Il y a plus de vingt ans, le magazine Bédé X a été la référence pour la bande dessinée pornographique en France. De nombreux débutants y firent leurs premiers pas comme Mancini tandis que les auteurs reconnus (Von Götha, Leone Frollo, Jacobsen, etc.) continuaient de faire vibrer les lecteurs avec leurs héroïnes dénudées.
C’est au sein de ce magazine que les amateurs ont découvert Hilda, dessinée par un illustre inconnu : Kovacq. Si les premières pages laissaient craindre une resucée d’un sujet presque éculé (les tortures moyenâgeuses dérivant en pratique lubrique), la suite du récit vint rapidement contredire ces préjugés !
En effet, on comprend après quelques pages que le récit ne se déroule pas (uniquement) au début du XIIIe siècle, car Hilda est surtout une jeune femme d’aujourd’hui, belle et décomplexée. Mais lorsqu’elle dort, elle rêve chaque nuit qu’elle est la princesse Hildegarde, héritière d’un royaume médiéval, malmenée par les hommes de main d’une belle-mère acariâtre.
Enchaînée dans les geôles, elle est le jouet de tortures impitoyables orchestrées par un démon pervers… D’abord troublée par ces cauchemars, Hilda suit les conseils de sa sœur et va consulter. Mais ses séances d’hypnose prennent rapidement un étrange cours : ses démons traverseraient-ils la frontière du rêve pour la rejoindre à notre époque ?
La première bonne surprise provient donc du récit, qui évite une avalanche de clichés pour prendre parfois des chemins de traverse et réaliser des liens entre histoire et psychanalyse, avec une pointe de thriller et de fantastique. La seconde réside dans le dessin : sans égaler Mancini dans la composition de ses planches et dans son expertise des gris, Hanz Kovacq propose un graphisme aussi maîtrisé que réussi, offrant des mises en page qui assurent un bon rythme de lecture, tout en restant lisibles et aérées.
Cette maîtrise est la conséquence d’un long travail. En effet, derrière le pseudonyme de Hanz Kovacq se cache le dessinateur Bernard Dufossé, né en 1936, actif dans la bande dessinée et les livres illustrés (souvent catholiques) depuis les années 1960 : Le Club des Cinq pour le Journal de Mickey, Baden-Powell, Les Mouflons pour les magazines des Scouts de France et bien d’autres, sans oublier Tärhn, Prince des étoiles dans les années 1980 ainsi que la série des Sanguinaires réalisée avec Patrick Cothias pour Vécu.
Après avoir été publiée pour la première fois en 2000 dans un format plus petit, suivie de quelques rééditions, l’héroïne réincarnée Hilda connaît une nouvelle vie sous la bannière des éditions Dynamite, et cette belle édition en noir et blanc qui permet de profiter au mieux du graphisme de cet auteur à double face.
Gageons que l’éditeur prolongera ce premier opus avec les trois autres albums de la série... Et sans doute également les deux tomes de Diane de Grand Lieu, l’autre remarquable série érotique de Kovacq. En attendant, les amateurs de récits « hard » ne manqueront de succomber aux turpitudes de la vie d’Hilda !
(par Charles-Louis Detournay)
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Bande dessinée pour adultes avertis
Hilda, tome 1, par Hanz Kovacq (Dynamite).