Pourquoi "Revoir Paris", alors que Schuiten & Peeters nous proposent un Paris futuriste, une utopie architecturale majeure sur laquelle plane une nouvelle héroïne : Kârinh ?
"C’est un titre qui a deux sens, nous dit François Schuiten : celui de revenir à Paris et celui de le réinventer. La chanson de Charles Trenet est très belle lorsqu’il évoque sa volonté de retraverser Paris, d’y revenir. Mais on peut aussi revoir la ville, la réviser. Lorsque ce titre s’est imposé, l’idée de l’exposition était toute trouvée. Nous sommes venus voir la Cité de l’architecture en leur suggérant de montrer les utopies de Paris, tous ces rêves d’architectes dont je me suis nourri. La société des amis d’Alfred Robida, l’auteur d’une utopie célèbre du XXe Siècle, étaient présents hier, ils sont ravis que l’on réhabilite ce dessinateur oublié. J’étais tout content de leur dire combien je l’admire."
L’idée de l’exposition est de montrer toutes les sources des auteurs et de faire l’alignement de ces rêves urbains, de ces inventions, de ces projections improbables comme ce projet d’immeuble en forme d’œuf proposé par l’architecte André Bruyère (1912-1998) et qui aurait bien pu être choisi en lieu et place de la "raffinerie" de Renzo Piano à Beaubourg.
Quel est le point commun entre toutes ces utopies ? "Ce sont des architectes qui n’ont pas peur, nous dit François Schuiten. Aujourd’hui, on a peur. Tout est si difficile. Paris tétanise véritablement les architectes et en tout cas les politiques. On a l’impression que plus rien n’est possible. On le voit encore dans le débat sur le projet de la Tour Triangle. Ce qui est intéressant ici, en dépit du fait qu’heureusement, certains projets n’ont pas été réalisés, comme le Plan Voisin conçu par Le Corbusier et bien d’autres choses, il y a une forme de légèreté, d’ambition, qui fait plaisir à voir. C’est un moment terrible, car actuellement, nous perdons cela."
Il est vrai qu’avec la crise économique, les lourdes préoccupations écologiques, l’heure n’est plus à la fantaisie. C’est pourquoi on a si peu construit en France depuis les années 1940. Cela pèse sur l’économie du pays. "Alors que la science n’a jamais autant permis d’audaces qu’aujourd’hui. C’est comme si nous étions concentrés sur notre histoire. Mais trop d’histoire peut devenir un problème. J’ai toujours défendu l’idée qu’il fallait avoir de la mémoire, mais curieusement, trop de mémoire tétanise. Pourtant, Paris s’est aussi construite avec ces projets non-réalisés."
Le clou de l’exposition est une réalisation numérique développée par Dassault Systèmes sur une idée de Schuiten et Peeters. Face à vous, vous avez un immense écran avec une vue sur Paris. Vous pouvez choisir de la voir dans le passé ou dans le futur. Sous la main, un écran tactile. Avec le doigt, vous pouvez circuler dans une image 3D, y voyager à 360°, zoomer à loisir, regarder les détails de Notre Dame ou le toit des immeubles de l’île de la Cité. Ce spectacle, car c’en est un, est symbolique de ce qu’est cette exposition : un voyage extraordinaire.
(par Didier Pasamonik (L’Agence BD))
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L’exposition "Revoir Paris" jusqu’au lundi 9 mars 2015
Cité de l’architecture et du patrimoine. Galerie basse des expositions temporaires - 1, Place du Trocadéro et du 11 novembre, Paris 16e. M°Trocadéro.
Entrée au tarif A : PT 5 € - TR 3 €
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