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Jean-Michel Arroyo : « le Paquebot est le vrai héros de notre série »

Par Charles-Louis Detournay le 29 novembre 2009                      Lien  
Comme les Mémoires d’un 38 de Fromental & Franz, on suit la destinée épique d'un objet, véritable fil rouge d'une série mettant en valeur des personnages pourtant très humains. Son dessinateur nous en dévoile les arcanes ainsi que les planches et crayonnés de son autre album, Germinal, en avant-première !

Lorsqu’on regarde le cursus d’un dessinateur, on s’attend à retrouver une école de graphisme, mais ce n’est pas votre cas ?

Jean-Michel Arroyo : « le Paquebot est le vrai héros de notre série »J’ai un parcours plus classique, j’ai été passionné depuis toujours par le dessin, mais ma période sportive m’en a obligatoirement tenu éloigné. J’y suis donc revenu par la suite. J’ai commencé à apprécier la bande dessinée par les comics, et je suis arrivé bien plus tard dans le franco-belge, avec Tintin et Franquin comme références absolues. Respectivement, j’ai été attiré d’un côté par la lisibilité de la narration, puis de l’autre par le choc graphique ! J’avais alors envie de faire du « gros nez », mais de manière amateur, car je suis effectivement autodidacte.

On est fort éloigné des aventures réalistes que vous dessinez !

Tout d’abord, on fait avec les moyens que l’on possède ! (rires) Je me suis aussi rapidement rendu compte que je voulais m’orienter vers des aventures plus réalistes, tout en conservant une grande lisibilité de la mise-en-scène ! C’est arrivé en rencontrant mon futur scénariste, Jacques Hiron, dans un festival de bande dessinée. Je lui ai montré mes croquis « gros nez » , et lui s’est chargé de parfaire ma connaissance en m’ouvrant entre autres à Bilal, et surtout à Tardi. Cela a été une vraie révélation car avec peu de traits, ce dernier parvient à créer une ambiance d’une grande efficacité !

Cette amitié avec Jacques Hiron vous a donc poussé à travailler ensemble ?

Nous partageons beaucoup de références et de goûts communs en bande dessinée, en cinématographie, etc. Il m’a alors proposé de travailler sur la Foire aux Frisés, publié par après chez un petit éditeur parisien. Pour la mairie de Gap, il avait eu l’occasion de monter une exposition sur l’écrivain André Héléna, mais plutôt que d’adapter un de ses romans, il a préféré, avec l’accord de sa veuve, en faire un héros de bande dessinée plongé dans la Seconde Guerre mondiale. C’était mon premier vrai travail en bande dessinée. Faire ces quarante-six pages et les couleurs m’ont alors permis de me faire une bonne idée de ce que pouvait être le métier de dessinateur.

Ce premier album vous a permis de proposer une série à P & T Productions (Joker) ?

Jacques avait écrit un roman intitulé Le Paquebot des sables, et j’ai soumis quelques planches qui ont tout de suite enchanté Thierry Taburiaux, mon éditeur, que j’avais rencontré lors d’un repas. Tout cela, sans vraiment démarcher ! Thierry est vraiment attentif à nos désidératas, car il nous laisse la place d’évoluer. Bien sûr, la documentation que j’avais amassée pour la Foire aux Frisés m’a également été utile pour cette série, qui se déroule en partie aussi pendant la Seconde Guerre.

Quelle est l’accroche du Paquebot des sables ?

Basée sur des faits réels, c’est la carrière d’un des paquebots les plus anciens, utilisés maintenant comme casino à Port-Barcarès. Il s’agit d’une saga historique décomposée en plusieurs périodes. On suit les péripéties d’une famille dont un scientifique a caché un secret au sein d’un paquebot en construction. Certaines personnes n’auront alors de cesse de tenter de mettre la main sur ces notes. Nous pouvons donc placer des personnages réels, qui ont eu leur rôle à jouer dans des moments historiques importants, tout en y mêlant des protagonistes fictifs, qui sont crédibles dans l’ensemble du cadre réaliste. Ce mélange d’Histoire et de fiction est la grande force de mon scénariste, Jacques Hiron. Et puis, chaque tome diffère également dans sa construction : espionnage, intrigue en huis-clos, polar, etc. Il faut donc à chaque fois revoir son plan d’action pour continuer à surprendre le lecteur.

Encore une particularité de votre série : pas mal d’années séparent vos différents tomes …

Inconsciemment, Jean-Michel Arroyo s’est inspiré de son physique pour un de ses personnages, Pierre Baumont !

Les événements relatés sont distancés de plusieurs années, voire plus ! Il faut donc faire vieillir mes personnages, ce qui n’est pas vraiment simple, mais cette contrainte est un grand facteur de progression personnelle. Dans le tome 4 qui vient de sortir, on se retrouve donc en 1957. J’ai eu beaucoup de joie de retrouver mes personnages principaux, après l’aventure de Pierre Beaumont, tout en devant les retravailler un petit peu pour coller au temps qui passe : on les reconnaît toujours, mais ils ont quelques années de plus.

Lors de la première lecture, j’ai été assez décontenancé de la tournure du scénario, ce qui d’ailleurs m’a ensuite convaincu de l’attrait de la série !

Si on débute la série sans savoir de quoi il retourne, on peut effectivement être surpris de voir certains personnages disparaître brutalement, au profit de nouvelles têtes. Mais c’est parce qu’avant tout, c’est le paquebot qui est le vrai fil rouge du récit. Bien sûr, Jacques a dû adapter son roman pour insérer quelques ficelles dramatiques qui conviennent particulièrement à la bande dessinée, mais dans les grandes lignes, nous suivons asses fidèlement son récit. Nous allons avoir six albums pour les six périodes du roman.

La nouveauté de ce quatrième tome, c’est aussi la couleur directe.

C’était déjà le cas sur les couvertures précédentes, mais pour les précédents, albums, je fonctionnais encore avec des bleus. Comme je me sens maintenant plus en confiance dans cette phase-là, j’ai opté pour cette nouvelle technique, qui donne un meilleur rendu. Je travaille avec des encres acryliques, qui sèchent rapidement sans détremper le papier, ce qui me permet de repasser dessus le cas échéant. J’encrais déjà mes planches au pinceau, et ce style de coloration proche de la peinture me convient mieux que la coloration numérique dont je ne parviens pas ôter la froideur. Et puis, c’est plus charnel !


On parlait de votre autre série, Pierre Baumont, dont deux tomes sont déjà parus, mais qui s’est interrompue. Dommage pour ce projet prometteur. C’était votre volonté de vous orienter une fois de plus dans un aspect légèrement historique ?

Je n’aime pas trop les détails contemporains, car mon trait s’y adapte mal. Quand je dessine une voiture, c’est comme pour les femmes, je préfère lui mettre des jolies formes. D’ailleurs, mes personnages du beau sexe sont fort travaillés, tout en préférant la féminité à la vulgarité ! Mais, c’est un univers auquel je tiens beaucoup, et s’il ne tenait qu’à moi, je voudrais terminer la série, par peut-être un dernier album concluant l’intrigue, mais rien n’est encore décidé.

Quels sont vos autres projets ?

Je suis en train d’adapter Germinal pour la collection Adonis, avec Philippe Chanoinat au scénario. J’avais fait une première mouture en noir et blanc, mais je me suis finalement orienté vers la couleur directe. Cela sortira prochainement, et par après, bien entendu la suite du Paquebot des sables !

Voici d’ailleurs quelques crayonnés et planches de ce Germinal :






(par Charles-Louis Detournay)

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