Le Mal T2 : Nyctalope - Py & Houot - Glénat

Le Mal ne meurt jamais, il sommeille… et son réveil terrifie la France. La médecine demeurant impuissante, Pont-St-Esprit redevient le lieu de pèlerinage qu’il était au Moyen-âge, seul espoir pour envisager une rémission du Mal. Point focal par excellence, le petit village attire une secte et des papys-scouts qui tentent de garder un semblant d’ordre. Tenaillé par la curiosité après la découverte d’une tanière d’alchimiste sous sa maison, Sonora tente de dénicher les origines du Mal : y aurait-il une explication botanique, occulte, ou plus simplement sourdrait-il une malveillance humaine ?

Après un premier tome plantant solidement le décor, on s’attendait à une montée en puissance de l’intrigue et à de multiples rebondissements : il n’en est (presque) rien … Et c’est tant mieux ! En effet, à l’inverse d’intrigues usant les rigoles comme les tracteurs en fin d’automne, le Mal se distingue par des surprises bienvenues : un rythme narratif lent malgré une succession rapide des mois, l’arrivée impromptue des nazis pour donner du piquant, des passages oniriques dont on ne sait s’ils comportent ou non des clés de compréhension, et un charme désuet qui donne à l’ensemble une authenticité délicieuse.

La présentation unique du village et ses environs donne toute la saveur du microcosme avec ses ragots, ses rancoeurs, et ses secrets, mais petit revers de la médaille, on peine à entrevoir la progression du Mal à travers la France. « Qu’importe les autres, pourvu qu’on me foute la paix ! » Cette pensée rurale prend donc toute sa valeur, et c’est derrière les agissements des citadins et les restrictions des matières premières qu’on déterminera l’étendue du Mal. Pour preuve, des scouts, tels des templiers des temps modernes, deviennent de féroces mercenaires que le crime de sang-froid ne rebutent pas : image forte de la déstabilisation du pouvoir, même si les férus de Baden-Powell s’attristeront de cette pénible façon de fêter leur centenaire.

Entre les contes ruraux de Servais et les ambiances à plusieurs échelons de Ballade au Bout du Monde, Py distille habilement son histoire. Ces initiales mystérieuses qui cacheraient un auteur reconnu (Pierre-Yves … ?) livreront peut-être leur secret en même temps que la conclusion attendue de cette trilogie remarquable.

Avec des personnages moins soignés, et certains décors plus sommaires, on sent le dessinateur moins inspiré (ou plus pressé) que pour le premier tome. Houot continue néanmoins à démontrer tout son talent dans le portrait de ses protagonistes, dans les architectures et l’ambiance de ses flash-backs. Une mention spéciale à la couverture de ce tome qui intègre la première en gigogne. Que nous réservera le prochain tome ? Et si la solution était là, sous nos yeux, depuis le début...