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Karim Talbi et Étienne Barral : « On cherche avant tout à sortir des auteurs dont le nom va rester dans l’histoire du manga au Japon et dans le monde. »

Par Vincent GAUTHIER le 7 août 2013                      Lien  
Karim Talbi et Étienne Barral (auteur de La Dernière Goutte de saké aux Éditions Ilyfunet) ont fondé les éditions Isan Manga en début d'année après avoir longuement mûri leur projet. Ils ont d'abord publié deux titres de Yumiko Igarashi, Roméo et Juliette et Madame Bovary adaptés de deux chefs-d’œuvre de la littérature mondiale. Ils présentaient à la Japan Expo leur nouveauté, Kamen Rider, du mangaka Shotaro Ishinomori, auteur, excusez du peu, de Cyborg 009 ou encore de Sabu & Ichi.

Quelles sont les idées qui ont présidées à la naissance d’Isan Manga ? Et dans quelle direction vous ont-elles emmenées ?

Karim Talbi :
Étienne et moi, nous nous sommes rencontrés il y a quatre ans, si je ne dis pas de bêtises, dans le cadre de nos travaux professionnels. On a discuté. Étienne est agent au Japon. Il travaille notamment avec Yumiko Igarashi et il cherchait un éditeur pour publier ses œuvres en France. J’étais graphiste free-lance dans l’édition, et du coup je travaillais pour beaucoup d’éditeurs de manga. On nous a présenté par un ami commun et en discutant, on s’est rendu compte qu’on voulait tous les deux se lancer dans l’édition. Et surtout que nous avions une vision un peu commune du marché. On est des vieux de la vieille, sans être vieux pour moi, mais toi non plus tu es toujours jeune !

Karim Talbi et Étienne Barral : « On cherche avant tout à sortir des auteurs dont le nom va rester dans l'histoire du manga au Japon et dans le monde. »
Yumiko Igarashi
DR


Étienne Barral :
Moi, je suis un vieux de la vieille !

Karim Talbi :
Tu es toujours jeune mais on voulait trouver des mangas un peu vintage en France, ce qui est assez rare et en plus en beaux livres, dans une belle collection... Tout de suite ça a pris entre nous. On s’est dit « Pourquoi ne pas essayer ? ». On a réfléchi. Ça a pris quelques années ; on a longuement discuté et on s’est lancé. On en a parlé à Mme Igarashi qui fut emballée par le projet de voir ses œuvres arrivées en France. Ses œuvres autres que Candy et Georgie. Et pour le coup, on a décidé de prendre notre temps et de sortir une collection de livres grand format, haut de gamme, en belle qualité pour toucher un public qui a notre âge...

Étienne Barral :
C’est assez vaste !

Karim Talbi :
Ça fait une belle échelle du coup !

Étienne Barral :
De 29 à 49 ans, ça nous laisse de la marge !

Karim Talbi :
27, monsieur !

Étienne Barral :
Oh ! Pardon... Mais je ne sais pas si tu as le droit de lire Isan Manga, du coup, t’es un peu jeune ! (Rires)

Madame Bovary d’après Gustave Flaubert
Yumiko Igarashi - Isan Manga ©


Karim Talbi :
On verra ça ! Pour l’instant, j’y arrive. Je suis vieux dans ma tête !(Rires). Donc on a voulu créer une collection de type vintage en haut de gamme pour un public qui rentre dans la vie active ou qui y est depuis un moment et qui désire, dans son salon, une belle collection de beaux livres avec une belle image, une belle couverture... Quelque chose qui fasse vraiment classe ! Pour le dire un peu familièrement. Là dessus, on a commencé à faire des petites recherches. À l’époque, on avait les droits de Madame Bovary et de Roméo et Juliette qui sont nos deux premiers titres. En réfléchissant, on s’est dit que pour ces adaptations d’œuvres (française pour Madame Bovary de Flaubert), il était dommage de ne pas avoir les romans avec. On a travaillé encore un peu et la réponse est venue. Pourquoi ne pas mettre dans le même livre le manga et le roman ? Pareil pour Roméo et Juliette qui combine le manga et la pièce de Shakespeare. C’est un pari un peu fou parce qu’en en parlant à notre distributeur (Makassar), il s’est arraché les cheveux en nous disant que les libraires n’allaient pas savoir quoi en faire... Mais aujourd’hui, ça porte ses fruits. Ce n’est pas un énorme succès, c’est encore tout jeune, mais en tout cas, au niveau image, les gens nous reconnaissent, arrivent à nous identifier aux mangas. C’était un beau pari et, pour l’instant, pour nous, c’est une réussite à ce niveau-là.

