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Jean-Philippe Bergeron (Parole de planches) : « On est allé chercher des œuvres qui étaient fortes théâtralement, des univers qui pouvaient sortir des cases. »

Par Marianne St-Jacques le 12 avril 2015                      Lien  
Après avoir fait carrière comme comédien, Jean-Philippe Bergeron a fait le saut en bande dessinée en co-scénarisant la {Saga-bulle}, en collaboration avec Damien Berger et Marie Lamonde-Simard (Éditions Ber-Ber 13-13). Avec Tony Curien, il signe la mise en scène de la pièce {Parole de planches}, présentée le 9 avril au Festival de la BD francophone de Québec et le 13 juin à Lyon BD.

Parlez-nous de la pièce Parole de planches, dans laquelle vous avez également tenu le rôle de comédien.

Parole de planches est née à la suite du Festival de la BD francophone de Québec 2014. On avait fait un petit lancement pour le troisième tome de la Saga-bulle, et on avait fait, justement, une mise en lecture de certains extraits de la BD, parce qu’on voulait mettre en valeur le scénario. Dans les festivals, ce sont surtout les dessinateurs sont mis en valeur. On comprend, car le dessin frappe l’œil et l’imaginaire. Le monde de la BD revendique la valeur littéraire de ses œuvres, mais les scénaristes sont souvent laissés dans l’ombre. Donc, ce qu’on voulait, c’était vraiment mettre en valeur les scénarios des BD. On est allé chercher huit extraits de bande dessinée, cinq québécoises, trois françaises. On est allé chercher l’équipe de Lyon, ce qui donne six comédiens : trois Québécois, trois Français. C’est ce qui a donné le spectacle qu’on a présenté au Théâtre Petit Champlain et qu’on va produire aussi à Lyon, le 13 juin, pour le festival Lyon BD.

Jean-Philippe Bergeron (Parole de planches) : « On est allé chercher des œuvres qui étaient fortes théâtralement, des univers qui pouvaient sortir des cases. »
Parole de planches : Jean-Philippe Bergeron, Anne-Élisabeth Bossé et Lise Castonguay
Photo : courtoisie de l’équipe de production de Parole de planches

Qu’est-ce qui vous a guidé dans votre choix d’œuvres à adapter ?

En fait, je suis vraiment allé chercher des œuvres qui étaient fortes théâtralement, dont le scénario était puissant en images. Hiver nucléaire, avec son ambiance post-apocalyptique. Les cousines vampires, film d’horreur de série B, une œuvre très incarnée, très organique. Et puis, Les Nombrils, évidemment, avec la force des personnages, la profondeur de ces chipies-là. Vicky et Jenny semblent complètement insipides et superficielles, mais au fil des tomes, on s’est aperçu de la richesse de ces personnages, de Karine, de Dan. On est donc allé chercher des histoires riches, des univers qui pouvaient sortir des cases.

La distribution est assez particulière. Comme vous l’avez mentionné, la moitié vient du Québec, l’autre de la France. Comment le casting s’est-il déroulé ? Comment avez-vous répété ?

Les répétitions, c’était quelque chose ! On fonctionnait par Skype. L’équipe québécoise a monté trois extraits, l’équipe française a monté trois extraits. Chacun de notre côté, les lundis, on faisait des feedback. Le metteur en scène de France, Tony Curien, était venu voir notre mise en lecture l’an passé, lors du lancement sur le traversier Québec-Lévis. Donc quand je suis allé à Lyon, en septembre, je lui ai parlé du projet. Il a décidé d’embarquer. À partir de ce moment, tous les lundis, on se parlait sur Skype. Il a formé son équipe. J’ai monté la mienne. J’ai contacté Lise Castonguay, qui a 30 ans de métier sur la scène théâtrale à Québec. Et Anne-Élisabeth Bossé, aussi, que tout le monde connaît pour Série noire (Radio-Canada). Je suis allé les chercher, car je voulais travailler avec elles. On montait nos choses chacun de notre côté. Il y a également deux extraits qu’on se gardait, Saga-bulle et Les Nombrils, pour la petite période de résidence qu’on avait quand l’équipe française est arrivée, le 6 avril. Ces extraits-là se sont montés dans la dernière semaine avant le spectacle !

Parole de planches : un extrait de Lincoln
Photo : courtoisie de l’équipe de production de Parole de planches

C’était du sport !

C’était du sport, mais c’était toute une expérience. Dès qu’ils sont arrivés, il y avait de la chimie. Déjà, je connaissais Tony, mais on ne connaissait pas le reste de l’équipe, les musiciens. Parce qu’on travaillait aussi avec des musiciens : Julien Limonne en France et Nicolas Jobin pour l’équipe québécoise. La chimie s’est opérée très rapidement. Ça a été très productif et très enrichissant.

Qu’est-ce qui vous a guidé vos choix de mise en scène et de mise en lecture ? Je pense notamment au numéro musical de Boule et Bill.

