À peine sort-il, couvert de gloire, de son périple héroïque à travers la Terre maudite (voir le tome 2 des Affaires Classées) que voici Dredd accusé de… meurtre, par la redoutée S.J.S (Section Judiciaire Spéciale) du juge adjoint Cal. C’est le début des ennuis pour l’inflexible justicier de Mega City One.
La situation va rapidement devenir critique, car le Judge Cal va dévoiler un goût prononcé pour le despotisme, conjugué à un art consommé de la manipulation. Il ne faut en effet pas longtemps à Cal pour récupérer la place de Juge Suprême de la mégapole et laisser libre cours à son imagination paranoïaque et délirante pour choyer ses concitoyens.
Sa politique est simple : l’ennemi est partout, éradiquons donc la ville de ses habitants jusqu’au dernier. Judge Dredd, toujours debout, bien sûr, va alors tout mettre en œuvre pour que la justice revienne à Mega City One. Drokk ! Face à un fou, la partie va être compliquée...
Les éditions Delirium poursuivent leur travail de réédition-retraduction des aventures du plus célèbre des « héros » anglais, toujours fringuant quarante ans après sa création dans les pages de la revue 2000 AD.
Redécouvrir ces histoires, scénarisées par un John Wagner lui aussi en grande forme, est un réel bonheur, d’autant que ce tome trois contient un des plus longs « arcs » de la série : Le Jour où la loi est morte. Plus de 120 planches de délire total, où chaque nouvel épisode monte d’un cran dans la lutte entre Dredd et Cal, et où l’absurde et le non-sens gagnent du terrain en même temps que la bataille s’intensifie.
Il serait cruel de dévoiler ici les mesures prises par Cal au fil des jours pour le bien de ses administrés, et comment Dredd, et une poignée de résistants, tentent de les contrer. Il faut juste savoir que ce long scénario de Wagner a été admirablement mis en images par les dessinateurs qui ont travaillé à cette période sur la série, et en tout premier lieu Brian Bolland, dont le trait fin et extrêmement précis a marqué les lecteurs. A ses côtés, on retrouve Dave Gibbons, Mike McMahon, Brett Ewins, Gary Leach, Brendan Mc Carthy et Ron Smith.
Il peut être parfois déroutant de passer d’un style graphique à un autre – une conséquence du rythme soutenu des planches à livrer chaque semaine - mais force est de constater que chacun des dessinateurs de la série a laissé son empreinte et que tous ont fait preuve, à degrés divers, d’un réelle inventivité dans leurs cadrages et d’une audace dans la mise en page. Certaines planches sont tout simplement époustouflantes !
Après ce long épisode, ce tome se poursuit par trois histoires plus « traditionnelles » : La Loi des punks (dessin : Brian Bolland) où Wagner n’oublie pas qu’il écrit, depuis la création du magazine, pour des lecteurs qui arpentent les rues du pays du « no future ». Suit Les exo men, avec son mémorable Comité pour la Compassion envers la Criminelle, qui va suivre les juges au travail, pour bien vérifier qu’ils n’oublient pas d’utiliser l’amour et l’harmonie face au crime (résultat garanti !).
L’homme ADN, enfin, est une transposition du mythe de Frankestein en 2101. Inutile de vous dire comment vont finir le monstre et son créateur. Si ?
Et, icing on the cake , ce tome s’achève par une galerie des 14 premières couvertures américaines de l’édition chez Eagle Comics de Judge Dredd, celles-là même que le public français avait pu découvrir, en partie, dans la version en kiosque publiée par Arédit entre 1984 et 1986.
Au final, un travail éditorial remarquable, qui rend justice à un personnage majeur de l’histoire mondiale des comics.
(par Fred PRILLEUX)
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