Ayant publié très jeune, Henry Mayo Bateman (1887-1970) a été le chroniqueur pointu et sagace de l’Angleterre de la première moitié du 20e siècle.
Ses notations de la vie quotidienne s’intéressent autant au golf ou à la pêche à la ligne qu’aux heures tragiques de la Première Guerre mondiale, dans un Understatement, une retenue, et un côté "pince-sans-rire" So British...
Son dessin descend en droite ligne d’une tradition initiée par Wilhelm Busch, Caran d’Ache et Steinlein : des pages le plus souvent sans case aux personnages en pied parfaitement lisibles dans un décor évidé : nous sommes dans l’ascèse du théâtre. Comme ce théâtre est muet et renvoie aux premières heures du cinéma, son éditeur à L’An 2, Thierry Groensteen, a eu raison de titrer ces histoires du mot un peu savant de "Mimodrames".
Ce qui frappe chez Bateman, c’est l’énergie furieuse de sa narration, la grande diversité de ses thèmes et de ses attitudes, en même temps qu’une invention graphique de chaque instant.
Le discours, quant à lui, ne dénote pas avec les opinions conservatrices de son temps : nous sommes dans l’auto-dérision bourgeoise qui se moque de l’armée sans la dénigrer, comprend comme un fait acquis les fastes et les privilèges de l’empire, et se complaît dans les atmosphères feutrées des clubs de fumeurs de pipe à casquette et tweed.
Les histoires de Bateman sont peut-être sans paroles, mais pas sans opinion.
(par Didier Pasamonik (L’Agence BD))
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