Si nous avons pu avoir récemment quelques saillies contre certaines initiatives nées dans la ville charentaise [1], nous savons aussi reconnaître ses incontestables réussites [2]. La Maison des Auteurs en est une. Créée il y a cinq ans, elle a accueilli depuis près de soixante auteurs en résidence sur le modèle, toutes proportions gardées, de la Villa Médicis à Rome. Des auteurs venus de France, mais aussi du monde entier : Canada, Colombie, Corée du Sud, États-Unis, Japon, Russie… Un travail qui favorise bien davantage le rayonnement de la bande dessinée franco-belge dans le monde que bien des initiatives « internationales ».
Équipement créé en 2002 par le Syndicat Mixte du Pôle Image – Magelis voulu par le Conseil Général de la Charente en complément des institutions culturelles (Centre national de la bande dessinée et de l’image et notamment son Musée national de la bande dessinée) et scolaires (L’École Supérieure de l’Image ou l’École Nationale des Jeux et Médias Interactifs Numériques, pour n’en citer que deux) créées dans le sillage du Festival International de la Bande Dessinée, cet espace s’attache à être, selon Pili Munoz, sa directrice, « un lieu de travail, de vie, d’échanges entre les créateurs ». Dans ces murs, en effet, et parce qu’Angoulême est une toute petite ville où chacun se croise au bistrot ou au cinéma, des auteurs du monde entier ont cotoyé les créateurs locaux ou les jeunes pousses de passage dans les écoles de la ville. Des échanges sans autre enjeu que la création, même s’ils débouchent parfois sur des concrétisations industrielles comme ce film, Peur(s) du noir, produit par Prima Linea et auquel deux des résidents invités ont participé, Marie Caillou et Richard McGuire [3].
Une réussite de la création subventionnée
Avec un budget de l’ordre de 240.000 euros, cette Maison est une des réussites de la création subventionnée, comme le rappelle opportunément Jean-Luc Fromental [4] dans son article, Un miracle public, publié dans l’ouvrage édité par la MDA à l’occasion de son cinquième anniversaire, Cinq ans de résidences : « …il faut se réjouir d’habiter encore un monde où l’intervention publique permet aux frêles esquifs de se faufiler entre les armadas préparant sans fin on ne sait quel Trafalgar » (il parle là des gros éditeurs de bande dessinée qui se disputent les parts de marché à couteaux tirés).
Parmi les auteurs qui sont passés par cette institution de R&D de la bande dessinée, certains étaient des notoriétés comme le Canadien Jimmy Beaulieu, l’Américain Richard McGuire, les Français Algésiras, Nicolas de Crécy, Fabrice Neaud, ou encore le Russe Nikolaï Maslov.
Il n’y a pas que les dessinateurs qui sont concernés puisque le scénariste Thierry Smolderen a été un des premiers pensionnaires de la maison. Les expositions faites chaque année dans le « paquebot » (surnom donné à la Maison en raison de la forme du bâtiment) au moment du Festival d’Angoulême avaient pu en témoigner.
En cinq ans, la Maison des Auteurs a su constituer un terreau fertile qui a contribué à faire naître la BD d’aujourd’hui, comme celle de demain. Notons qu’elle s’unira prochainement au Centre national de la bande dessinée et de l’image au sein d’un nouvel l’Établissement public de coopération culturelle (EPCC) qui constituera la future Cité internationale de la bande dessinée et de l’image.
(par Didier Pasamonik (L’Agence BD))
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Le site de La Maison des Auteurs
[1] Lire notre article sur l’Université d’été 2006 et aussi le dossier Festival international d’Angoulême.
[2] Lire à ce sujet notre article, La vallée des images.
[3] Il devrait sortir en salle en février 2008.
[4] Éditeur de Denoël Graphic qui a publié Nikolaï Maslov, un auteur russe résident à la Maison des Auteurs. NDLR.