Festival s’adressant "à tous les publics", la programmation de BD-FIL louvoie entre les classiques -cette année le Suisse Derib, l’auteur de Yakari et de Buddy Longway et l’incontournable Tintin- et les "démarches plus exigeantes", entendez par là les productions des labels alternatifs, de France, de Navarre, de Suisse et d’ailleurs.
Le choix de faire un jour une rétrospective Derib était inévitable. Avec ses compatriotes Cosey et plus récemment Zep, il fait partie de ces auteurs suisses qui ont accompagné et même favorisé le développement de la BD franco-Belge. Son Yakari, le petit indien qui parle aux animaux qu’il a co-créé avec Job, est connu de tous, notamment grâce aux dessins animés qui en ont été tirés.
Mais les lecteurs du Journal Tintin, lequel, on le sait, célèbre son 70e anniversaire en septembre de cette année, se souviennent de Buddy Longway, ce trappeur qui fut le premier à héros à vieillir et à fonder une famille dans le journal des 7 à 77 ans. Une petite révolution... L’univers de Derib est à l’image du dessinateur : généreux, amoureux des paysages de montagne et des chevaux, avec des récits qui, le plus souvent, expriment empathie et humanité.
On est évidemment moins surpris par l’exposition Tintin qui nous vient tout droit de Louvain-la-Neuve et du Musée Hergé. On notera simplement qu’il est accueilli par le MUDAC, le Musée d’Art contemporain de Lausanne, ce qui n’est pas une mince consécration.
Mais Dominique Radrizzani, le patron du Festival, ne s’arrête bien entendu pas à ces deux "highlights" d’automne. Il a remarqué, comme tout le monde, que l’un des ouvrages les plus marquants de 2016, dont nous parlerons dans quelques jours, était La Légèreté de Catherine Meurisse (Ed. Dargaud) qui raconte comment cette auteure majeure, pilier de Charlie Hebdo, a su se reconstruire après ce drame affreux. Elle sera présente et ses dessins exposés à Lausanne. L’occasion pour retrouver le trait de ce talent que nous avons toujours soutenu et apprécié et qui répond à la barbarie par la beauté.
L’autre "clou" du festival est cette exposition "Flower Power" qui, s’appuyant sur la riche collection du Centre de la BD de Lausanne, réunit la plupart des publications qui, dans les années soixante, ont été le creuset d’une bande dessinée "adulte", que l’on nommait alors l’"Underground". En point d’orgue pendant le festival, une rencontre entre les dessinateurs Willem et Gilbert Shelton viendra explorer cette période très libre qui avait le courage de sa provocation.
On ne saurait détailler tous les événements de cette importante manifestation suisse. Vous pouvez lire avec profit le programme figurant sur leur site Internet, mais on remarque quand même un hommage fait au fanzine zurichois Strapazin, qualifié abusivement de "plus vieux fanzine de BD du monde" (c’est évidemment le mensuel hollandais créé en 1968 Stripschrift qui l’est) mais qui constitue cependant le creuset de toutes les avant-gardes de la bande dessinée germanophone depuis sa création en 1984.
Signalons par ailleurs une obsession bien suisse pour la fondue qui, prenant comme modèle Les Cauchemars d’un amateur de fondue au Chester de Winsor McCay (1904), donne l’occasion à 38 artistes parmi lesquels Zeina Abirached, David B., Blutch, Eddie Campbel, Anke Feuchtenberger, Herr Seele, Patrice Killoffer, Nikita Mandryka, Dave McKean, Jean-Christophe Menu, Tony Millionaire, Frederik Peeters ou Ruppert & Mulot, excusez du peu, de tremper son pain dans le fromage sans devoir traverser à la nage le Lac Leman.
Une fois encore, Lausanne surprend agréablement par une programmation éclectique et de qualité.
(par Didier Pasamonik (L’Agence BD))
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BD-FIL 12e édition ∕ 15-19 septembre 2016
Au cœur de Lausanne, sur la place de la Riponne (transports publics et parking), à l’espace Romandie et au Mudac, au Forum de l’Hôtel de Ville, à Bibliomedia Suisse, à la Maison du Dessin de Presse de Morges, au Rolex Learning Center, ainsi que dans les institutions, cafés et galeries du programme OFF.
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