Le projet BD 2020, une initiative du Ministère de la Culture, se résume par une "Annus Horribilis" et le prolongement de six mois n’y changera pas grand chose. Logiquement, les parrains et marraines de l’événement ont rendu leurs tabliers dès l’annonce par le gouvernement de la fermeture des librairies. Dans foulée, cafouillages et coquecigrues, alors que le Président Macron nous invitait encore, lors du premier confinement, à "profiter de cette période pour se cultiver".
À la suite du Syndicat National de l’Édition et de personnalités comme Joann Sfar (président d’honneur de la Ligue des Auteurs Professionnels) ou Riad Sattouf, c’est au tour du délégué général du FIBD, Franck Bondoux de monter au créneau : "En contraignant les libraires à la fermeture, c’est tout l’écosystème qui unit ses acteurs qui se délite, entraînant un basculement général vers l’incertitude martèle-t-il. L’incertitude sur la capacité que celui-ci aura de se maintenir. De conserver sa capacité à porter la création dans toute sa diversité. Une situation qui aujourd’hui fait de la France le seul pays au monde où le lecteur accède à toutes les formes de bande dessinée, quelle que soit leur origine.".
Si on a beaucoup parlé des préoccupations des libraires, éditeurs et auteurs (dont le statut étaient déjà précaire avant la crise) tous interdépendants les uns des autres, les festivals, comme toute l’activité de l’événementiel, souffrent particulièrement de la crise sanitaire. Ils tiennent pourtant une place fondamentale dans le lien entre les acteurs du livre et les lecteurs. Les salons, festivals et fêtes de la BD, il y en a quelque 300 en France, de Paris à Toulouse, d’Angoulême à Blois, à Aix, Colomiers ou Amiens.
L’urgence sanitaire a imposé logiquement de suspendre ces événements qui rassemblaient des milliers de personnes et multipliaient les risques. mais Franck Bondoux rappelle tout ce qu’ils apportent au niveau local, comment le FIBD par exemple « permet à une ville de 45 000 habitants de rayonner dans le monde entier et d’être la première en France à intégrer le Réseau des Villes créatives de l’Unesco au titre de la littérature (eh oui, la bande dessinée est bien une forme de littérature !). On pourrait ajouter encore qu’il contribue, depuis son origine, à la reconnaissance de la bande dessinée en tant que forme d’expression artistique. »
Avec quelque 6 000 publications par an et un catalogue qui privilégie la diversité des auteurs, qu’ils soient français et étrangers, l’édition française de bande dessinée a le pouvoir de satisfaire un lectorat qui fait de la France le premier marché européen dans le domaine du 9e art.
Le lien social entre les éditeurs, les auteurs et leur lectorat est garanti par les libraires d’une part, mais aussi par ces festivals. Il n’est pas question ici (seulement) de tendre la sébile mais de demander aux pouvoirs publics de faciliter des solutions qui permettent à ces manifestations de continuer d’exister et de servir de caisse de résonance à la création. Ces professionnels de l’événementiel ont des idées, il faut les entendre et les accompagner de façon proactive sans rigidité excessive. C’est ce que l’on attend d’un gouvernement.
L’édition 2021 du FIBD espère pouvoir mettre en place un diptyque. Elle attend du talent aussi de la part des politiques.
(par Klara LESSARD)
(par Didier Pasamonik (L’Agence BD))
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