Les super-héros restent très présents dans le paysage de la bande dessinée américaine et certains auteurs continuent à proposer de solides histoires.
CBR en classe 7 parmi les 25 meilleures de 2009 et presque 40 parmi les 100 meilleures. Et Grant Morrison, le scénariste vedette de DC Comics ne compte pas moins de 4 entrées dans ce top 100.
Avec Batman and Robin tout d’abord (10e au classement), où le dessinateur Frank Quitely, allié au scénariste britannique déjanté, installe un nouveau héros derrière le masque de Batman (Bruce Wayne est apparemment mort depuis Batman RIP) et propose une aventure bourrée d’action.
Dans un autre registre, Morrison reprend avec Cameron Stewart au dessin les aventures de Seaguy avec Seaguy : The Slaves of Mickey Eye (24e). Au sujet de cet album, il déclarait au site CBR : « C’est mon Watchmen » [1], en ce sens qu’il peut jouer avec le thème du super-héros en toute liberté s’agissant de sa création.
On retrouve ce scénariste vedette avec Final Crisis (61e) et Final Crisis : Superman Beyond (88e), le dernier épisode de la légendaire trilogie Crisis [2]. Si les deux premiers chapitres avaient eu un grand succès auprès des lecteurs, ce dernier, dont l’intrigue est très complexe, en a laissé plus d’un perplexe...
L’année 2009 aura été aussi celle du retour de Steve Rogers, alias Captain America dans Captain America : Reborn de Ed Brubaker et Bryan Hitch (60e). Assassiné lors de la série Civil War, le voilà qui revient dans une histoire d’espace-temps. Même si personne n’attendait sa renaissance (il a été remplacé par son acolyte Bucky Barnes dans le rôle de Captain America), l’histoire a été relativement bien accueillie.
Enfin, parmi les périodiques consacrés aux super-héros, mentionnons Wednesday Comics (12e) qui a ravi les fans pendant plusieurs semaines avec ses magnifiques comic strips d’une page consacrés aux principaux héros de DC Comics.
Thriller (air connu)
Après les super-héros, le polar est le genre le plus présent dans les comics stores. Dans la sélection de CBR, 3 parmi les 5 meilleurs albums de 2009 en font partie.
Parker : The Hunter (3e au classement) du talentueux et maintes fois récompensé Darwyn Cooke (La nouvelle frontière, Batman ego, …) a été le plus plébiscité par la critique. Adaptation fidèle du roman noir de Donald Westlake, l’album raconte la vengeance de Parker, un gangster que des complices ont tenté d’assassiner. La critique a salué le style du dessinateur et l’efficacité avec laquelle le récit est mené.
Vient ensuite Chew (4e) avec John Layman au scénario et Rob Guillory au dessin, où un agent fédéral sujet à des impressions psychiques lorsqu’il ingère de la nourriture doit manger toute sorte d’horribles choses pour résoudre des crimes. Mêlant humour et noirceur, cette série a obtenu un succès inattendu auprès du public.
Moins humoristique mais tout aussi noire, Scalped Vol. 5 : High Lonesome (5e) du scénariste Jason Aaron et du dessinateur R.M. Guera raconte la vie de Dashiell Bad Horse sur la réserve indienne qui l’a vu naître et où il est désormais en couverture comme agent du FBI.
Plus loin dans le classement, on retrouve à nouveau Ed Brubaker et Sean Phillips avec Incognito (40e). Après la série Criminal qui avait donné des sueurs froides à ses lecteurs, voici l’histoire de Zack, ancien lieutenant d’une organisation criminelle, doté de super-pouvoirs qui, après avoir témoigné contre son camp, doit maintenant vivre dans le monde abhorré de ceux qui respectent les lois.
Back to Basic
L’année 2009 a eu aussi son lot de suites de séries bien établies : League of Extraordinary Gentlemen : Century du génial Alan Moore et de Kevin O’Neil où des héros libres de tout droit d’auteur, Mina Harker et Alan Quartermain [3] poursuivent leurs aventures dans le 20e siècle (16e au classement), Ex Machina de Brian K. Vaughan qui arrive bientôt à son dénouement (17e), Fables de Bill Willingham (25e), B.P.R.D. 1947 de Mike Mignola issu de l’univers de Hellboy (30e) et finalement, et non le moindre, The Walking Dead de Robert Kirkman (80e).
