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Hostile Holster : Ankama s’adonne au crime

Par Thomas Berthelon le 10 janvier 2012                      Lien  
Lancé à grand renfort de second degré en septembre dernier, ce nouveau label propose quelques séries sombres et violentes, flirtant dans tous les styles.
Hostile Holster : Ankama s'adonne au crime
La très belle couverture de "Blue Estate T1"
©Kalvachev/Ankama Editions

Hostile Holster se veut le label consacré à la "Culture du Crime". Si on en croit l’éditeur Ankama, cette nouvelle collection va cracher du polar cynique, noir, et même gore.

Mais si nous regardons de plus près cette veine hardboiled de l’éditeur des “mangalikes” Dofus, nous constatons un univers beaucoup plus hétérogène, et surtout beaucoup plus fin que ce que la communication volontairement ultra-référencée d’Ankama nous laisse le croire.

Outre un hommage aux Pulps américains truffé de références graphiques, on y croise en effet une biographie d’un journaliste assassiné dans l’Italie des années 1970, ou encore une boucherie sauvage à l’arme blanche.

À ces albums s’ajoutent deux séries parues il y a quelques temps sous le même label, passées relativement inaperçues : We are the Night (scénario d’Ozanam, dessin de Kieran, couleurs d’Epicq) et Silences (scénario d’Anthony Combrexelle, dessin et couleur de Matthias Haddad). Un label donc moins rentre-dedans qu’annoncé, mais quand même teinté à l’encre noire.

Pas moins de quatre dessinateurs (Toby Cypress, Robert Valley, Nathan Fox et le créateur Viktor Kalvachev, ces deux derniers déjà à l’œuvre sur le tome 4 de la série DMZ) se partagent le travail sur le tome 1 de Blue Estate, une série se situant dans l’univers nocturne du crime flirtant avec Hollywood.

Détectives privés, femmes fatales, boîtes de strip-treases, coffres remplis de cadavres et whisky coulant à flots peuplent cet univers tout sauf original, mais dont la foule de personnages de losers, criminels endurcis, et stars de cinéma louches (le personnage de Bruce Maddox semble par exemple directement inspiré de Steven Seagal, ce qui ajoute un plaisir de lecture aux fans de navets) promet de juteuses suites à ce lancement un peu confus.

La star du cinéma Bruce Maddox en plein tournage ("Blue Estate")
©Kalvachev/Ankama Editions
La couverture de "Mafia Tabloïds"
©Bonaccorso/Ankama Editions

Dans un registre radicalement différent, l’album Mafia Tabloïds, qui est un One Shot inspiré de faits réels, nous plonge dans l’Italie de la fin des années 70, où le jeune Peppino Impastato, pourtant issu d’une famille du milieu, devient l’un des grands activistes anti-mafia par le biais d’une émission radio très engagée. Sa mort fut reconnue comme un assassinat seulement en 2002, orchestrée par le parrain local Gaetano Badalamenti.

Cet album, ponctué de témoignages dont celui du propre frère de la victime, bénéficie d’un scénario de Marco Rizzo offrant la part belle à la relation entre Peppino et sa famille, et d’un dessin de Lelio Bonaccorso dans un très beau lavis en noir et blanc, mettant en scène des personnages rugueux et nerveux cernés par un trait très anguleux. Sans conteste la perle de cette collection pour l’instant.

La couverture de "Gyakushu T1"
©Hipp/Ankama Editions

Enfin, la saga Gyakushu ! de Dan Hipp s’ouvre sur un tome 1 aux allers et retours narratifs parfois agaçants, mais au graphisme absolument redoutable, alternant crayonnés granuleux et aplats radicaux à l’encre.

Nous suivons en effet les aventures du plus grand des voleurs, mutilé et défiguré après avoir perdu sa femme et son fils, arpentant le chemin sans retour d’une vengeance sans pitié contre une horde de cannibales sanguinaires.

Au menu de cette odyssée barbare en hommage aux films de sabre asiatiques : des duels à l’arme blanche, des paysages enneigés maculés de sang, et des guerriers chevelus ne survivant que pour défourailler à tout va.

En attente de prochaines parutions concoctées par les duos Cha / El Diablo, et Nikko / Bernard, la collection Hostile Holster propose donc des albums venus d’horizons divers (du Pulp américain, du fait réel italien, de l’aventure à l’épée) reliés par une teinte noire et des univers peuplés de "criminels" de tous bords.

Le calme avant la bataille ("Gyakushu ! T1")
©Hipp/Ankama Editions

En attendant sa nouvelle collection "Pulp Heroes" lancée à la fin du mois (où l’on croisera tout de même Batman, Doc Savage, et même le Spirit), et après s’être positionné sur le manga (le label Kuri), le graphisme urbain (le label 619), les albums jeunesse (Etincelle), l’aventure (les BD Kraken) ou une veine plus auteurisante (la collection Araignée), Ankama investit bel et bien dans le sombre.

Cette collection salue le renforcement de l’équipe éditoriale de l’éditeur roubaisien. Aux manettes de la direction éditoriale qui, il est vrai, tirait un peu à hue et à dia, un professionnel chevronné : Olivier Jalabert. Spécialiste de la BD américaine, il avait été un des fondateurs la célèbre librairie parisienne Album Comics avant de rejoindre Soleil pour qui il a bâti un joint-venture avec les États-Unis et fait entrer Stephen King dans le catalogue. Il a rejoint Ankama pour structurer une offre éditoriale un peu à la remorque de leur main business, le jeu vidéo.

Récemment, c’est à Martin Zeller, venu de chez Dupuis, qui a rejoint l’équipe. Là encore, nous avons affaire à un vrai professionnel qui s’était notamment distingué dans la mise en place des fameuses intégrales de l’éditeur de Marcinelle, tout en découvrant de nouveaux talents. Chez Ankama, il pourra s’y employer pleinement.

(par Thomas Berthelon)

Cet article reste la propriété de son auteur et ne peut être reproduit sans son autorisation.

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8 Messages :
  • Jolie maquette de collection, je trouve.

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  • Ankama a inventé la BD "hamburger" : zéro sens, narration clinquante, dessin sans émotion ni recherche, histoires débiles.

    Merci !

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    • Répondu le 10 janvier 2012 à  14:36 :

      bah ils font tous ça, delcourt, soleil, dargaud...c’est du quick ou du burger king !

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    • Répondu par narvaal le 10 janvier 2012 à  15:00 :

      Ah, je suis à peu prêt certaine que ça existait déjà avant...
      Mais sur quoi se base votre déclaration ? Sur les 2 pages que l’on voit dans l’article ?
      C’est pas un peu juste pour se faire une opinion ?
      Pourriez-vous nous faire une critique plus élaborée des ouvrages "hamburgers" dont il est question ? Merci d’avance.

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    • Répondu le 10 janvier 2012 à  15:30 :

      Ah bon ? c’est eux qui ont inventé ça ? Je croyais que ça existait avant...

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    • Répondu le 10 janvier 2012 à  15:40 :

      Si tous les éditeurs avaient l’exigence d’Ankama, la bd serait sauvée.

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    • Répondu par Mikepirate le 10 janvier 2012 à  17:25 :

      T’as lu comme comme BD de chez Ankama ? Je trouve pas que ça soit zero sens, moi...

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    • Répondu par DIANTRE le 9 mars 2012 à  14:14 :

      Le "truc" Gyakushu : Pour ne pas faire de décors, faites des gros plans et des grooOOooosses bules. Planche torchée en 5 mn. OK pour les grosses bulles, on a compris pourquoi, mais alors ... POURQUOI écrire si petit, dedans ?!?

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