Albums

KZ - Dessins de prisonniers de camps de concentration nazis - Par Arturo Benvenutti - Steinkis

Par Didier Pasamonik (L’Agence BD) le 19 février 2016                      Lien  
Cela n'a rien d'une bande dessinée. Quoique, car ces dessins racontent une histoire, parfois malgré eux. En rassemblant les dessins issus de différents camps nazis disséminés dans toute l'Europe (Pologne, Allemagne, Italie, Hollande, Belgique, Yougoslavie, République tchèque...), Arturo Benvenutti offre un portrait saisissant de l'univers des camps de la mort. Un travail salué par Primo Levi lui-même.

"Pour décrire l’horreur, écrit Primo Levi en préface de ce livre, la parole s’avère insuffisante. Les images ici reproduites ne sont pas une équivalence ou un ersatz : elles remplissent la parole au mieux, elles disent ce que les mots ne savent pas dire. Certaines ont la force immédiate de l’art, mais toutes ont la force crue de l’œil qui a vu et qui transmet son indignation."

Dans ce recueil qui résulte d’années de recherche, Arturo Benvenutti, réunit des œuvres de prisonniers des camps nazis. Certains ont survécu et ont dessiné après coup, parfois quelques jours après leur libération, ces images des jours terribles qu’ils ont vécus. D’autres ont été conçus par des prisonniers qui n’ont pas réussi à s’échapper de l’enfer nazi. Nous sommes au-delà de la représentation fictionnelle, de la photo, au-delà même du dessin judiciaire. Les gens qui sont représentés sont des parents, des amis. Ils sont morts ou ils vont mourir. Ils sont représentés avec une charge émotionnelle indicible.

KZ - Dessins de prisonniers de camps de concentration nazis - Par Arturo Benvenutti - Steinkis

Rien ne parle mieux de la barbarie, de la cruauté, de l’inhumanité que ces visages émaciés, ces corps décharnés, muets, mais dont on devine la pestilence. Images terribles qui parlent mieux que les mots, Primo Levi l’a bien compris, qui ont la force sidérante d’une œuvre d’art et la vérité implacable d’un témoignage dispensé par les propres victimes de ces abominations.

Les nazis ont veillé à ce qu’il reste peu de traces de leur crime -un boulevard ouvert aux imbéciles révisionnistes- mais les images sont là pourtant, qu’on ne pourra jamais effacer : "L’œil était dans la tombe" disait le poète. Dans ces pages aussi.

Ce livre, que l’on peut mettre en parallèle avec celui d’Arthur Goldschmit, Puisque le ciel est sans échelle (Creaphis Edition), recueil de dessins qu’il a réalisés au camp de Terezin, avec celui, remarquable, de Claude Laharie, L’Art derrière les barbelés - 1939-1944 (Atlantica) ou encore avec Mickey à Gurs, ce recueil de dessins de Horst Rosenthal que j’ai publié avec Joël Kotek et Tal Bruttman (Calmann Lévy) démontre combien de talents ont disparu avec la Shoah, qu’elle est non seulement un crime unique et imprescriptible contre des hommes, mais aussi contre la civilisation.

Merci aux éditions Steinkis de nous l’avoir fait connaître.

(par Didier Pasamonik (L’Agence BD))

Cet article reste la propriété de son auteur et ne peut être reproduit sans son autorisation.

🛒 Acheter


Code EAN :

 
Participez à la discussion
4 Messages :
  • Les camps de concentration, ce n’est pas QUE la Shoah. On est d’accord, les juifs ont été amplement majoritaires, mais il ne faut pas oublier les homosexuels, les handicapés, les opposants politiques, les émigrés les résistants… Ces autres victimes ne sont pas des détails de l’Histoire.

    Répondre à ce message

    • Répondu par Didier Pasamonik (L’Agence BD) le 24 février 2016 à  20:28 :

      Bravo pour le "détail de l’histoire", vous êtes en bonne compagnie...

      Malheureusement, vous faites un peu vite l’amalgame. On ne peut pas mettre dans le même sac les opposants politiques, les émigrés, les résistants, voire même les homosexuels (et vous en oubliez : les Tziganes...)qui ont eu leur lot de misère et de martyrs, avec les juifs qui ont fait l’objet d’un plan de destruction systématique et unique tant par son ampleur que par ses objectifs (qui visaient l’annihilation des 12 millions de juifs européens) que l’on appelle "Shoah".

      Par ailleurs, vous semblez volontairement confondre "camps de concentration" et "camp d’extermination", ces derniers étant principalement dévolus aux juifs. Il n’est pas question ici d’une "majorité", comme vous dites (peu importe le nombre, en fait), mais de l’unicité d’un crime qui ne souffre d’aucune comparaison (sauf peut-être, dans le siècle, les génocides des Arméniens et des Tutsis), en dépit de vos arguties qui nous mènent d’ailleurs loin du sujet du livre.

      Répondre à ce message

      • Répondu le 28 février 2016 à  19:21 :

        Je sais très bien faire la différence entre camp de concentration et camp d’extermination. Le titre de votre article parlait de camp de concentration. Voilà pourquoi je précisais que camp de concentration concernait aussi d’autres individus. Je vous remercie pour votre commentaire qui précise mieux les choses, éclaire mieux votre article. Et n’oublions pas non plus les témoins de Jéhovah… En fait, n’oublions rien ni personne.

        Répondre à ce message

        • Répondu par Didier Pasamonik (L’Agence BD) le 29 février 2016 à  10:06 :

          Vous êtes dans un processus de concurrence des victimes, croyant valoriser les uns par le déni de la spécificité des autres. Toutes les victimes dans cette guerre -n’oublions pas les combattants et les victimes civiles tant qu’à faire- ne se caractérisent pas seulement par leur appartenance, mais aussi par la spécificité des crimes dont ils ont été les victimes.

          Je terminais mon article par une mise en parallèle avec d’autres ouvrages qui montraient le travail d’artistes disparus dans les camps du fait, en ce qui les concerne, de la Shoah.

          Il n’est pas question pour moi de mettre une victime au dessus d’une autre. Mais on ne peut oublier que Charlotte Salomon et Robert Desnos sont morts à cause des mêmes assassins pour des raisons très différentes.

          Il ne faut pas que votre obsession pour les "points de détail", un vocable que vous n’utilisez sans doute pas par hasard, vous fasse oublier que cet article est avant tout la chronique d’un bon livre auquel vous pourrez vous reporter pour en apprécier les nuances, notamment à ce sujet, car jamais, par exemple, Primo Levi n’écrit le mot "juif".

          Répondre à ce message

CONTENUS SPONSORISÉS  
PAR Didier Pasamonik (L’Agence BD)  
A LIRE AUSSI  
Albums  
Derniers commentaires  
Abonnement ne pouvait pas être enregistré. Essayez à nouveau.
Abonnement newsletter confirmé.

Newsletter ActuaBD