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La BD a encore besoin de Superman.

Par Antoine Boudet le 3 juillet 2013                      Lien  
Tandis que "The Man of Steel" dépasse le demi-milliard de dollars de recettes, nous vous offrons un petit panorama des meilleures aventures du dernier fils de Krypton, à l'occasion des 75 ans de l'Homme d'Acier dont es aventures figurent principalement au catalogue d'Urban Comics en France.

Créé en 1938 par Joe Shuster et Jerry Siegel, Superman a connu une continuité des plus chaotiques dans l’univers de DC. Nous aborderons en particulier la version « moderne » du personnage retravaillé par John Byrne lorsque la Distinguée Concurrence lui confia les rênes de sa série-phare.

Pour le lecteur néophyte, nous traiterons principalement les publications parues en français et encore trouvables chez les (bons) libraires. Un petit guide sera divisé en trois parties, la première comprenant les rééditions, la seconde portant sur les parutions actuelles de Superman, la troisième concernant des aventures hors continuité pouvant se lire indépendamment des aventures régulières de l’Homme d’Acier.

La BD a encore besoin de Superman.
(C) DC Comics
(C) DC Comics

Superman : L’Homme d’acier, de John Byrne avait relancé Superman dans le début des années 80. DC voulait vraiment dépoussiérer son héros-phare et remettre à plat son univers, sans pour autant provoquer une énième remise à zéro de la série, et grand bien leur a fait.

Byrne réussit là où d’autres avant lui se sont cassés les dents. Réunissant les différentes versions des origines de Superman en une seule, il définit le canon de la destruction de Krypton, sa jeunesse à Smallville, son entrée au Daily Planet, sa rencontre avec Batman... : la quintessence-même de ce que sera Superman. Les personnages secondaires subissent aussi un remaniement, le plus important et notable étant celui de Lex Luthor qui passe de la figure du savant fou à celle d’un magnat des affaires.

En six numéros, Byrne pose les bases qui resteront inchangées jusqu’en 2006, date de publication de l’épisode Superman : Droit du Sang qui redéfinit très légèrement les origines de Kal-El sans pour autant mettre à bas le travail de Byrne.

(C) DC Comics/Urban Comics

La Mort de Superman

Au début des années 1990, les héros de DC sont mal en point face à la concurrence qui aligne des jeunes artistes prometteurs tels que Todd McFarlane ou encore Jim Lee. Pour contrer cette vague, DC remet en place la chute de ses dieux pour rebondir sur le succès de la mort de Flash dans Crisis on Infinite Earths. Le premier à y passer n’est d’autre que Superman, chose quasiment impensable dans la conscience des lecteurs. C’est pourtant ce que vont tenter les auteurs de La Mort de Superman, Dan Jurgens et Louise Simonson

Une créature d’une puissance incommensurable se réveille au centre de la Terre, provoquant une vague de panique et de destruction sans précédent. La Justice League tente d’arrêter cette menace mais se fait balayer comme un fétu de paille. Superman va alors se mesurer à la créature, appelée Doomsday par la Justice League, et se rend compte qu’ils sont de force égale. Comme elle se rapproche de Metropolis, Superman décide de sacrifier sa vie pour sauver celle de ses amis et de sa chère Loïs.

La mort d’un héros dans les comics n’est en général qu’un léger contretemps, mais cet événement provoqua une réaction médiatique qui mobilisa la une de nombreux journaux américains et plus d’un flash d’info. Au-delà du simple plan marketing, la mort de Superman fut l’élément déclencheur d’une redynamisation de DC, comme la création de la Légion des Supermen, Cyborg Superman, la destruction de Coast City entraînant la dépression nerveuse d’Hal Jordan qui détruit le Corps des Green Lantern et devient Parallax, ou encore la création d’un nouveau Superboy, clone du projet Cadmus, combinant l’ADN de Superman et d’un humain (mais pas n’importe quel humain...)

(C) DC Comics/Urban Comics

Après une longue traversée du désert, la chaîne de télévision The WB lance, en octobre 2001, en partenariat avec DC, la série Smallville. Cumulant de bonnes audiences, DC confie à Mark Waid le projet de relancer encore une fois Superman en l’adaptant au public de la série. Ainsi naît Superman : Droit du Sang (Superman Birthright). Tout en respectant le canon établi par John Byrne, Mark Waid raconte dans un premier temps les aventures de Clark Kent, jeune journaliste couvrant un conflit ethnique en Afrique qui va, au fur et à mesure de l’intrigue, prendre conscience que ses pouvoirs conférés par sa morphologie kryptonienne doivent être utilisés pour aider les plus faibles. Servi par des dessins de Leinil Yu, cette mini-série n’a pas révolutionné le genre mais a eu le mérite de replacer Superman dans un contexte beaucoup plus moderne et de le rapprocher d’un lectorat résolument plus jeune.

