C’est vrai que l’on n’est pas rendus : avec le gros blond à la mèche peroxydée qui dirige l’Amérique, entre coups de gueule et saillies éructées sur les réseaux sociaux, on se demande à juste titre comment cet excité va-t-il nous éviter une guerre mondiale. Sauf que cette lecture est d’une autre époque, celle où on lisait l’histoire du monde à travers les bandes dessinées. Pas besoin d’éviter un conflit mondial : nous sommes en plein dedans, et il est économique.
Qu’utilise le président américain pour communiquer et même gagner des élections ? Des réseaux sociaux contrôlés par quelques fortunes américaines. Qui dirige effectivement les USA et par la même le monde ? Les Companies, celles-là même, avec quelquefois tous les habillages vertueux du monde, qui formatent nos modes de pensée par leurs algorithmes et leurs méthodes de régulation : Google, Facebook, Twitter, Wikipedia…
Stephen Desberg décrypte l’actualité internationale en poussant l’analyse jusqu’au bout de sa course : celle du déclin inéluctable des Occidentaux et des blancs dans le monde, lesquels qui, dans les faits, le dominent économiquement jusqu’ici. Avec cette conséquence : si le « grand remplacement » doit peupler la planète de Chinois, d’Indiens, d’Africains et de Latinos, il revient à cette minorité dominante de faire savoir que c’est elle et elle seule qui dispose du vrai pouvoir, au sacrifice de la démocratie. Le problème, c’est que cette fiction a un sacré parfum d’actualité...
Bernard Vrancken rend parfaitement les enjeux de cet enfer froid du pouvoir où l’amour n’est qu’instrument de domination et où le justicier, aussi beau et bien foutu que peut l’être son héros Larry B. Max, se retrouve désespérément seul. Le trait clinique du dessinateur, glacé parfois, comporte quelques fulgurances et un vibrato qui mérite qu’on s’y attarde. Une pause bienvenue et qui mériterait d’être exploitée par le scénariste tant le découpage de Desberg est effilé et rapide.
Même une tragédie comme celle de l’homme blanc qui voit disparaître son monde mérite ces moments de réflexion et de silence.
(par Didier Pasamonik - L’Agence BD)
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