Romeo et Juliette d’après William Shakespeare
Yumiko Igarashi - Isan Manga ©


C’est la notion d’appartenance au patrimoine qui va guider votre ligne éditoriale ?

Étienne Barral :
Notre nom Isan Manga y fait référence. « Isan », en japonais, ça veut dire le patrimoine. On est donc en plein cœur de cible. On cherche avant tout à sortir des auteurs dont le nom va rester dans l’histoire du manga au Japon et dans le monde. On a un slogan qui soutient notre exigence de qualité et qui est « Isan Manga, les mangas à s’offrir ». Pour « s’offrir », il y a deux acceptations. S’offrir, à soi-même, se faire plaisir, parce qu’on est fan, qu’on tient à avoir cette collection originale de maîtres du manga dans une belle version. Et aussi, offrir à quelqu’un d’autre pour lui faire plaisir ; et on fait plus plaisir en offrant un manga avec une belle couverture, quelque chose qui est de qualité qu’avec un livre cartonné vite lu, vite jeté. C’est notre philosophie. Elle tient en ces quelques mots, ce slogan. Ça fait pas mal de temps que je suis dans la mouvance. J’observe ce qui ce qui se passe dans le phénomène de diffusion de la culture pop japonaise, d’abord au Japon puis à l’étranger, et je constate que ceux qui s’y intéressaient pour la première fois, il y a quasiment vingt ans, et que je rencontrais à Paris à l’époque où il n’y avait pas encore de Book Off, pas encore de Japan Expo, où il n’y avait rien, sauf des rencontres le samedi midi devant Junkudo  ; ces mômes ont maintenant 35, 40 ans et ce n’est peut-être plus forcément Naruto qui les intéresse. Par contre, le virus est toujours là. Ils cherchent à découvrir des trucs qui à l’époque n’existaient pas forcément d’où Kamen Rider et des titres de Yumiko Igarashi qui a fait rêver toutes les petites filles à travers Candy. Quand, maintenant, on sort ces belles éditions en leur disant : vous ne vous souvenez peut-être plus du nom de Igarashi mais quand je vous dit que c’est la dessinatrice de Candy, ça fait déclic. Et tout de suite, elles ouvrent, elles regardent et alors là, elles voient l’autre aspect en plus. Quand on a créé ces livres avec le manga plus le roman à côté, c’était pour donner un côté quasi pédagogique. On peut comprendre à travers la juxtaposition du texte original et du manga comment l’auteur a fait son découpage, qu’est-ce qu’il a retenu du texte original pour le visualiser, le dessiner dans l’histoire. Que ce soit au niveau des descriptions, des lieux et des personnages. Si on lit les deux en parallèle, il ne s’agit pas d’avoir deux livres. On a simplifié le travail en mettant les deux dans le même ouvrage. Et je pense que ça peut être aussi une autre manière d’apprécier le travail des mangaka.

Est-ce qu’avec le tassement du marché du manga, qui n’est plus en ascension exponentielle comme c’était le cas il y a quelques années, les collections « Vintage » sont amenées à devenir une niche de développement assez forte économiquement ?

