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Jim : "Avec mes nouvelles responsabilités chez Bamboo, je découvre à quel point le travail d’éditeur est long et exigeant"

Par Christian MISSIA DIO le 29 septembre 2018                      Lien  
Jim était de passage à Bruxelles à l'occasion de la Fête de la BD. Un festival que l'auteur de "Une nuit à Rome" découvrait pour la première fois et qui semble l'avoir conquit. Nous avons profité de sa présence pour évoquer avec lui le lancement de la collection Grand Angle Roman chez Bamboo, sa première expérience au cinéma, ainsi que le mouvement #metoo.
Jim : "Avec mes nouvelles responsabilités chez Bamboo, je découvre à quel point le travail d'éditeur est long et exigeant"
Plein de promesses
Ulysse Terrasson © coll. Grand Angle Roman, éd. Bamboo

Depuis quelques temps, vous vous êtes lancé dans une activité d’éditeur chez Bamboo. Vous proposez des romans. C’est un peu un mélange des genres que d’éditer du roman dans une maison spécialisée dans la BD. Pourquoi le roman ?

Jim : C’est une vieille envie. Cela faisait plusieurs années que je proposais cette idée à Olivier Sulpice. Je trouve que c’est vraiment dans le prolongement de notre métier. La première phase d’une BD, c’est l’écriture. Un scénario, c’est comme un travail d’épure. J’aimais beaucoup l’idée d’accompagner des auteurs dans le fait de raconter des histoires mais sur un support différent. À un moment, j’ai failli être directeur d’une collection de BD. Puis je me suis rendu compte que ça ne m’intéressait pas plus que ça, car c’était trop proche de ce que je faisais en BD naturellement. En clair, j’étais en terrain connu. Là, c’est vraiment un métier nouveau, il y a une sorte de défi. En BD, on écrit avec le dessin. Ici, on n’écrit qu’avec les mots. Il y a là quelque chose peut-être d’un peu plus pur…

Vous avez édité dans cette collection le roman de votre fils, Ulysse Terrasson. Il a eu de la chance ?

En réalité, c’est moi qui en ait eu. C’est lui qui a fait que je sois devenu directeur de collection. C’est parce qu’il avait écrit un roman qui intéressait Olivier Sulpice et que Bamboo voulait adapter en BD que ce projet est né. Mon fils, ce qui l’intéresse c’est de faire des romans. Il devait être édité par un gros éditeur mais cela ne s’est pas fait. Nous en avons reparlé avec Olivier Sulpice qui pensait au départ publier ce texte avec des illustrations. De fil en aiguille, l’idée est venue de lancer une collection de romans à la suite de ce premier titre. Je me suis aussi engagé à en faire un moi-même, qui s’intitule L’Amour (en plus compliqué), un recueil de nouvelles. Puis je me suis lancé dans la recherche d’auteurs. L’accompagnement d’auteurs, c’est une partie que je découvre totalement mais dans laquelle j’ai peut-être un avantage puisque je suis moi-même auteur. Cela dit, cela reste un vrai travail : il faut trouver des talents et les aider dans le développement de projet.

L’invitation (réédition)
Jim & Dominique Mermoux © Vents d’Ouest

Votre démarche n’est pas si banale. Il arrive souvent qu’un auteur devienne éditeur ou directeur de collection. On voit aussi des libraires devenir éditeurs. Est-ce que cette nouvelle activité correspond à l’idée que vous vous faisiez de ce métier, maintenant que vous êtes passé de l’autre côté du miroir ?

Ce que je découvre, c’est à quel point ce travail est long. Lire un roman c’est une chose, mais le travailler avec un auteur, le relire, le rerelire, tout cela empiète pas mal sur le sommeil (rires). Cela étant, je découvre le métier mais je le fais à ma façon. J’essaie d’avoir des relations privilégiées avec les auteurs et je fais en sorte qu’ils soient à l’aise. J’ai aussi ma part d’auteur que j’utilise comme une force de proposition afin de trouver des solutions lorsqu’il y a en a besoin. Mais je laisse cette part de moi de côté lorsque ce n’est pas nécessaire.

Est-ce que les enjeux sont les mêmes que dans la BD lorsque l’on édite des romans ? En termes de tirage, d’exposition et de ventes ?

La bande dessinée en général est mieux vendue. Mais après, je ne sais pas si c’est vraiment un critère. Je pense que le critère, c’est d’abord de raconter les choses. Je pense que c’est aussi lié au type d’histoires que j’ai envie de raconter ou de développer. J’ai envie d’être plus sur l’intime, proche des gens. On s’éloigne un petit peu de la BD. C’est un peu comme si le roman graphique était aussi une étape intermédiaire entre la BD et le roman.

Dernièrement, l’une de vos BD, L’invitation, a été portée à l’écran dans un film avec Nicolas Bedos, sorti fin 2016. Quelles sont vos impressions par rapport à ce film ? J’imagine que vous devez recevoir souvent des propositions d’adaptations de vos BD à l’écran ?