Free Press et mangas
Les maisons d’édition indépendantes ont continué à investir en 2009 des espaces d’expression laissés vacants par les grands éditeurs. Qu’il s’agisse de témoignage vécu, Stitches : A Memoir de David Small (23e), d’histoires d’horreurs très dérangeantes, Pim & Francie d’Al Columbia (33e), de reportage de guerre, Footnotes in Gaza de Joe Sacco (qui vient d’être publié chez Futuropolis en France) (39e), ou encore Georges Sprott de Seth (97e).
Le manga n’est pas en reste dans la liste des journalistes de CBR. On les envie même d’avoir déjà pu lire avant nous Pluto (15e), la dernière série de Naoki Urasawa (Monster) qui reprend un épisode d’Astro Boy d’Osamu Tezuka et le transforme en une série de science-fiction policière qui rappelle certains romans d’Isaac Asimov. Urasawa encore avec la série 20th Century Boys (19e) déjà traduite en français. Plus loin, on trouve Yoshihiro Tatsumi connu pour ses bandes dessinées réalisées dans les années 1970 et qui revient avec un ouvrage autobiographique A Drifting Life (29e) racontant sur plus de 800 pages la naissance du gekiga, genre de manga noir et son parcours de dessinateur. Un témoignage historique d’une grande valeur et un destin passionnant.
European Touch
Si les auteurs de manga ont réussi à s’imposer sur le marché américain, il n’en est pas de même des auteurs européens. Reste que le travail de certains éditeurs comme First Second permet aux Américains de découvrir des ouvrages essentiels tel que le photographe d’Emmanuel Guibert, Didier Lefèvre et Frédéric Lemercier (9e au classement de CBR).
À noter aussi l’étonnant Logicomix : An Epic Search for Truth (28e) réalisé en anglais par une équipe composée de Grecs et d’une française et qui raconte, à travers les yeux du logicien et philosophe Bertrand Russel, la crise des fondements qui s’est produite en mathématiques au début du XXe siècle et les débats scientifiques qui ont suivi pour asseoir les mathématiques sur une base rigoureuse.
The winner is...
Enfin, voici l’album qui a été consacré meilleur album de l’année par CBR : Asterios Polyp de David Mazzucchelli (Batman année 1, Cité de verre, Big Man). Œuvre ambitieuse qui a nécessité plusieurs années de travail, elle raconte brillamment sur plusieurs centaines de pages la vie d’un architecte qui, après l’incendie de son appartement, décide de tout quitter. Commence alors un voyage à travers les États-Unis où le personnage principal va, à travers des rencontres, renouer les fils de son passé, comprendre pourquoi son mariage a été un échec et, finalement, trouver le courage de revenir. Définitivement la bande dessinée la plus littéraire de ce palmarès.
De nombreux palmarès existent aux États-Unis, du plus prestigieux au plus spécialisé. Comme on l’a vu, celui du site Comic Book Resources a le mérite d’aborder la bande dessinée dans toute sa diversité, une qualité qui a retenu notre attention.
(par Mathias Kind)
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Bien d’autres titres intéressants figurent au palmarès de CBR. Pour le voir dans son intégralité, allez à : comicbookresources
[1] Watchmen d’Alan Moore & Dave Gibbons paru en 1986 a révolutionné la bande dessinée américaine en revisitant de fond en comble le thème du super-héros.
[2] Les autres chapitres de la trilogie Crisis sont Crisis on Infinite Earths (1985) et Infinite Crisis (2005).
[3] Mina Harker a été créée par Bram Stocker dans le roman Dracula et Alan Quartermain par Henry Rider Haggard dans le roman Les Mines du roi Salomon. Tous deux sont tombés dans le domaine public et sont désormais des personnages de La ligue des Gentlemen extraordinaires
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