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Le Maître rouge - T1&2 - Artibani & Milazzo - Les Humanoïdes Associés

Par François Peneaud le 28 novembre 2006                      Lien  
Plongée dans les eaux troubles du Tibre au XVIIIème siècle, pour cette première histoire en deux parties mettant en scène un bourreau assoiffé, si ce n'est de justice, du moins de vérité.

Ce nouveau venu dans la collection de polars historiques des Humanos offre une ambiguïté morale intéressante : tout d’abord, Giovanni Battista Mori, le personnage principal, est le bourreau de Rome, et n’a aucun problème avec sa fonction. On voit déjà que le scénariste ne plaque pas une éthique moderne sur une époque révolue. Ensuite, l’ambiance générale de l’intrigue est d’une noirceur assumée, et les lecteurs espérant une jolie et légère fin en seront pour leurs frais - les autres apprécieront à sa juste valeur la tragédie qui se déroule sous leurs yeux. Avis aux amateurs.

Rome, à la fin du XVIIIème. Le bourreau fait son office, tranchant la tête des condamnés en place publique, sous l’œil du peuple enchanté. Mais son esprit est occupé par le récent enlèvement de la fille d’un capitaine, la demande de rançon laissant penser que les coupables sont une bande de brigands/rebelles recherchés par les autorités. Quand le capitaine est assassiné sans motif apparent, Battista se lance dans une enquête qui va faire découvrir au lecteur les complexités des positions politiques et sociales de ces gens vivant dans une époque conservatrice et violente : Battista a des liens avec le chef des rebelles, le chef de la police lui demande de ne pas se mêler de cette affaire, et les manipulations des uns et des autres ne peuvent qu’amener de nouveaux drames.

Le Maître rouge - T1&2 - Artibani & Milazzo - Les Humanoïdes Associés

Si le scénariste Francesco Artibani (co-créateur, entre autres, de la série W.I.T.C.H. pour Disney et de Monster Allergy chez Soleil) propose un scénario bétonné qui laisse une place certaine aux zones d’ombre des personnages (Battista a par exemple d’étranges visions sanglantes qui ne sont jamais expliquées), le dessinateur Ivo Milazzo offre un travail tout aussi solide, mais qui ne sera probablement pas du goût de tout le monde. Si son style le place dans le camp des réalistes, son trait jeté et ses personnages parfois comme esquissés l’emmènent loin de ce qui se fait le plus souvent dans la BD historique francophone. Le choix de donner au bourreau les traits d’un Depardieu jeune ne nous semble pas d’un intérêt fabuleux, mais il est indéniable que Milazzo maîtrise parfaitement le jeu d’ombres et de lumières omniprésent dans l’album. On pourrait trouver dommage de ne pas publier ce dessin en noir & blanc, même si la mise en couleur d’Isabelle Merlet est très réussie, soulignant sans les recouvrir les atmosphères créées par le dessinateur.

Le choix d’un bourreau comme « héros » d’une série n’était pas évident, et pourrait même empêcher certains lecteurs de trouver crédible ses positions morales. Mais le talent des auteurs rend ce Maître rouge, comme il est surnommé à cause de la couleur de la cape de sa profession, à la fois attachant et très humain. Y compris (surtout ?) dans son ambivalence face à la mort et à la punition.

(par François Peneaud)

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