« J’ai quarante-et-un an, et pour autant que je m’en souvienne, j’ai toujours voulu faire de la musique ». Ainsi débute la dernière livraison de David Snug. Alors, projet professionnel en vue ? Pas du tout : il ne s’agit en aucun cas de devenir musicien professionnel. De toute façon, il n’a jamais pris de cours de musique et ne se sent pas l’âme d’un autodidacte. Non, David veut suivre cette passion en dilettante, histoire de préserver sa liberté. Son existence devient alors une sorte d’échec volontaire, préparé avec minutie.
Tout commence en Normandie dans les années 1990. Alors lycéen en internat à Caen, et en week-end au domicile parental de Bayeux, il tente de réunir les quelques zigues qui partagent un intérêt pour la musique. Mais encore faut-il avoir les mêmes goûts musicaux pour s’entendre un minimum : pas évident quand lui même ne jure que par Pavement et Sabadoh, quand les potentiels compagnons aiment Bob Marley, Motörhead ou... Francis Cabrel. Puis, des années fac à Rouen, entre alcool et fainéantise, à une vie parisienne pas beaucoup plus rangée avec son groupe (quand même !) Trostski nautique (mais sans tourneur, sans maison de disque, et sans camion), David Snug dépeint cette quête de marginalité. Mais pourquoi donc cette distance avec la musique, après tout ?
C’est là que David Snug exerce un œil particulièrement drôle et acerbe sur un milieu qui se veut contestataire, mais truffé de normes, de conventions, et de personnages insignifiants. De ceux qui dénoncent les SMAC (scènes de musiques actuelles) parce qu’elles seraient « des salles subventionnées par le gouvernement capitaliste » alors qu’ils sont profs ; le passage évoquant les concerts, vinyles et T.Shirt à « prix libre » est particulièrement bien senti. Pour les concerts , les principe est le suivant : il faut donner 5€ car « si tu donnes moins, t’es un radin, si tu donnes plus, t’es un bourgeois ».
David Snug ne s’épargne pas, et ponctue ses aventures de réflexions mi-philosophiques mi-gratuites sur l’école, les emplois-jeunes, le RSA, les pompes à subvention, sur une tonalité qui rappelle celle employée pour La vie est trop Kurt, davantage centré sur son arrivée à Paris.
(par Damien Boone)
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