Autant la justice sociale, thème présent depuis sa première aventure dans Action Comics, est toujours présente, autant le thème de la quête de soi, longtemps resté tabou chez DC, prend enfin le pas, sur les autres éléments de l’intrigue, laissant le lecteur s’identifier à Clark Kent. Cette remise à plat n’a toutefois pas fait long feu puisqu’elle a été remplacée dans la continuité quelques années plus tard par Superman Secret Origins.

(C) DC Comics/Urban Comics

Dernier épisode marquant disponible en réédition : Superman Pour Demain, de Brian Azzarello et Jim Lee (2008). Alors que Superman défait des terroristes hors du territoire américain, un million de personnes disparaissent à Metropolis et parmi elles, Loïs Lane. Commence alors une quête pour Superman de retrouver les disparus.

Avec Jim Lee au dessin, on aurait dû s’attendre à une sorte de Batman Silence appliqué à Superman : un gros patchwork de différents vilains avec un final épique... Et pourtant, l’intrigue servie par Brian Azzarello nous montre un Superman impuissant face à ce drame et en proie au doute. Véritablement à part dans les aventures de l’Homme d’acier, cet arc narratif a le mérite d’aborder la psyché de Superman sans pour autant délaisser l’action. Jim Lee quand à lui est capable de ces coups d’éclats dont il a seul le secret mais ne parvient pas à se surpasser comme il l’avait fait sur Batman Silence.

En Septembre 2011, DC lance New 52, un projet éditorial de cinquante deux nouveaux titres, cinquante deux remise à plat de différents héros, et Superman est évidemment de la partie. Séparé en deux titres, Action Comics et Superman, nous ne nous attarderons pas sur cette dernière relance dont nous vous parlons régulièrement depuis trois ans, en vous conseillant, si cela vous intéresse, de commencer par DC Saga Hors Série #1 (Urban Comics) lorsque Scott Lobdell et Kenneth Rocafort, l’étoile montante chez DC, ont repris la série.

(C) DC Comics/Kenneth Rocafort
(C) DC Comics/Urban Comics

La série Action Comics, quand à elle, reprend l’arrivée de Clark Kent à Metropolis et ses débuts en tant que Superman. Affublé d’un jean et d’un simple T-Shirt, il est l’ange de la justice sociale, chose qu’il ne faisait plus depuis un bon paquet de temps. Sous la plume de Grant Morrison, Clark ne cherche plus à utiliser ses pouvoirs mais plutôt à retrouver l’héritage des El. Ayant déjà Lex Luthor et le Général Lane à ses trousses, il retrouve un autre antagoniste, Brainiac. La série reste surprenante grâce au génie de Morisson et au trait constant de Rags Morales, qui nous dépeignent un jeune Superman un poil arrogant dans une ville gangrenée par la corruption.

Les titres hors-continuité

Parmi les séries qui peuvent être lues indépendamment de la continuité, commençons par Superman : Red Son de Mark Millar et Dave Johnson. Ce récit se passe dans un univers alternatif où le vaisseau de Kal-El ne s’est pas écrasé dans un champs du Kansas mais dans un kolkhoze en Ukraine. Face à ce champion du communisme en pleine Guerre Froide, les États-Unis cèdent à la paranoïa et le gouvernement embauche Lex Luthor pour contrer cette super-menace rouge.

(C) DC Comics

S’ensuit donc une intrigue à plusieurs étages. Outre le désir de Luthor de dominer Superman, le champion de Staline devra faire face à une guerre intestine au sein du parti unique, à la montée d’un groupe terroriste sous la houlette d’un Batman russe, et surtout au rapprochement entre la Russie et le royaume de Themyscira, la terre d’élection de Wonder Woman...

Mark Millar, que l’on connaît surtout pour le très moyen Kick-Ass, livre ici une aventure de Superman qui n’a rien à envier à ses prédécesseurs. Il est très courant de voir des auteurs céder à la facilité dans ce type d’univers alternatif, et pourtant l’Écossais s’en tire à merveille en réintroduisant bon nombre de personnages de l’univers DC dans des origines remaniées (mention spéciale pour les nouvelles origines d’Hal Jordan), le tout sur fond d’une guerre atomique imminente et d’une suprématie totale de Superman sur les pays communistes, le final de l’histoire, même s’il aurait dû être un peu plus travaillé, arrivant à surprendre le lecteur.

(C) DC Comics

Une autre aventure hors continuité qui mérite le détour, : Les Saisons de Superman (A Superman for all Seasons), de Jeff Loeb et Tim Sale, qui racont une nouvelle fois le passage de Clark Kent de Smallville à Metropolis au cours des saisons.

En quatre chapitres, Jeff Loeb nous prouve qu’il n’est pas forcément le yes-man de ses éditeurs en nous délivrant des scénarios suivant la trame habituelle. Son scénario dégage une poésie quasi enfantine, à l’image de certains livres d’éveil à la lecture, bien servi par le trait léger de Tim Sale qui nous arrache parfois une larme par sa simplicité et son lyrisme.

