés !
(par Tristan MARTINE)
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