Cyborg 009, un titre « vintage ».
Shotaro Ishinomori - Glénat ©


Karim Talbi :
Je ne pense pas que ce soit une niche extrêmement forte en France. Mais il y a quand même une niche. Il y a des gens qui, comme le disait Étienne, ont 25, 35, 40 ans et qui veulent découvrir autre chose. Qui s’y intéressent. On les voit sur les festivals et les salons. On ne peut pas dire qu’il y a là une niche qui va exploser mais ça peut représenter pas mal de gens. Les jeunes qui lisent Naruto aujourd’hui, dans 10 ans, voudront lire Kamen Rider. Ils connaissent le nom, on leur en parle dans GTO. C’est un titre qui a influencé le monde du manga d’une façon extraordinaire au Japon. Il me semble qu’il y a sept ou huit versions mangas, une vingtaine de films au cinéma, une dizaine d’adaptations en série télé. Aux États-Unis également. C’est assez impressionnant de voir quelle influence il a. Dans le manga de super-héros, même le « shonen ». On se dit que, pour le moment, on va toucher un certain public, mais, au fur et à mesure, les ados vont grandir, devenir adulte, avoir un travail, se dire qu’ils veulent des beaux livres. Et il y a beaucoup d’ados qui lisent, c’est pour plus tard des adultes qui liront du manga classique. Est-ce que ça va être le cas ? On ne sait pas. Pour l’instant, c’est une niche. Nous on regarde à court et à moyen terme. Sur le long terme, on n’a pas de vision parce que personne ne peut prédire ce qu’il va se passer mais il y a quand même un potentiel. De là à ce qu’il soit énorme, je ne sais pas. En tant que petit éditeur, on reste sur notre petite niche à moyen terme et pourquoi ne pas espérer une bonne surprise. On le voit sur Kamen Rider ; je ne m’attendais pas à voir des mômes de 15 ans sur le stand me l’acheter ou me poser des questions. On savait qu’on allait toucher le fan de super-héros « sentai », de « tokusatsu », mais pas vraiment l’ado. On se disait bien qu’il y en aurait quelques-uns. Ado je lisait de tout, et aujourd’hui, je lis des mangas plus vieux que moi. On voit donc que ça peut se développer.

Vous vous attaquez à un monstre en la personne de Shotaro Ishinomori ?

Étienne Barral :
On a encore 120 000 pages à publier !

Avec Cyborg 009, Sabu & Ichi, et Kamen Rider, c’est un phénomène de la pop-culture japonaise, j’imagine qu’il y a des questions d’achat de droits. Quand vous vous présentez au Japon pour acheter ces droits, comment on vous voit ? Comment vous vous présentez ?

Sabu & Ichi
Shotaro Ishinomori - Kana ©


Karim Talbi :
J’ai une anecdote à raconter là-dessus. On avait commencé par démarcher pas mal d’éditeurs avant qu’on publie des titres. Forcément, avant de publier, il faut acheter des droits. Et Étienne y allait et s’est quand même pris quelques portes fermées en entendant : « Mais qui êtes-vous ? Que faites-vous ? Sortez d’abord quelque chose et revenez nous voir ». Le serpent qui se mort la queue. Pour sortir un titre, il faut des droits, pour avoir des droits, il faut avoir sorti un titre. C’est là que le soutien de Mme Igarashi a été décisif. On a pu sortir deux titres et le jour où il est allé chez l’agent des ayants-droits de Shotaro Ishinomori, il m’a appelé en me disant qu’il allait les voir pour prendre contact. Madame Bovary et Roméo et Juliette étaient déjà sortis. Il avait les livres avec lui et en sortant du rendez-vous ce jour-là, il me dit : « Écoute, ils sont d’accord avec ce qu’on leur propose, on peut y aller. » C’était assez impressionnant de voir à quelle vitesse on avait réussi à les convaincre parce que, quelque part, en France ,c’est un auteur qui a eu pas mal de publications mais qui n’a jamais rencontré un gros succès. On le voit chez Glénat avec Cyborg 009 qui est une catastrophe éditoriale, enfin commerciale surtout, car c’est un très beau livre. Même Sabu & Ichi touche une petite niche alors qu’au Japon, Ishinomori est un des plus grands mangakas. C’est au niveau de Tezuka, voire même au-dessus pour certains ! C’est 128 000 pages à publier, record au Guinness Book ! C’est impressionnant et, nous, on espère, par notre placement de niche, faire venir les gens fans de Kamen Rider, manga plutôt classique, « shonen », et leur faire découvrir d’autres titres de l’auteur. C’est une grande fierté pour nous de sortir des titres de Mme Igarashi ou de M. Ishinomori parce que ce sont des artistes qui ont marqué leur génération et qui marquent encore aujourd’hui le monde du manga.

Shotaro Ishinomori
DR


Comment expliquez-vous cette différence de reconnaissance entre la France, où Ishinomori est méconnu, et le Japon ?

