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Japan Expo 2019 : Gô Nagai, père de Goldorak et du mecha, mais pas que !

Par Florian Rubis le 5 juillet 2019                      Lien  
Japan Expo Paris 20e édition joue la carte des anniversaires en roulant des mécaniques. On y fête le mecha, sous-genre majeur de la science-fiction japonaise, avec Gô Nagai, un peu plus de quarante ans après l'apparition de "Goldorak" en France. Où son robot géant-soucoupe volante fit décoller la popularité de la japanimation et du manga. Quarante ans, c'est aussi l'âge de "Gundam", licence de référence de l'autre versant du mecha, le "real robot". Son cofondateur et son volet récent sont mis à l'honneur.

Depuis la première diffusion en 1978 sur Récré A2 de Goldorak (UFO Robot Grendizer), le succès remporté par ce robot géant de combat a popularisé de façon déterminante l’animation japonaise (anime) et le manga à travers elle en France. Le phénomène toucha ainsi plusieurs autres contrées francophones et pays occidentaux, du Québec en passant par l’Italie.

Selon la légende, alors à la tête de l’unité jeunesse d’Antenne 2, une Jacqueline Joubert peu convaincue se serait d’abord assurée de son impact possibleauprès du jeune public en demandant l’avis de son fils Antoine de Caunes, vite emballé par sa nouveauté à l’époque.

Comme l’on sait, l’engouement à l’égard du robot cornu devait vite virer au tsunami. En contrepartie, il attisa avec fracas le fossé de l’incompréhension entre les chères têtes blondes et les plus vieilles générations, horrifiées par de telles « japoniaiseries » [sic !]...

Japan Expo 2019 : Gô Nagai, père de Goldorak et du mecha, mais pas que !
Goldorak, Actarus et Alcor. Au moyen de commandes vocales folkloriques (Astérohache !, Cornofulgure !) le prince d’Euphor réfugié sur Terre, tel Kal-El depuis Krypton, repousse avec sa machine invincible les forces hostiles. Les ficelles prenantes du récit de robot géant furent ainsi plusieurs fois répétées sans trop lasser...
© GO NAGAI/DYNAMIC PLANNING

Pourtant, son créateur Gô Nagai reste paradoxalement peu connu sous nos latitudes, voire carrément éclipsé par l’aura de sa créature, à l’inverse de ce qui se passe au Japon pour cet auteur complet, à l’œuvre en vérité très diversifiée.

Né en 1945, après avoir fait ses premières armes en tant qu’assistant de Shôtarô Ishinomori (Cyborg 009, Kamen Rider), Gô Nagai (Kiyoshi Nagai alias) devient lui-même très vite un grand nom du manga à partir de la fin des années 1960.

Durant la décennie suivante, il a déjà posé les bases de la faveur dont il jouit dans son pays, produisant jusqu’à nos jours des centaines de titres, dont de nombreux adaptés en anime, parfois avant même parution. Il se dégage toutefois graduellement de conditions de travail éreintantes pour publier de façon plus rare, mais toujours attendue.

Gô Nagai
Photo by Hisashi Maruyama (Earnest)

En dépit de son succès à l’exportation, Goldorak ne constitue en réalité qu’un des dérivés forgés d’après Mazinger, un personnage antérieur de robot géant (ou super robot) que le Japon prise bien plus. Celui-ci demeure au centre d’un univers développé au travers de plusieurs médias (mediamix), toujours en expansion (voir le film d’animation récent à son sujet).

Au contraire de ce qu’il est souvent avancé à propos de la figure du robot dans le manga, il y est présent de manière significative dès avant la Seconde Guerre mondiale. Ceci advient donc avant l’avènement d’Astro (Tetsuwan Atomu, 1952) dû à Osamu Tezuka, réincarnation positive du traumatisme nucléaire subi par l’Archipel en 1945 qui peuple les cauchemars de Gô Nagai, enfant de la Bombe.

Après cette « refondation » décisive, un palier est franchi avec le Tetsujin 28 (1956) de Mitsuteru Yokoyama, un grand androïde justicier téléguidé par un jeune garçon. Les deux héros en métal vont être transposés en séries animées la même année (1963). Le noir et blanc de l’époque n’empêche pas leur plébiscite par les jeunes téléspectateurs nippons.

Mazinger le Grand ! Mazinger, archétype du robot géant, célébré comme tel au Japon et par les vrais fans, et son pilote, transformé en second rôle dans "Goldorak", au grand dam du public nippon !
© GO NAGAI/DYNAMIC PLANNING

Puis survient un nouveau jalon essentiel avec Mazinger Z (1972), robot géant dirigé de l’intérieur, depuis un véhicule se logeant dans sa tête en l’occurrence, actionné par Alcor (Kôji Kabuto). C’est en fait le moule d’où fut tiré Actarus (Daisuke Umon/Duke Fleed), tout comme Goldorak ne constitue qu’un des dérivés de Mazinger, relevant de sa trilogie initiale. Les Japonais furent d’ailleurs dépités de voir le pilote de ce dernier relégué au rang de second rôle du prince d’Euphor dans Goldorak (1975), voire ensuite de sidekick parmi d’autres.

Le titre originel dans sa version anglaise, UFO Robot Grendizer, rappelle que Gô Nagai et son studio et entreprise familiale (Dynamic) sont à ce moment sous pression. Elle vient de leurs partenaires sur la série, Toei Animation et Bandai, firme de jouets qui tient encore plus que l’auteur à vendre des produits dérivés.

Ceux-ci le contraignent à changer de contexte par rapport à Mazinger et surfer sur la vogue des soucoupes volantes des années 1970, UFO étant une reprise de l’acronyme anglo-saxon équivalant à OVNI en français. D’autant que cette tendance se trouve bientôt renforcée par un intérêt sans précédent provoqué au Japon et dans le monde entier par la sortie du premier épisode de Star Wars.

