Dès le début de cet album, à savoir son introduction, le ton est donné : "Que peut-on dire de la terre défroissée" demande l’auteur. A quoi bon donner sa réponse, elle est sans importance. Tout le style de Goodbrey est là, dans ce jeu avec les mots, les situations, les postulats absurdes.
Dans ces conditions, le lecteur choisira vite son camp : soit on peine à arriver au bout, en pestant contre une forme de suffisance et de désir laborieux de surprendre, soit on tombe sous le charme, ravi de se prendre au jeu et de jongler comme Daniel Goodbrey avec son inspiration zigzagante.
Son graphisme, quoique peu commun, montre un souci évident de cohérence, à grands coups de noir massif et de collages très arty. Les fonds, constituant des paysages urbains sommaires, restent invariablement gris, et l’auteur colle en premier plan des personnages assez figés, dont les expressions évoluent à peine.
A certains égards, son travail -sur le plan de la forme- rappelle Putain c’est la guerre de David Rees. Mais pour ce dernier, le détournement d’images fixes à vocation publicitaire donnait un résultat détonnant, chargé de sens et d’engagement politique. Au contraire de Goodbrey, qui laisse le lecteur, après ces 110 pages d’histoires courtes, sans l’impression d’avoir retenu une traitre image.
Oups, je crois que vous avez deviné dans quelle catégorie de lecteurs je me place cette fois-ci.
(par David TAUGIS)
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