Abel Weiss, un riche broker de Chicago, vient de perdre sa fille. Alors qu’il fait le vide autour de lui, il est victime d’un grave accident et tombe dans le coma. Sept ans plus tard, il se réveille à des kilomètres du lieu de l’évènement, le corps constellé d’étranges croix lumineuses.
Officiellement mort, toutes traces de lui ont été soigneusement effacées, de sa maison à son compte en banque littéralement volatilisé. En tentant de renouer les liens de son passé, Abel, à la rue, est confrontée à un mystérieux psychopathe, qui poursuit son ancien docteur. Recherché par la police, dénué d’identité et de moyens, Abel devra trouver, seul, les réponses aux questions qui le hantent...
Xavier Dorison n’a pas son pareil pour faire naître des sentiments d’oppression et de solitude. Pourtant, c’est dans un registre différent que provient la première grande surprise de l’album : il dépeint avec une grande véracité le calvaire traversé par un père dont la fille lui a été arrachée par la maladie. Dès les premières pages, on se passionne donc dans la longue descente aux enfers de ce golden boy. Mais très vite, c’est le fantastique qui le rattrape.
Depuis XIII, ou dans un autre genre, le Lièvre de Mars, la recette de l’homme que tout le monde poursuit et qui a perdu un pan de son passé, a prouvé plusieurs fois son succès. Malgré quelques petites longueurs [1], la sauce prend une nouvelle fois, et au long des 60 pages de l’album, on voit pas le temps passer, ne parvenant pas deviner où nous entraîne le formidable conteur.
Marazano met en scène ce thriller fantastique. Si le grand public connaît ses talents de scénariste grâce à entre autres Zéro Absolu, Cuervos [2], au Complexe du Chimpanzé et dernièrement à Minik, il n’a dessiné que quelques albums précédemment, dont Le bataillon des lâches. Pour le Syndrome d’Abel, il est assisté par Jean-Michel Ponzio, son complice de Genetiks et du Complexe du Chimpanzé avec qui il publiera un nouveau récit de politiquef-iction chez Dargaud en 2009.
Comme le disait encore dernièrement Christophe Bec, son dessinateur de Zéro Absolu : « À notre époque, il faut un dessin réaliste pour percer ! » Le résultat sur cet album est mitigé : les éclairages sont fort présents, et l’on passe parfois d’un grand réalisme dans les décors à des esquisses très légères dans les personnages, en particulier dans les visages, parfois brisés, voire caricaturés. L’ensemble bénéficie du rythme endiablé du récit, mais cela ne sera pour l’instant pas le point d’orgue de la série.
Entraînant sans être particulièrement innovant, le Syndrôme d’Abel se révèle être un excellent thriller fantastique. On attend du second tome de cette trilogie annoncée, Koma, qu’il épaississe le mystère. Quand à ce premier volet, il ravira les fans de Dorison ... et les autres.
(par Charles-Louis Detournay)
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les 10 premières pages de l’album
la bande-annonce de l’album
l’interview de Xavier Dorison à ce propos.
Toutes les illustrations sont © Marazano/Dorison/Glénat.
[1] Et une faute de calcul : 1934 + 50 et quelques années = 1988 et pas 1998 ! Mais comme la présentation éditoriale annonce 1983, on peut supposer que les différentes moutures temporelles ont embrouillé les esprits.
[2] Cuervos a été primé en 2006 comme la meilleure bande dessinée adaptable au cinéma lors de la cinquième édition du Forum International Cinéma et Littérature de Monaco.
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