À quel moment est-on un auteur pour l’administration ? Vous débutez dans la BD vous n’en avez pas encore fait un métier, mais déjà une source de revenus. Pour beaucoup d’auteurs, la BD est complémentaire à une autre activité, salariée ou non, artistique ou non, qu’il s’agisse d’enseignement, d’illustration, de droits liés à l’audiovisuel ou à la publicité. Par ailleurs, toute activité rémunérée fait l’objet de cotisations sociales obligatoires. Mais sous quel statut ? Faut-il se déclarer aux Agessa ou à la Maison des artistes ? La récente session de l’Université d’été à Angoulême nous a permis de faire un point.
Il faut s’en faire une raison : l’activité de création a parfois une dimension peu créative, en particulier quand il faut s’y retrouver dans l’écheveau des réglementations liées au régime de l’artiste auteur. De quel régime parle-t-on ? De celui lié à la sécurité sociale, en gros la protection de la santé et la retraite. Or, la pluriactivité des artiste auteurs a complexifié la déclaration des différents revenus provenant de son activité parfois régie par plusieurs régimes de sécurité sociale (salarié, journaliste pigiste, auteur indépendant percevant des droits ou encore artiste lorsque l’on procède à la vente de dessins originaux).
Est considéré comme auteur celui qui, « à titre principal ou accessoire » perçoit des revenus constitués par des droits d’auteur, des ventes d’œuvres d’art, des bourses de recherche ou des sommes relatives à un concours perçues dans le cadre d’une création, des co-créations, des expositions, des locations d’œuvres, des manifestations telles qu’une lecture publique ou une animation dans une école sous la forme d’une présentation orale de l’œuvre. [1]
Certains auteurs travaillent pour un journal et sont salariés par ce journal. Dans ce cas, ils relèvent de ce que l’on appelle le régime général qui s’applique aux salariés. La qualification du salariat repose essentiellement sur la subordination du créateur au commanditaire : plus celui-ci est directif, plus on tend vers le salariat. Attention aux employeurs qui tenteraient de surfer sur la législation : l’administration peut requalifier un droit d’auteur en salaire si le lien de subordination est par trop évident.
Le régime des auteurs en France.
Toute diffusion ou exploitation commerciale d’une œuvre originale de l’esprit (que ce soit au travers d’une galerie d’art, de publications, de films donne lieu au versement d’une rémunération (les droits d’auteur) ; son acquisition (planche ou dessin) donne également lieu à une rémunération sur laquelle doit être prélevé, si l’auteur exerce une activité non salariée de façon indépendante et s’il réside fiscalement en France, des cotisations et des contributions obligatoires, à savoir les assurances maladie et vieillesse, maternité, invalidité ou décès, la CSG et la CRDS. Ce régime est rattaché au régime général des salariés.
Dès lors qu’un auteur a perçu au cours d’une année civile des revenus supérieurs au seuil d’affiliation [2], il est tenu de s’inscrire à un organisme collecteur, Agessa ou Maison des Artistes.
Mais comment le choisir ?
L’Association pour la Gestion de la Sécurité Sociale des Auteurs (Agessa) concerne les activités de création littéraire, dramatique, musicale, audiovisuelle et photographique.
En 2008, l’Agessa regroupait 11018 auteurs dont 1388 illustrateurs et 2038 écrivains. À titre d’exemple (nous n’avons pas de chiffres spécifiques à la BD), le revenu moyen des écrivains est de 35.945 euros par an mais la moitié des écrivains déclarent moins de 16.333 euros. Les illustrateurs ont été les mieux payés en 2007, mais de plus en plus d’auteurs, particulièrement dans les médias interactifs, obtiennent des dérogations pour pouvoir conserver leur statut en-dessous du seuil d’affiliation.
Par ailleurs, 10% des artistes auteurs les mieux rémunérés concentrent plus de la moitié des revenus de droits d’auteurs du pays [3].
La Maison des Artistes concerne les œuvres d’art graphiques et plastique.
En 2009, 23.399 artistes auteurs étaient affiliés à la MDA dont 9417 graphistes et 1968 illustrateurs dont le revenu moyen en 2009 est de 27.000 euros. « En 2009, la moitié des artistes déclare avoir perçu l’année précédente moins de 13.700 euros annuels de bénéfice non commerciaux (BNC). À titre de comparaison, la moitié des salariés travaillant à plein temps dans le privé et le semi-public ont perçu en 2008 un salaire annuel net inférieur à 18.400 euros, soit 34% de plus » dit une note du Ministère de la Culture. [4]
L’inscription à l’un ou l’autre de ces régimes peut prendre quelques semaines car les dossiers passent devant une commission. « L’intention de l’artiste, son circuit de reconnaissance et de diffusion, son mode de rémunération sont des éléments susceptibles d’être pris en considération par la profession professionnelle compétente » précise la circulaire de la Sécurité Sociale (voir infra).
En ce qui concerne la question de la vente des dessins originaux, ces revenus sont considérés, depuis le 16 février 2011 [5] comme des droits d’auteur dans la mesure où ces originaux sont un prolongement d’une œuvre créée aux fins d’une publication qui génère elle-même des droits d’auteur. Le régime applicable est donc celui des artistes auteurs.
(par Didier Pasamonik (L’Agence BD))
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En médaillon : Caran d’Ache par lui-même. DR.
[1] En sont exclus cependant : les débats, les conférences, les ateliers, les cours et autres formes d’enseignement. Dans le cas d’une résidence, l’activité doit porter sur la création pour un minimum de 70% du temps consacré par l’artiste.
[2] Le "seuil d’affiliation" correspond à 900 fois la Valeur Horaire Moyenne du SMIC de l’année de référence, soit 7 974 € en 2010.
[3] Source Agessa / DEPS / 2011. Culture Chiffres, 2011-3, avril 2011. Téléchargeable sur le site du ministère.
[4] Culture Chiffres, 2011-4, avril 2011. Téléchargeable sur le site du ministère.
[5] Cf. Direction de la sécurité sociale. Circulaire N°DSS/5B§211/63 relative aux revenus d’activités artistiques relevant de l’article L 382-3 du code de la Sécurité sociale et au rattachement de revenus provenant d’activités accessoires aux revenus de ces activités artistiques.
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