On parle souvent, lorsqu’il s’agit d’Hara Kiri et de Charlie Hebdo de Cavanna ou de Choron. Ces franc-tireurs du franc-parler ont bien évidemment toute leur légitimité. Mais nul mieux que Wolinski, à mes yeux, n’a autant incarné cette « révolution Hara-Kiri ».
D’abord parce qu’il a décomplexé le dessin français. On le voit bien dans ce numéro qui, on l’a compris va bien au-delà du recueil de dessins pour aller vers une évocation biographique très parlante : on voit les premiers dessins de Georges, datés de 1960, qui louchent vers Dubout et sa Ligne claire profuse de détails ou encore vers Topor et ses clairs obscurs inquiets, mais aussi vers Chaval et Jack Davis.
Et puis soudain, comme chez Reiser, le dessin passe au croquis. Aux orties, les traits labourés d’ébéniste, le report à l’ancienne de la composition sur le papier ! Le dessin, comme l’amour, est devenu libre et souvent, Wolinski associe les deux. La démarche a stupéfait des auteurs comme Franquin qui n’arrivaient pas à se résoudre à ce jaillissement dépouillé de toute manière, s’exprimant dans une liberté de ton qui faisait envie à sa génération.
Lumineux et intelligent Wolinski, porté par l’amour, pour Maryse mais aussi pour toutes les femmes, travaillant aujourd’hui pour L’Humanité encore profondément stalinien et le lendemain pour Paris-Match, propriété d’un marchand de missiles.
Généreux Wolinski, qui aida tant ses collègues de France et d’ailleurs et qui, à l’heure de la mort, cria dit-on à ses assassins, le 7 janvier 2015 lors de l’attaque contre Charlie Hebdo : « - Va te faire enculer ! » Si ce n’est pas de l’amour, ça !..
(par Didier Pasamonik (L’Agence BD))
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