C’est l’histoire d’un couple qui se noie.
Au début, le lecteur ne comprend pas, car les deux protagonistes, dont on ne saura jamais grand chose, ont l’air sereins et épanouis. Lui travaille comme maître-nageur, elle est sage-femme. Deux métiers liés à l’eau, mais de façon différente. Maya passe toute la journée à aider les naissances. Mais lui ne veut pas devenir père. Cette envie d’enfant non-partagée amène dès le début une zone de tension, mais à peine perceptible... Sans oublier le quotidien qui creuse ses sillons, et ces décalages d’emplois du temps qui raréfient les moments de partage.
Et au milieu de cette relation, l’eau fait son apparition, élément fantastique perturbant la trame intimiste. Il pleut, de plus de plus, sans discontinuer. La ville entière menace de disparaître. On peut à peine sortir de chez soi.
Jusqu’au bout du récit, la progression de l’eau ira de pair avec l’effritement des sentiments entre les amants. Pour finir par se révèler bienfaitrice...
Outre un ton très particulier, fait de sensibilité vaporeuse et d’une certaine froideur, ce roman graphique est marquant par son dessin, de larges aquarelles qui figent les scènes et montrent parfaitement le poids croissant de l’élément aquatique dans l’histoire.
Les dialogues s’avèrent d’une grande sobriété, les silences s’épanouissent dans des cases à deux ou trois couleurs au maximum.
Avec La Pluie, Casterman ose un album très contemporain, presque avant-gardiste, à l’image des éditeurs précédents d’Eric Lambé, le dessinateur.
La rencontre du fantastique et de l’intimisme se fait dans une harmonie d’une grande maîtrise. Une oeuvre très littéraire, qui doit être recommandée aux amateurs de lecture tout court.
(par David TAUGIS)
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