On connaît le processus créatif de Bilal ces dernières années : Chaque case est conçue séparément, constituant une valeur iconique indépendante du récit, tout en l’incarnant. Une sorte de « en même temps » créatif.
L’avantage, c’est que cela permet en les réarrangeant, de raconter une autre histoire comme dans cette expo qui réunit des cases de son nouvel opus, le tome 3 de Bug, et de ses anciens albums comme Le Sommeil du monstre.
« Je suis un animal d’exception », « Je suis un champion », « Je suis un cyborg », « Je suis un mutant », « Je suis immortel », et « On va tous y passer ! » sont autant de chapitres de cette nouvelle transe prophétique.
On pense, en regardant ses dessins, à la crise du Covid, à la situation en Ukraine, deux événements-symptômes de la folie humaine qui inquiètent et troublent nos esprits jusqu’ici trop tranquilles.
Ce qui frappe, c’est à la fois la constance et le renouvellement permanent de sa pratique picturale : ici un pontife oriental à la peau bleue semble s’assoupir sous les fourrures ; là une femme-cyborg semble sur le pied de guerre tandis qu’une autre arbore des signes qui annoncent le retour du soviétisme. Comment ne pas penser à l’actualité ?
Sa palette est à la foi précise et évanescente, concentrée sur les visages, sur l’humain en fait. Parfois, la pâte s’autorise des envolées abstraites. On réalise alors que le dessin de Bilal n’est pas seulement un propos, c’est aussi une expérience artistique où l’émotion a toute sa place.
(par Didier Pasamonik (L’Agence BD))
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EXPOSITION « ENKI BILAL »,
du 16 mars au 13 juin 2022, au Foyer Germaine Tillion du Musée de l’Homme dans le cadre de l’Exposition « aux frontières de l’humain », au Musée de l’Homme du 13 octobre 2021 au 30 mai 2022
Bug, livre 3, d’Enki Bilal, Casterman, sortie le 16 mars 2022
Enki Bilal, aux frontières de l’humain, Catalogue d’exposition, disponible au Musée de l’Homme et sur le site de la Galerie Barbier.
Photos : D. Pasamonik (L’Agence BD)
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