1940. La guerre secoue le monde. L’ascension sociale de Joseph Joanovici le ferrailleur pourrait en être contrariée. Si ce n’est que les armées, pour fabriquer leur matériel de mort, se révèlent grandes consommatrices de métaux. Et que des métaux de toutes sortes, Joseph en a des tonnes à revendre. Très cher. Car les nazis, au moins en affaires, sont des gens très fréquentables. Même si pendant ce temps l’ombre des rafles commence à s’étendre sur la femme, les filles et les employés de Joseph l’émigré roumain...
Il y a des livres qui opèrent une alchimie magique sur le lecteur : Il était une fois en France est sans conteste de ceux-là !
Lors de la parution du premier tome, nous nous demandions ce que voulait prouver Fabien Nury. La lecture du second des six épisodes prévus permet de s’en faire une meilleure idée : après les innombrables flashes-backs maintenant la pression du premier opus, le scénariste laisse les moments fort de Joanovici se dérouler devant nos yeux. Selon les pages, on le plaint face aux discriminations nazies, puis on loue presque son intelligence et sa force de caractère permettant de tromper l’ennemi tout augmentant son profit personnel, mais on le maudit aussi face à son aveuglement et son égoïsme !
Comme Spielberg avant lui, Nury ne pose pas vraiment de jugement sur le personnage historique, cela ne l’intéresse pas, mais il met en avant la perversité des Allemands, et l’intelligence de ceux qui ont su profiter du système, sans réellement pouvoir étouffer leurs remords. C’est dans ce flou de sentiments qu’on avance dans le récit. À chaque page, on pense qu’on a tout vu, que cela ne peut avoir existé, qu’il a trop de chances, ou pas assez de remords, mais la page suivante rajoute une couche à l’oignon, un élément à cette personnalité si complexe, et à la fois si humaine : bouleversant.
N’oublions pas Sylvain Vallée dans la réussite de cette série : ses planches nettes, sans fioriture, traduisent fort bien la sordide réalité contée. Les personnages abordent des visages typés, entre caricatures et portraits d’époque. Un ensemble qui sert la densité du récit : on ne s’arrête pas pour comprendre qui est tel personnage, car nous l’avons directement intégré. Les divers cadrages mettent alternativement en avant les sentiments forts, et les décors opulents de cette collaboration. Un très bel exemple de découpage et de cadrage est donné sur le site d’Il était une fois en France
Après avoir lue l’histoire de Monsieur Joanivici, vous ne regardez plus la collaboration, ni la bande dessinée historique comme avant ! Les critiques ne s’y sont pas trompés car l’album fait partie du tour final de leur prix 2008.
(par Charles-Louis Detournay)
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le deuxième tome d’Il était une fois en France : le vol noir des corbeaux
Lire notre article lançant la série, et l’interview de Fabien Nury : « Pour moi, la période nazie représente le mal absolu »
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Retrouver les dix premières pages, ainsi que les deux bandes annonces de la série, sur le site de notre partenaire France 5
Les illustrations sont © Vallée/Nury/Glénat.
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