La Fantaisie des Dieux - Par Hippolyte & Patrick de Saint-Exupéry - Editions les Arènes

La fantaisie des Dieux

Patrick de Saint-Exupéry & Hippolyte (c) les Arènes

Printemps 1994. Alors que le génocide des Tutsis fait rage au Rwanda dans l’indifférence de la Communauté internationale, la France déclenche l’Opération turquoise, une opération militaire sous mandat de l’ONU qui a pour objectif de « mettre fin aux massacres partout où cela sera possible, éventuellement en utilisant la force ».

Ainsi, une zone "sécurisée" proche de la frontière avec le Zaïre (l’actuelle République Démocratique du Congo) fut définie afin permettre aux populations rwandaises de fuir le génocide et le conflit militaire qui opposait le Front Patriotique Rwandais (les forces rebelles essentiellement tutsies) et le gouvernement intérimaire en place au moment des faits, qui coordonnait le génocide.

Le journaliste Patrick de Saint-Exupéry accompagnait les militaires français durant cette opération. Il a pu se rendre compte de l’horreur de la tragédie que vécut ce petit pays d’Afrique centrale.

Près de 20 ans plus tard, Patrick de Saint-Exupéry retourne sur les lieux du drames avec le dessinateur Hippolyte afin de réaliser une BD-reportage sur le sujet.

La particularité de La Fantaisie des Dieux est qu’elle apporte le point de vue des militaires français au moment où le drame se joue. Longtemps critiqué pour son inaction ou pire, d’avoir collaboré avec les génocidaires, l’armée française apparaît complètement dépassée par les évènements qui se déroulent sous ses yeux. Elle est prise dans un étau. D’un côté, il y a la volonté d’aider les populations en danger mais de l’autre, il y a l’obligation d’obéir aux ordres de Paris...

Le rôle de l’armée française et, plus largement de la diplomatie française, continue de susciter la controverse vingt ans après les faits. La question fut d’ailleurs débattue au Sénat le 30 juin 2014, avec Bernard Kouchner, ancien ministre des Affaires étrangères sous Nicolas Sarkozy, cofondateur de Médecins sans frontières et de Médecins du monde, mais aussi l’ami de l’actuel président rwandais Paul Kagamé. C’est grâce à ce ministre que les deux pays avaient opéré un rapprochement qui avait abouti à la visite en février 2010 du président Sarkozy au Rwanda, visite au cours de laquelle il évoqua les "erreurs" de la France, sans préciser lesquelles. L’autre invité de ce débat était François Léotard, qui fut ministre de la Défense dans le gouvernement d’Édouard Balladur en 1993 et qui géra la présence des casques bleus français durant cette fameuse Opération turquoise.

Au cours de ce débat organisé par l’association RBF France, M. Léotard se montra favorable à la levée du secret-défense qui entoure le rôle de la France dans la Mission turquoise au Rwanda. C’est en tout cas ce qu’il déclara en substance lors d’une séquence diffusée sur la chaîne Public Sénat.

La clôture, au début de ce mois de juillet, de l’enquête sur l’attaque du 6 avril 1994 contre l’avion du président rwandais Juvénal Habyarimana, menée par les juges français Nathalie Poux et Marc Trévidic dans laquelle ils écartent la thèse du juge français Jean-Louis Bruguière qui incriminait dans cet attentat l’ex-groupe rebelle Front patriotique rwandais (FPR) du président Kagamé aujourd’hui au pouvoir à Kigali, aidera probablement les deux pays à renouer le dialogue et des relations durables.