Étienne Barral :
Je crois qu’on est encore, et malgré tout ce qu’on voit ici à la Japan Expo, en séance de rattrapage. Le manga au Japon, ça a commencé avec Osamu Tezuka en 1950, on est en 2013, il s’est passé 63 ans de production ininterrompue. Et, encore maintenant, où on aurait plutôt tendance à constater que la source est en train de se tarir au Japon alors qu’il y a 60 ans d’histoire de production à fond les manettes de série dans des albums qui se vendaient, comme les Jump, à 6 millions d’exemplaires par semaine. Nous n’en sommes qu’à gratter la première couche de glace, la plus visible des titres récents. Je suis assez intéressé de voir qu’aujourd’hui, il y a des titres qui sortent quasiment en simultanée au Japon et au France. Et il y a dedans des choses qui sont très, très bien. Mais ce qui nous intéresse, c’est de gratter un petit peu plus profond et d’aller chercher, dans tout ce qui n’a pas encore été publié en France, des titres qui sont symboliques. Avec la base de fans de plus en plus importante en France, tout le monde est sur la source actuelle, tout le monde se jette sur les nouveaux titres, se bat dessus. Alors que c’est la plus fragile ! Nous, cette tranche-là n’est pas notre cour de récréation, ce n’est pas ça qui nous intéresse. Ce qu’on veut, c’est essayé d’éduquer et de montrer qu’il y autre chose. Alors on sait qu’on va pas sortir 100 000 exemplaires et qu’on ne va jamais trouver Kamen Rider au Monoprix mais tout le monde ne veut pas aller bouffer chez McDonald. Tout le monde ne veut pas s’abreuver à la grande distribution. On essaie d’être des gourmets, le trois étoiles du manga. Il y a cette revendication. C’est aussi pour ça qu’on ne se contente de prendre les droits et de les sortir en format « paperback ». En se disant, on a la licence, on l’a sorti et basta ! Ça existe mais ce n’est pas notre public ! Je veux dire, je ne sais pas si quelqu’un qui s’intéresse à l’histoire du manga, à la culture japonaise de façon un peu moins superficielle que les mômes qui vont acheter Naruto, même si heureusement qu’ils sont là, il ne s’agit de les critiquer ou quoique ce soit, mais il s’agit de procurer et de faire autre chose. En se positionnant sur le beau livre, c’est une manière de dire, il existe autre chose que ce que vous avez l’habitude de voir. On se rend compte depuis deux jours qu’il est sorti qu’effectivement les gens en parlent, nous félicitent pour la qualité du truc, ça nous fait plaisir ! On estime qu’on est sur la bonne voie et qu’on s’est pas trop planté dans notre idée de départ.

Kamen Rider
Shotaro Ishinomori - Isan Manga ©


Vous souhaitez mettre en place un public de connaisseurs pour l’instant plutôt restreint. Combien avez-vous tiré d’exemplaires de Kamen Rider ?

Karim Talbi :
1 500 exemplaires, c’est un petit tirage dans le monde du livre. Mais à notre échelle, on a six mois d’existence, on n’a pas la puissance éditoriale de Média Participations, de Glénat ou de toutes ces grosses maisons. On est sur un produit haut de gamme, une niche, et on espère juste combler cette niche. On adorerait pouvoir tirer plus, pouvoir vendre plus, mais on peut pas prendre non plus d’énormes risques financiers puisqu’on travaille sur nos fonds propres. Donc 1 500 exemplaires, c’est déjà pas mal. Quand j’ai commencé à travailler dans le manga, en 2005, chez un éditeur à l’époque du grand pic, de la grande ruée sur le manga, je me souviens que nos ventes moyennes et correctes étaient de 5 000 exemplaires. Aujourd’hui un éditeur, même Tonkam ou Pika, qui en vend 1 000 est content, on en arrive là. Il faut savoir que le marché ne s’est pas pété la gueule mais se stabilise. On est dans une période de crise, où le budget culturel diminue chez tout le monde. C’est paradoxal puisqu’on fait du beau livre avec un prix un peu plus élevé mais...

Étienne Barral :
Notre avantage c’est que quand Pika vend 1 000 exemplaires à 7€ il est à 7 000€, nous quand on vend 1 000 exemplaires à 30€... On est à 30 000 !

