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Il faut sauver le soldat Leblon-Delienne !

Par Didier Pasamonik (L’Agence BD) le 28 décembre 2014                      Lien  
Le 23 décembre 2014, les 16 employés de l'entreprise Leblon-Delienne ont reçu un drôle de cadeau de Noël : le Tribunal de commerce de Dieppe a décidé de la mise en liquidation de leur société et prononcé leur licenciement, alors même qu'une offre de reprise -la seule, apparemment, par la société parisienne Artoyz- avait été exprimée auprès des instances judiciaires
Il faut sauver le soldat Leblon-Delienne !
Le secret d’Artoyz : interpréter des licences internationales de façon un peu décalée.
(c) Walt Disney Productions - Artoyz/Leblon-Delienne

Certes, le marché de la figurine ne va pas très bien ces derniers temps. Leblon-Delienne n’est pas la seule société de ce type à connaître ce genre de situation : la célèbre société Pixi et sa filiale Plastoy avaient connu en 2013 les affres de la liquidation avant d’être reprises par son fondateur Philippe-Antoine Guénard avec le soutien capitalistique de Médiatoon, la filiale de diffusion des droits dérivés de Média-Participations qui détient les licences de Dargaud, Dupuis et Le Lombard.

La raison majeure ? Une activité par trop centrée sur le marché franco-belge, sur-sollicité sur les mêmes licences depuis vingt ans.

La société Lebon-Delienne avait été créée en 1983 par la sculptrice Marie Leblon avec son compagnon Éric Delienne. Cette ancienne professeure de danse et chorégraphe avait le coup d’œil pour donner aux personnages le sens du mouvement avec une fidélité que les ayants-droits, en gardiens du temple, vérifiaient de façon vétilleuse. La société a employé jusqu’à une trentaine d’employés et ses pièces les plus célèbres font de jolis scores dans les salles de vente les plus huppées et se retrouvent exposées dans des musées, comme à Angoulême ou au MOOF à Bruxelles. Jusqu’à ce que le marché se retourne et que la société Moulinsart désire reprendre la licence Tintin en main.

La société Leblon-Delienne avait été reprise voici sept ans par Laurent Buob, à l’époque très enthousiaste : " On fait tous la course à la profitabilité mais ce n’est pas l’essentiel. Quand on est passionnés, on fait des choses qui sont bien, qui sont réussies, elles finissent par payer" affirmait-il.

Las, ces créations passionnées qui s’avéraient fidèles aux univers originaux de peur de décevoir les fans portaient précisément en elles la cause de leur malheur : peu créatives, elles n’avaient pu s’adapter au cours changeant de la mode et du design, ni à une nécessaire internationalisation, le public franco-belge des amateurs de bande dessinée ne se renouvelant pas assez vite pour permettre à cette activité de subsister de façon rentable.

La société Artoyz à Paris l’avait bien compris qui, depuis 2003, développait une activité de création de figurines artistiques à tirage très limité avec des artistes d’art contemporain ou de mangas comme Junko Mizuno. Elle avait même une partie de son activité en commun avec Leblon-Delienne ces dernières années sur des licences Mickey, Schtroumpf ou Bugs Bunny.

L’avantage de leur approche qui consiste à aborder la licence de façon un peu décalée et, on le voit dans le choix, à ne réserver leur production qu’à des licences mondialement exploitables semblait plus profitable. Cette société, qui a fait jusqu’à 1.3 millions de CA en 2013, en réalise, après une restructuration, seulement 500 000 € en 2014, son activité reposant sur trois personnes. Mais elle a des projets ambitieux en perspective dont elle voudrait faire profiter la structure neufchateloise.

Artoyz s’est positionnée pour reprendre la société. Mais hélas, le Tribunal a décliné l’offre et a pris la décision de liquider purement et simplement ses actifs et de mettre ses employés, leur savoir-faire et leur talent, au chômage.

Leblon-Delienne arrivera-t-il à trouver la potion magique qui lui permettra d’être irréductible ?
(c) Goscinny, Uderzo, Albert-René et Leblon-Delienne.

