Fernand Tormes a fui Paris et rejoint les Brigades Internationales qui ont engagé la lutte contre les franquistes en Espagne. La frivolité de sa vie parisienne disparaît peu à peu, confrontée à une lutte de chaque instant et sans merci face à un agresseur dénué de pitié. Mais aux côtés d’hommes et de femmes venus de tous les coins du monde défendre leurs idéaux les armes à la main, le jeune héros expérimente la vie et prolonge ses convictions. Brancardier versé dans l’infanterie, il prend place en première ligne pour défendre son engagement.
Un album plein d’insouciance et de vivacité qui rend un magnifique hommage à une jeunesse massacrée sur l’autel du lâche non-interventionnisme des démocraties occidentales, précédent plus que fâcheux aux accords de Munich.
Dans une atmosphère pesante et prenante, salut à la vision littéraire de Frédéric Mistral, le dessin placé entre envie et malaise, et la couleur, éclatante, navigant dans l’ocre, le rose et les bleus ciel et mer, dérivent vers une violence de plus en plus dense. La distorsion des images, les nuances parfois plus rudes se rapprochent d’une atmosphère de western vue dans Gus de Christophe Blain ou dans Big Foot de Nicolas Dumontheuil. Des tonalités avantageusement exploitées pour tirer le sel de cette véritable épopée humaine.
Le combat devient le prisme à travers lequel Fernand va perdre sa naïveté mais gagner sa liberté. La vibration du trait déploie une énergie puissante entre attachement et passion. Ce graphisme évocateur et nerveux décrit la guerre sans emphase, au quotidien tel le journal d’un nouveau Durruti.
Cette plongée dans le cœur du conflit et de sa rage aveugle, wagon perdu vers les limites de la civilisation, ne fait pas oublier à Fernand le plus important : c’est un anarchiste et un anarchiste amoureux. L’auteur donne aux formes des belles espagnoles de quoi capter tous les regards de son héros. Point d’idéologie, ni de carcan, juste l’envie de se battre et de défendre la juste cause du peuple, de la liberté. Une guerre sans haine ni vice, l’amour au cœur.
(par Vincent GAUTHIER)
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