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L’Âge d’or de la caricature (1814-1914) – 300 Dessins de Presse à l’humour explosif – Par Benoît Prot - Éditions Geo/Histoire

Par Didier Pasamonik (L’Agence BD) le 14 mars 2022                      Lien  
La caricature est un indicateur de la démocratie. C’est un peu comme les canaris que l’on emmenait dans la profondeur des mines au XIXe siècle et qui servaient à détecter le gaz, à prévenir les coups de grisous. Pour comprendre le combat que mène "Charlie Hebdo" aujourd'hui, ou tout simplement tous ceux qui opèrent dans le domaine de l’humour transgressif, il est nécessaire de revenir à l’histoire de la caricature, à sa source, pour s’apercevoir combien cette arme des faibles est redoutée des puissants.

Quand on voit cette couverture de Charlie HebdoPoutine est dessiné en mâle Alpha prêt à appuyer sur le bouton avec son tout petit sexe, on imagine assez bien ce qui arriverait à Riss s’il publiait ça en Russie… Poutine n’aime pas les humoristes, la preuve : il n’aime pas Zelensky. Cela n’impressionne pas Riss qui, gravement blessé au cours de l’attentat du 7 janvier 2015 contre Charlie Hebdo, en a réchappé. C’est pourquoi il cogne dur.

Un album raconte l’histoire de ces « dessins excessifs » que l’on a vu apparaître, avec la presse populaire, en 1814 à la Restauration, après la chute du Premier Empire. La caricature, mise sous l’éteignoir sous le régime de Bonaparte, était devenue le fer de lance de l’opposition au roi Louis-Philippe.

On connaît l’histoire de Charles Philippon (1800-1862), le fondateur du journal La Caricature, qui avait croqué le roi des Français sous la forme d’une poire. Il est condamné pour cette offense et passe ensuite une bonne partie de son temps à contourner l’interdit, par exemple en donnant à l’article de loi censurant les dessins… le contours du fruit interdit ! OPlus tard, plutôt qu’une poire, il dessin un melon mûr, d’abord accepté par la censure -rappelons qu’avant 1881, il s’agit d’une censure préalable, c’est-à-dire qu’il faut soumettre les dessins aux censeurs avant publication- avant que celle-ci ne se ravise et poursuive le dessin après sa publication car le melon ressemblait à s’y méprendre à un juge spécialiste des délits de presse !

L'Âge d'or de la caricature (1814-1914) – 300 Dessins de Presse à l'humour explosif – Par Benoît Prot - Éditions Geo/Histoire
Charles Philippon

Honoré Daumier (1808-1879), pour avoir représenté le même royal podagre en Gargantua, est condamné à six mois de prison et cinq cents francs d’amende (des francs-or !) et se contentera ensuite de dessiner des bourgeois, des avocats, le bon peuple... sans référence politique trop perceptible.

Honoré Daumier

On doit à André Gill (1840-1885) d’avoir popularisé un format de la presse satirique qui est encore aujourd’hui celui de Charlie Hebdo : un portrait-charge en couverture et une multitude de faits politiques illustrés par un trait acerbe.

André Gill

La qualité rejoint la quantité dans les années 1870-1880, dans une France composée alors majoritairement d’analphabètes et où la photo n’est pas encore d’usage courant dans le journalisme : selon Jean-Yves Mollier,, il n’y a avait pas loin de 175 journaux en kiosque. La fameuse loi de 1881 sur la « liberté de la presse » est destinée principalement à encadrer cette presse satirique particulièrement mordante.

Parmi les grands artistes que l’on voit défiler dans ces journaux, il y a Alfred le Petit, Caran d’Ache, Steinlen, Grévin (oui, celui du musée), Jossot, Granjouan, Pilotell, Félix Valotton, Steinlein, Roubille… Iles ne sont pas tous fréquentables...

Jossot
Grandjouan

Les journaux s’appellent La Caricature, La Charge, La Lune, L’Éclipse, Le Grelot, Le Canard sauvage, L’Assiette au beurre, Le Rire… Ils visent le pouvoir, les institutions, l’Église, les têtes couronnées, les puissants… C’est cette tradition que Charlie Hebdo perpétue aujourd’hui et dont on découvre ici les racines.

(par Didier Pasamonik (L’Agence BD))

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Code EAN : 9782810431908

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