Karim Talbi :
Ce côté de plus forte rentabilité nous permet aussi de faire rentrer de la trésorerie ; d’avoir une rentabilité non pas à faibles ventes mais à des ventes moins élevées qu’un titre poche. Alors forcément ça a un coût d’impression et de fabrication qui est très élevé à côté mais on est sur des tirages plus faibles, on reste à notre échelle. On est un petit éditeur indépendant comme peut l’être IMHO ou Cornélius. Je suis un grand admirateur du travail de Cornélius et de Jean-Louis Gauthey (fondateur des éditions Cornélius) et on se positionne vraiment entre les deux. Entre Cornélius qui fait du très beaux livres sur des titres indépendants de manga et spécialisés et Pika ou d’autres qui font du manga classique pour masse sur du poche. Nous on se met entre les deux. On fait du manga haut de gamme pour tout le monde. C’est assez paradoxal mais la vision qu’on a du marché tous les deux, c’est ce, qu’à un moment donné, les gens vont chercher. Avoir des beaux livres, avoir des belles choses, on en vendra moins, c’est sur, mais c’est un marché où pour l’instant il n’y a personne et Isan Manga arrive. Glénat est arrivé avec sa collection Vintage en même temps que l’on montait notre projet mais ils sortent ça en poche et on voit que le succès n’est pas au rendez-vous. C’est malheureux car des titres comme Ashita no Joe ou Cyborg 009 sont extraordinaires et ils ont du coup fait un rétro-pédalage avec 2001, Night Stories de Yukinobu Hoshino qu’ils ont fait en très beaux coffret, une très belle édition qui valait cher et ils ont écoulé tout le stock. Voilà pour nous le vintage doit être un beau livre, symboliquement ça montre que c’est un livre qui va durer dans une bibliothèque. Et quand c’est une série comme Kamen Rider qui a 40 ans, montrer un objet qui va durer et qui dans 40 ans sera encore là c’est important.

Quels sont les retours des libraires par rapport à vos livres ?

Karim Talbi :
La trésorerie des libraires n’étant pas extensibles, c’est assez compliqué de se placer en librairie. Avec notre distributeur, Makassar, on en a parlé longtemps. Quand je leur ai annoncé le projet, ils ont été très sceptiques. C’était compliqué pour eux. Sur le premier placement, Roméo et Juliette, notre premier titre, une semaine après la mise en place, leur directeur commercial m’a appelé en me demandant si je pouvais faire un réassort de 600 exemplaires. Il m’avait dit que ça risquait de ne pas partir du coup j’avais fait un petit tirage et il ne m’en restait plus. Il s’avère que sur le salon on n’en a plus d’exemplaires non plus. Il m’en restait 20 chez moi, on les a amenés sur le salon. On a encaissé pour l’instant cinq retours sur Roméo et Juliette. Alors en librairie ça ne part pas tout de suit, ça part pas comme un manga en poche qui partirait à la nouveauté, c’est un titre de fond. Ce que me disent les libraires autour de moi ; c’est qu’ils n’en vendent pas trente à la nouveauté mais qu’ils en vendent quand même deux par mois. Du coup ils veulent en garder en rayon parce qu’ils continuent à les vendre. C’est un apport de trésorerie pour eux qui est appréciable. Et à partir du moment où les libraires jouent le jeu, qu’ils les mettent correctement en place et les présentent aux lecteurs qui sont dans la cible, ils en vendent, pas énormément encore une fois mais là où ils vont vendre trente Naruto et gagner 8€, si ils vendent un de nos livres, ils gagnent la même chose. Pour le coup ils commencent à comprendre ce côté important pour eux et même pour l’image du livre d’avoir ces titres au catalogue.

Étienne Barral :
Et trente Naruto ça prend plus de places qu’un Madame Bovary !

Karim Talbi :
Ça permet d’attirer des personnes différentes dans les librairies, des gens qui...

Étienne Barral :
Ce ne sont pas les mômes qui vont dans les librairies.

Karim Talbi :
Mon libraire à Antony, le Coin de la Bulle, qui vend beaucoup à des jeunes, puisqu’il y a un collège et un lycée à proximité, avait pris pas mal de bouquins sur les deux premiers et il me disait que ça ne partait pas alors qu’il a un rayon indé qui marche un petit peu quand même parce qu’il essaie de les pousser. Un jour on lui a dit de ne pas proposer aux mômes, c’est pas pour leur poche, ça rentre pas chez eux. Il organise un petit salon, un petit festival à Antony, qui s’appelle BD d’Antony. Je suis venu sur son stand pour présenter nos titres au public qui n’a pas forcément acheté tout de suite mais qui a vu, a retenu, et depuis il me dit, certes qu’il n’en a pas vendu dix de chaque, mais que des gens sont venus le voir en librairie, qu’ils avaient vu que Kamen Rider allait sortir et ils voulaient en savoir plus. Le travail pédagogique avance et progressivement je pense qu’on va y arriver.

(par Vincent GAUTHIER)

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