La société Artoyz espère, par une intervention auprès du Procureur de la République, faire revenir le Tribunal sur cette décision. Dans un communiqué publié le 27 décembre 2014 sur leur blog, son PDG, M. Michaël Rouah, écrit : "Il y a maintenant trois mois la société Leblon Delienne a été placée en liquidation judiciaire et depuis lors nous nous débattons pour sauver ce savoir-faire unique en Europe, qualifié jusqu’alors Entreprise du Patrimoine Vivant. Et quand nous parlons de savoir-faire, nous parlons évidemment des personnes qui composent cette société et qui sont à la source de ce savoir-faire."

Dans un autre communiqué envoyé à la presse, il précise : " ...Leblon Delienne doit sa notoriété essentiellement aux sculptures en résine des héros de la bande dessinée franco-belge même si ces dernières années, avec l’essoufflement de ce marché et la fin de la collaboration avec Moulinsart, la société a tenté de se diversifier dans différents domaines avec certains succès mais aussi certains échecs. La société édite notamment les gammes de Playmobil en 30 cm, les Mickey Welcome en 30 et 140 cm et plus récemment les gammes Leblon Delienne x Artoyz en vinyle autour des licences Disney, DC Comics, Looney Tunes et Schtroumpfs.

Mais comme nous en faisions mention plus haut, même si vous percevez Leblon Delienne au travers de certains produits, Leblon Delienne, c’est avant tout un savoir-faire unique en Europe avec un des derniers ateliers de production de figurines en résine de France basé en Normandie à Neufchâtel en Bray et 14 personnes donc 14 familles qui sont sur le point d’être grandement fragilisées.

Aujourd’hui Artoyz se bat pour reprendre cette activité et la faire perdurer avec un projet simple et ambitieux visant à produire des créations d’artistes au sein de l’atelier de Neufchâtel mais également d’exploiter des licences à caractère international, voire même à croiser les licences avec le travail des artistes. Notre projet a pour objectif de préserver l’intégralité de l’emploi, voire même de créer une quinzaine d’emplois à fin 2017.

Artoyz est la seule société à s’être positionnée pour la reprise de l’activité, proposant une somme comprise entre 50 000€ et 200 000€ pour reprendre l’ensemble des actifs et préserver l’intégralité des emplois. Malgré cela et pour des raisons nébuleuses qui en tout cas nous échappent, le Tribunal de Commerce de Dieppe a rejeté notre offre, préférant la liquidation pure et simple de la société au 31 décembre 2014 et donc le licenciement de l’ensemble des salariés.

Face à l’incompréhension devant une telle décision, nous avons décidé de nous battre et de faire pression sur le Tribunal afin que celui-ci révise son jugement. Et nous mettrons tout en œuvre pour empêcher la disparition de ce savoir-faire. Pour ce faire nous avons reçu le soutien de Marie Leblon, fondatrice de la société, mais également le soutien de M. Lefrançois, Maire de la Commune de Neufchâtel, de M. Cauvet, Commissaire au Redressement Productif de la Région Haute-Normandie, de la Région Haute-Normandie, de Seine Maritime Expansion. Mais le plus important est que nous avons le soutien de l’ensemble des salariés qui veulent voir ce projet aboutir et ainsi empêcher une fois de plus la destruction d’emploi et la perte d’un savoir-faire français !

Afin de donner corps à notre combat nous avons décidé de manifester lundi 29 décembre 2014 à partir de 14:30 depuis les locaux de l’entreprise jusqu’à la Mairie de Neufchâtel en Bray. La manifestation regroupera les salariés des entreprises Leblon Delienne et Artoyz, mais également M. le Maire de Neufchâtel ainsi que les Maires des communes avoisinantes ainsi que toutes les personnes qui souhaiteront nous aider à faire raisonner notre combat auprès de l’opinion publique !"

Espérons que le Tribunal de Commerce de Dieppe prenne de bonnes résolutions pour l’année nouvelle !

(par Didier Pasamonik (L’Agence BD))

Cet article reste la propriété de son auteur et ne peut être reproduit sans son autorisation.

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Code EAN :

Une pétition a été mise en place pour soutenir cette action. Amis de Leblon-Delienne, à vos claviers :

http://www.avaaz.org/fr/petition/Le_Tribunal_de_Commerce_de_Dieppe_Sauver_la_societe_Leblon_Delienne/?taQypib

En médaillon : Le Petit Nicolas par Leblon-Delienne. (c) Goscinny, Sempé et Imav éditions.

 
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