Getter Robot. La série "Getter Robot" sera republiée en français en septembre par Isan Manga dans le cadre de son nouveau label « Isan Limited »
© 2016 Gô Nagai-Ken Ishikawa/Dynamic Planning Inc. All Rights Reserved.
FRENCH EDITION © 2019 Go Nagai-Ken Ishikawa/Dynamic Planning Inc. All Rights Reserved. Published by ISAN MANGA under license.

Plus que Mazinger pour le seul Japon, Grendizer devait s’ériger en Occident en standard du mecha, sous-genre de la science-fiction consacré aux robots et armures robotisées de forme humanoïde. Devenu l’un de ses principaux spécialistes, Gô Nagai lui donne différentes autres variantes, comme dans Getter Robot (1974, avec Ken Ishikawa). En 2014, pour les quarante ans du manga Goldorak sort Grendizer Giga, son reboot.

Alors certes, Gô Nagai a eu tendance à trop répéter les recettes de ce filon ayant beaucoup contribué à sa fortune. Mais loin d’être à l’origine d’une unique saga à rallonge(s), il est reconnu dans son pays comme un auteur complet et prolifique, s’étant illustré dans des genres très divers.

Dès ses débuts et y compris durant sa décennie triomphante des années 1970, en tant que créateur incontournable de super-robots, il ne renonce jamais à s’aventurer dans d’autres registres. Il expérimente, défie la censure éditoriale ou prend des risques opposés aux impératifs commerciaux.

Devilman
© GO NAGAI/DYNAMIC PLANNING

Outre le mecha, il a mêlé en effet entre eux d’autres genres. Il s’essaye ainsi au ecchi érotisant, quitte à recourir à la parodie, voire au moins subtil, sans crainte de déconcerter éventuellement son public. Naîtront de la sorte La Famille Abashiri, L’École impudique, Cutey Honey ou Kekkô Kamen.

Il détonne dans le post-apocalyptique Violence Jack ou l’horrifique Devilman. Quand, au lieu de s’en inspirer, il n’adapte pas directement en manga La Divine Comédie de Dante et sa traversée colorée de L’Enfer, avec pour référence graphique Gustave Doré, etc.

Violence Jack. "Violence Jack" et son monde alternatif post-apocalyptique devaient beaucoup inspirer dix ans plus tard les auteurs de "Ken le survivant"...
© GO NAGAI/DYNAMIC PLANNING

Il faut dire que de longues complications autour des droits d’édition de ses créations dans le domaine francophone n’ont pas aidé à mieux les y diffuser. En revanche, deux livres sont venus réduire — voici peu — le manque d’informations en français qui a durablement prévalu au sujet de Goldorak et de son père.

Il s’agit de Gô Nagai, mangaka de légende de Jérôme Wicky (Fantask/Dargaud, 2017) et l’ouvrage universitaire mais accessible Goldorak, l’aventure continue de Sarah Hatchuel et Marie Pruvost-Delaspre (Sérial, PUFR, 2018).

Cutey Honey. Cette femme artificielle, au sens littéral car gynoïde, serait selon son démiurge la première protagoniste dans un shônen. Il a trouvé un bon prétexte pour lui faire perdre ses vêtements de façon récurrente afin de plaire à son jeune public masculin...
© GO NAGAI/DYNAMIC PLANNING

Japan Expo propose au surplus de se familiariser davantage avec l’autre branche importante du mecha, le real robot. Avec ses pilotes spatiaux harnachés dans de puissantes armures cybernétiques, elle a pris le relais des robots géants dans le cœur des fans après 1979.

En souvenir des quarante ans de la sortie de Mobile Suit Gundam, une projection spéciale est organisée. Elle concernera le récent Gundam Reconguista in G. Yoshiyuki Tomino y participe.

Précisons qu’il interviendra plusieurs fois. Ce vétéran de l’animation nippone a débuté sur Astro ! Il a cofondé et réalisé une ribambelle de productions d’une licence Gundam devenue emblématique, à côté de Macross (Robotech aux USA) ou Evangelion, leur « stade évolutif ultérieur » à la sauce otaku.

Gundam Reconguista in G. Le real robot et ses contextes d’affontements spaciaux plus réalistes. Projection en présence de Yoshiyuki Tomino ! Ici : jaquette coffret
© YOSHIYUKI TOMINO & SUNRISE

(par Florian Rubis)

Cet article reste la propriété de son auteur et ne peut être reproduit sans son autorisation.

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Code EAN :

En médaillon : Goldorak et Actarus/© GO NAGAI/DYNAMIC PLANNING

Sauf mention contraire, tous les visuels sont © GO NAGAI/DYNAMIC PLANNING

LE SITE DE JAPAN EXPO

Gô Nagai en conférence à Japan Expo le vendredi 5 juillet 2019 à 11h45 / Yuzu / Live Drawing Show

Dédicaces et plus de détails : SUR LA PAGE SUIVANTE

Plusieurs des séries de Gô Nagai ont été publiées en français par Dynamic Visions/Dybex, puis Black Box

"Gundam Reconguista in G" / Projection en compagnie de Yoshiyuki Tomino/Studio Sunrise / Vendredi 5 juillet à 10h / Mikan

Meet & Greet Yoshiyuki Tomino / Samedi 6 juillet à 12h30 / Materclass

Conférence de Yoshiyuki Tomino - 40 ans de Gundam / Samedi 6 juillet à 15h15 / Yuzu

Dédicaces / Dimanche 7 juillet à 15h15 / Sumiré 2

Voir aussi la notice sur Yoshiyuki Tomino

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