Mon idée, à moi, c’était vraiment de la pure mise en lecture. C’est pour cela que les extraits d’Hiver nucléaire, des Cousines vampires et de Paul à Québec, c’était vraiment de la pure mise en lecture, comme les codes de mise en lecture au Festival du Jamais Lu. De son côté, Tony a un peu plus éclaté la forme. Les mises en lecture sont moins connues en France. Il n’y a pas autant cette tradition de mise en lecture. Les comédiens ont donc davantage appris les textes. Ça s’est développé du côté de Tony. Il y avait une certaine latitude. Et au final, quand ils sont arrivés cette semaine, on a travaillé avec ce qu’ils avaient amené comme proposition, et ce qu’on avait amené du côté québécois. On a créé un fil pour qu’il y a ait cette fluidité entre les différentes propositions.

Parole de planches : un extrait des Dormants
Photo : courtoisie de l’équipe de production de Parole de planches

Comment avez-vous travaillé pour l’adaptation des textes ? Avez-vous beaucoup contacté les scénaristes, les dessinateurs ?

Chacun des auteurs a donné son approbation. J’ai contacté Michel Rabagliati, Delaf et Dubuc, Cab pour Hiver nucléaire, et Alexandre Fontaine-Rousseau pour les Cousines vampires. De son côté, Tony Curien a contacté l’auteur des Dormants, Jonathan Munoz, et Olivier Jouvray pour Lincoln. Il est allé chercher l’approbation des auteurs pour Boule et Bill. On est aussi allé chercher des dessins. Certains, s’ils avaient le temps, ont personnellement fait des dessins pour la représentation. Les dessinateurs ont donc travaillé en collaboration, en fonction de l’implication qu’ils voulaient avoir dans le projet.

La représentation que vous donnerez à Lyon sera-t-elle la copie conforme de ce qui a été présenté à Québec, ou bien allez-vous apporter certaines modifications ?

Ce qu’on a présenté, c’était une première. On va surtout faire des ajustements, rendre ça plus fluide, plus efficace, resserrer beaucoup de trucs. On va aussi ajouter un extrait de Magasin général, que l’on n’a pas fait et qu’on se garde pour le festival Lyon BD, parce que Régis Loisel et Jean-Louis Tripp seront là tous les deux.

Parole de planches : un extrait des Nombrils
Photo : courtoisie de l’équipe de production de Parole de planches

Vous êtes comédien, vous êtes metteur en scène, vous êtes auteur de BD… vous êtes un homme aux multiples talents ! Parlez-nous de votre travail.

À l’origine, j’ai une formation d’acteur. J’ai mis ça un peu de côté en 2007 pour commencer à écrire. J’ai toujours eu la plume qui me travaillait. J’ai commencé à travailler au contact de mon collègue et co-auteur Damien Berger. On a commencé à écrire la Saga-bulle, qui fera 13 tomes. On a le quatrième tome de sorti. Le cinquième s’en vient en septembre. Donc, depuis deux ans, on roule notre bosse dans le milieu de la BD. On ne vient pas de ce milieu et, tranquillement, on commence à connaître un peu ce qui se fait. C’est grâce à ces rencontres, à ces connaissances que l’on a faites dans le milieu de la BD que j’ai décidé de marier mes deux passions, le théâtre et la bande dessinée, avec le spectacle Parole de planches.

Jean-Philippe Bergeron et Damien Berger, co-scénaristes de Saga-Bulle (Ber-Ber 13-13)
Photo : Marianne St-Jacques
Saga-Bulle, par Damien Berger, Jean-Philippe Bergeron et Marie Lamonde-Simard, Ber-Ber 13-13
D.R.

Parlez-nous de votre série, la Saga-bulle.

Avec Saga-bulle, on est dans un univers apocalyptique. On ne parle pas de post-apocalypse. On raconte vraiment cette transition : le récit apocalyptique où notre humanité va s’achever et s’ouvrir sur une nouvelle ère. On n’est pas dans la BD d’anticipation comme telle, parce que dans la BD d’anticipation, on nous immerge dans une nouvelle société. Nous, on raconte plutôt la transition, le fléau, l’apocalypse qui s’abat sur le Québec et sur le globe. Cette plaie, ce sont les zombies. C’est un virus, la grippe Z, qui va se propager sur le globe et le foyer de l’épidémie est sur la Rive-Sud de Québec. Mais on est au-delà du récit traditionnel de zombies. On est très fan du genre, mais ce qui nous rendait très insatisfaits, dans les récits de zombies, ce que l’on ne nous explique jamais comment on en arrivait au monde post-apocalyptique que l’on trouve souvent. C’est donc ce que l’on raconte.

En terminant, allez vous poursuivre dans le domaine de la BD-spectacle ?

Tout indique que l’on va répéter l’expérience l’année prochaine, autant à Québec qu’à Lyon. J’avoue que je voulais continuer avec l’expérience de ce spectacle. Plein de nouvelles portes se sont ouvertes. Donc oui, je compte bien reproduire ce genre de trucs.

(par Marianne St-Jacques)

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