Les Saisons de Superman est un récit extrêmement apaisant, loin des sempiternels combats du Kryptonien face à ses ennemis ou de ses aventures à travers le temps et l’espace. Certes un peu mièvre, c’est un ouvrage qui, grâce au talent de ses artistes, nous touche droit au cœur et nous rend nostalgique d’une époque où tout était simple dans l’univers des super-héros.

(C) DC Comics/Urban Comics

Enfin, last but not least, dernier exemple de ces excepions à la Continuité : All–Star Superman de Grant Morrison et Frank Quitely.

En 2005, DC Comics lance le label All-Star, une collection d’aventures de ses héros iconiques animée par des artistes non moins iconiques. Ces histoires sont totalement hors continuité et, à l’inverse de la collection Ultimate chez Marvel, elles n’ouvrent pas sur un nouvel univers, restant des histoires complètes qui s’adressent autant aux néophytes qu’aux initiés.

All-Star Superman narre les derniers douze miracles accompli par un Superman mourant. En effet, Lex Luthor a réussi à empoisonner le Kryptonien en saturant ses cellules sanguines de radiations solaires, provoquant leur apoptose, leur mort cellulaire programmée. En douze chapitres, dans lesquels Morrison réussit à inclure, pour chacun d’eux, un élément iconique de l’univers de Superman on retrouve Lex Luthor, le scientifique fou des débuts, Doomsday, la Légion des Supermen (en référence à la Mort de Superman), Bizarro, le Tyran Solaire, Atlas et Samson.

La série est portée par les dessin de Frank Quitely qui campe un Superman serein, à l’exact opposé du Superman crispé que l’on voit d’ordinaire. Morrison et Quitely ont décidé que leur Superman ne pouvait être atteint par quoi que ce soit sur notre planète, et en on fait un personnage décontracté, sans pour autant être arrogant. Leur vision du personnage est symbolisée par la couverture du premier numéro montrant Kal-El assis sur un nuage, contemplant un lever de soleil sur Metropolis, semblant inviter le lecteur à le rejoindre.

Cet album est de loin la meilleure histoire de Superman de ce début du XXIe siècle, tant par sa dimension lyrique et épique que par une structure du récit permet de montrer au lecteur les différentes périodes au travers desquelles est passé Superman.

L’Homme d’acier reste un héros indémodable, tout comme Batman ou encore Spider-Man chez Marvel.

Concluons ce dossier par l’accroche d’un article célèbre de Lois Lane : « Le monde a encore besoin de Superman. »

Superman en "fâcheuse" posture face à Bee-Hive. L’avenir de Superman est entre de bonnes mains.
(C) DC Comics/ Kenneth Rocafort

(par Antoine Boudet)

Cet article reste la propriété de son auteur et ne peut être reproduit sans son autorisation.

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4 Messages :
  • La BD a encore besoin de Superman.
    4 juillet 2013 09:49, par FLOCON

    Superman est le symbole du crétinisme simpsonien dans toute sa beauté.
    Tous les dix ans les auteurs de cette série redéfinissent le personnage pour le rendre plus crétin encore.
    Enfin avez vous vu le superman actuel ?
    Il ne se rappelle même plus qu’il est marié à Lois et n’a jamais réussi a mettre son collant dans le bon sens ...
    enfin chacun ses gouts...

    Répondre à ce message

  • La BD a encore besoin de Superman.
    4 juillet 2013 17:31, par hectorvadair

    Bravo. Merci pour ce point bien utile. Entre autre pour les collègues bibliothécaires non spécialistes. je partage illico.

    Répondre à ce message

  • La BD a encore besoin de Superman.
    4 juillet 2013 21:15, par ange bleu

    Merci pour cette sympathique rétrospective de fameux récits sur Superman. Pour ma part celui qui m’a le plus marqué / fasciné est le All–Star Superman de Frank Quitely et Grant Morrison. Les dessins du premier offre un appui parfait à l’histoire développée par le second. Et puis cette idée de 12 travaux pour proposer 12 mini-histoires centrées chacune sur un des aspects du personnage et de sa mythologie est simple mais diablement efficace ! Franchement adoré mais après je ne sais pas si c’est un titre idéal pour néophyte car c’est une série au ton plus « pulp » que grand public à mon sens.

    Sinon dommage que ne soit pas évoqué Kingdom Come. Après je comprends car ce n’est pas une série sur Superman lui-même mais sur l’unviers DC. Cependant il y a tient le premier rôle et cette vision du personnage est absolument incroyable et culte ^_^

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    • Répondu par JC Lebourdais le 10 juillet 2013 à  13:07 :

      La meilleure histoire de Superman est l’annual 11 de 1985 "For the Man who has Everything" par Alan Moore et Dave Gibbons.
      Rien de bon sur le personnage après 1986, surtout pas All-star, médiocre resucée du silver age par Grant Morrison, laborieux scribouillard sauvé par les dessins de Frank Quitely.
      Waid ne mérite même pas une mention.

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