Oui, il y a plusieurs projets en développement. Concernant mon ressenti par rapport à cette adaptation il y a deux choses. Il y a d’abord le plaisir de la rencontre avec le réalisateur Michaël Cohen, qui avait vraiment une volonté d’être fidèle à l’œuvre originale et qui y a bien réussi, je pense.

Après, il y a la découverte -que je savais mais qui était intéressante à vivre- de la violence d’une sortie au cinéma lorsqu’un film ne trouve pas son public et qu’il n’est pas suffisamment distribué. Il y a douze ou quinze films qui sortent chaque semaine et l’on n’en retient qu’un ou deux. C’est très violent pour l’équipe. C’est intéressant de vivre cela de l’intérieur, de voir l’implication, la passion du réalisateur et comment les choses montent jusqu’au moment de la sortie du film, comment tout cela peut être vécu.

Une petite tentation
Jim & Grelin © Vents d’Ouest

Nous avons l’impression que vos créations correspondraient mieux au support télévisuel car les chaînes traditionnelles emboîtent le pas de Canal + en investissant de plus en plus dans ce types de contenus. Et avec des services comme Netflix ou Amazon Prime, le grand public découvre que l’on peut produire des films ou des séries à gros, voire très gros budget, avec un casting prestigieux et une distribution des contenus complètement repensée.

Sans doute que, tel que vous l’imaginez, cela implique l’obligation d’un casting un peu convenu très courant au cinéma, mais que l’on est obligé d’accepter pour monter le financement de tels films. Cela permet d’avoir des personnages qui sont peut-être plus proches de ceux de la BD. Le truc, c’est que je ne connais pas du tout le monde de la télé. Je connais un peu le monde des séries car j’ai déjà été approché par des producteurs qui souhaitaient adapter mes BD en série. Mais pour l’instant, c’est beaucoup plus le monde du cinéma qui s’intéresse à ce que je fais. Peut-être que ça changera un jour, je ne sais pas.

En 2013, vous aviez publié Une petite tentation, un roman graphique qui raconte le pari que deux jeunes femmes se lancent afin de séduire un homme marié… Cette histoire aurait-elle pu sortir de nos jours, avec la libération de la parole des femmes et le mouvement #metoo ? Là aussi, il y avait aussi une option pour une adaptation au cinéma ?

Une nuit à Rome T.3
Jim © Coll. Grand Angle, éd. Bamboo

Oui, il y a eu des options. Et là, il y a un réalisateur qui travaille sur une possible adaptation en ce moment. Mais c’est vrai, je pense que l’on est obligé de tenir compte de #MeToo pour l’adapter aujourd’hui. Je pense aussi que je n’aurais pas écrit l’histoire exactement de la même façon si la BD aurait dû sortir de nos jours. Pour moi, l’héroïne est très pure, très positive. Dans Une petite tentation, il y avait un jeu qui consistait à surprendre le lecteur… Aujourd’hui, cette histoire me donne vraiment envie de l’adapter en écriture au cinéma, justement pour tenir compte de #MeToo, qu’il n’y ait pas d’ambiguïté.

Mais comment vos lecteurs, vos lectrices surtout, ont accueilli cette BD à l’époque de sa sortie ?

Je pense que c’est vraiment un jeu scénaristique. Le principe, c’est de glisser des surprises, faire en sorte de jouer avec des principes. J’avais deux héroïnes : une qui est très pure et innocente et l’autre qui est beaucoup plus arriviste, qui va se servir de son corps pour parvenir à ses fins. Ou comment la blanche colombe se fait corrompre par sa copine. Cet aspect de l’histoire ne changerait pas si je devais l’écrire aujourd’hui. Je pense cependant que je modifierais en ajoutant un personnage, le rôle d’une sœur du héros, qui serait une personne très bienveillante afin d’équilibrer un petit peu… Mais c’est vrai que dans une période avec #MeToo, il faudrait sans doute réécrire un peu tout ça et mettre une couleur un peu différente au récit.

Quels sont vos prochains projets en bande dessinée ?

Là, je travaille sur la suite et fin D’une nuit à Rome T.4. Et puis j’ai un autre album intitulé Detox, qui sortira en mai 2019. J’en fais le scénario et le dessin et les décors sont réalisés par Antonin Gallo. Et puis de nouvelles collaborations très emballantes se préparent pour 2020… !

Propos recueillis par Christian Missia Dio

Une nuit à Rome
Jim © Coll. Grand Angle, éd. Bamboo

Voir en ligne : Découvrez la collection Grand Angle Roman sur le site des éditions Bamboo

(par Christian MISSIA DIO)

Cet article reste la propriété de son auteur et ne peut être reproduit sans son autorisation.

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Code EAN : 9782818946510

Photo : Jim
Crédit photo © DR

Agenda :

Le 6 octobre prochain, Jim et Ulysse Terrasson seront en dédicace au festival « Samedi BD », qui aura lieu à Charnay-les-Mâcon en Bourgogne à l’occasion des 20 ans des éditions Bamboo.

Samedi BD
Le samedi 6 octobre 2018 de 10h à 18h
Espace de la Verchère (Charnay-lès-Mâcon)
Infos complètes de l’événement à voir sur le site

À lire sur ActuaBD.com :

Pour ses 20 ans, Bamboo s’offre un festival BD

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